Dans ses séries, Amy Sacka documente la renaissance de Détroit, dans le Michigan. Une façon de rendre un hommage intime à ceux qui font la ville au quotidien. Un engagement qui répond aussi à ses interrogations personnelles.
« Comment parvenons-nous à créer des espaces personnels et uniques , un chez-soi ? » Par cette question qui habite Amy Sacka au plus profond d’elle-même, elle parvient à dresser un portrait sensible de Détroit. Dans un travail humaniste, la photographe et écrivaine rend à la ville un hommage tendre et sincère. Originaire de cette ancienne colonie française, elle en est partie avant de revenir en 2012 pour s’y installer durablement. « Ma vie et Détroit sont intimement liées. Il n’y a pas forcément l’un qui mène à l’autre, si ce n’est mon désir d’être une sorte d’intendante, un réceptacle documentaire pour cet endroit. »
C’est à cette date qu’elle débute Say my name (Detroit), une série qui inaugure un cycle de travaux autour de cette cité du Michigan. Suivrons Belle Isle (Detroit) et Sundays at the Carpet House. Elle tente ainsi un rassemblement des identités. « Je pense que je photographie des communautés, confie-t-elle. Mais pour moi, le travail consiste davantage en une forme de conversation, voire de communion. » Dans un noir et blanc juste, elle saisit la renaissance de Détroit, et rappelle à ceux qui l’ont parfois présentée comme décadente que des âmes la font vivre.
Construire la mémoire
Les images d’Amy Sacka traduisent ses sentiments. Bien qu’elle qui se dise réservée, elle propose une photographie qui transpire l’empathie. En témoigne sa série #Roommatesafter40 dans laquelle Amy Sacka livre son expérience de colocataire de plus de 40 ans. « À la suite d’un mariage, d’un divorce ,et de dix ans de vie seule, j’ai ouvert ma maison de deux étages à Detroit à des amis. J’étais sur le point de fêter mes 42 ans, ce qui ne me réjouissait pas. Triste de voir le coût de la vie exploser, j’ai voulu créer ma communauté. » La photographe n’avait pas envisagé cette dernière série comme une suite de son travail sur Détroit. C’est le responsable d’une galerie souhaitant présenter ses clichés qui lui a fait réaliser que #Roomatesafter40 parlait aussi de la ville.
Si l’œuvre d’Amy Sacka traite de Détroit, elle nous révèle également une part d’intimité de l’artiste. « Je suis introvertie. Je m’épuise émotionnellement à créer une intimité avec les autres à travers la photographie. Alors j’ai besoin de pauses, je ne peux pas photographier à temps plein. C’