Invitation aux voyages

16 mars 2023   •  
Écrit par Eric Karsenty
Invitation aux voyages

À l’occasion du 10e anniversaire de Fisheye, la RATP invite une dizaine de photographes publié·es dans le magazine à exposer dans dix gares et stations du réseau. Une manière de faire la part belle à la photographie émergente et de placer ces auteur·es sur de bonnes voies. Une exposition en dix stations à découvrir jusqu’au 31 mars. Cet article est à retrouver dans notre dernier numéro.

En guise de clin d’œil à la saison des carnavals, la RATP a proposé à Fisheye d’explorer les questions
du déguisement et du costume à travers les images de photographes publié·es dans le magazine. Une initiative qui s’inscrit dans les opérations « La RATP invite » et qui, à cette occasion, annonce le 10e anniversaire du magazine. « Raconter, Inspirer, Révéler », la trilogie affichée à la une tient ici toutes ses promesses avec les œuvres exposées sur les quais de la Régie autonome des transports parisiens. De Bastille à Nogent-sur-Marne, comme de la station Saint-Denis – Porte de Paris à Châtillon-Montrouge, plusieurs créations insolites et inattendues balisent un parcours qui devrait ravir tout un chacun.

Fatoumata Diabaté revisite les contes traditionnels avec sa série L’Homme en animal où ses images-fables balancent entre ludique et éducatif. Une manière pour la photographe malienne de se transformer en griot du 8e art. C’est aussi en Afrique que Stephan Gladieu réalise avec un collectif d’artistes congolais Homo détritus, une série qui, avec un humour décalé, évoque la problématique de la gestion des déchets et dénonce les conséquences de la surconsommation. « J’ai eu un coup de foudre pour l’Afrique, concède pour sa part Marian Goledzinowski. J’ai pris une tarte monumentale. L’énergie, les gens… » Il y est parti pour suivre un artiste congolais, issu d’un gang d’enfants des rues « qui ne connaissent que la violence, la drogue et l’alcool de maïs » et c’est pourtant avec poésie qu’il aborde cette histoire. Jouant avec leurs costumes, le photographe met en lumière une certaine joie, une insouciance propre à l’enfance.

Le monde de l’utopie a toute sa place dans cette exposition qui se visite en mode travelling. « Je m’intéresse aux utopies du monde réel comme à des lieux qui existent sur un précipice, naviguant aux limites de l’illusion et de la réalité », déclare Gerwyn Davies à propos de sa série Utopia. Paul Rousteau développe quant à lui une œuvre onirique dans laquelle il parvient à capter la beauté, la lumière et les couleurs, même dans un monde particulièrement sombre. « J’essaie de voir ce qu’il y a derrière le réel, tous les mondes invisibles, ses déformations, ses effets. J’essaie de casser le réel, de transformer mon appareil photo pour qu’il me montre autre chose », explique le photographe. Jouant avec les codes de la photo de mode, Chiron Duong cherche à traduire ses émotions à travers les techniques du 8e art. « Je suis davantage intéressé par les questions d’ordre social, la connexion entre l’habitat humain et la Nature, entre l’urbain et le rural », précise l’auteur.

© Chiron Duong

© Chiron Duong, Portraits of Áo Dài: Hope for Peace and Love

Technique de camouflage

Avec Anonymous Women: Domestic House, Patty Carroll détourne elle aussi par ses installations les clichés fashion. Elle traite des femmes et de leurs relations complexes à la domesticité en camouflant leurs figures dans des draperies aux couleurs saturées. C’est encore une technique de camouflage qu’expérimente la Péruvienne Cecilia Paredes à travers sa série Landscapes. La photographe compose ses images en choisissant un arrière-plan à motifs devant lequel elle se met en scène en ayant préalablement peint son corps pour se fondre dans le décor. Un décor qui semble l’absorber et effacer son identité.

Du camouflage aux costumes, Marine Billet nous entraîne dans les montagnes de Bachevo, en Bulgarie. Elle nous raconte les traditions d’un village dont les habitants cachent leurs corps dans des costumes étranges, faits de peaux de bêtes. « À l’aide de leur apparence et de leur danse magique, ils chassent les mauvais esprits afin que l’année à venir soit bonne et la terre fertile », explique-t-elle. Enfin, poussant un cran plus loin les curseurs, le photographe allemand Thorsten Brinkmann présente une réjouissante galerie de hérauts fantasques et moyenâgeux. Une manière d’interpréter, avec humour et fantaisie, la relation de l’homme moderne à l’objet et à sa consommation. Les dix photographes de cette belle invitation anniversaire vous entraîneront sans l’ombre d’un doute dans autant d’aventures et de voyages stimulants. Un joli ticket pour explorer les frontières entre réel et imaginaire.

 

Retrouvez cet article dans Fisheye #58 !

© Cecilia Paredes© Cecilia Paredes

© Cecilia Paredes, Landscapes

© Patty Carroll© Patty Carroll

© Patty Carroll, extrait de la série Anonymous Women: Domestic House

© Gerwyn Davies

© Gerwyn Davies, extrait de la série Utopia

Image d’ouverture : © Gerwyn Davies

Explorez
« Chère et tendre IA »… conversation entre l’artiste et la machine
© Rineke Djikstra
« Chère et tendre IA »… conversation entre l’artiste et la machine
Imaginé dans le cadre d’une résidence à la Maison européenne de la photographie (MEP), Photo Against the Machine est un ouvrage...
19 décembre 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Focus : rituels vampiriques, fouilles archéologiques et mélancolie poétique
© Devin Yalkin, Until Dawn.
Focus : rituels vampiriques, fouilles archéologiques et mélancolie poétique
Créé par les équipes de Fisheye, Focus est un format vidéo innovant qui permet de découvrir une série photo en étant guidé·e par la...
18 décembre 2024   •  
16 expositions photos à voir pendant les vacances de Noël
© Ali Kazma / Courtesy Francesca Minini, Milan
16 expositions photos à voir pendant les vacances de Noël
Les fêtes de fin d’année sont souvent l’occasion de passer du temps avec nos proches, de nous reposer et de trouver les nouvelles...
16 décembre 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
20 beaux-livres de photographie à (s’)offrir à Noël
Service à bord d’une voiture-restaurant du train Capitole, 1966. © Fonds de dotation Orient Express
20 beaux-livres de photographie à (s’)offrir à Noël
Offrir un ouvrage à Noël est toujours une belle manière d’ouvrir des portes sur de nouveaux mondes. À cet effet, la rédaction...
13 décembre 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
The Color of Money and Trees: portraits de l'Amérique désaxée
©Tony Dočekal. Chad on Skid Row
The Color of Money and Trees: portraits de l’Amérique désaxée
Livre magistral de Tony Dočekal, The Color of Money and Trees aborde les marginalités américaines. Entre le Minnesota et la Californie...
21 décembre 2024   •  
Écrit par Hugo Mangin
Paysages mouvants : la jeune création investit le Jeu de Paume
© Prune Phi
Paysages mouvants : la jeune création investit le Jeu de Paume
Du 7 février au 23 mars 2025, le Jeu de Paume accueille le festival Paysages mouvants, un temps de réflexion et de découverte dédié à la...
20 décembre 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Mirko Ostuni : une adolescence dans les Pouilles
© Mirko Ostuni, Onde Sommerse.
Mirko Ostuni : une adolescence dans les Pouilles
Dans Onde Sommerse, Mirko Ostuni dresse le portrait de sa propre génération se mouvant au cœur des Pouilles. Cette jeunesse tendre et...
20 décembre 2024   •  
Écrit par Marie Baranger
Ces séries photographiques qui cherchent à guérir les blessures
© Maurine Tric
Ces séries photographiques qui cherchent à guérir les blessures
Pour certain·es artistes, la photographie a un pouvoir cathartique ou une fonction guérisseuse. Iels s'en emparent pour panser les plaies...
19 décembre 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine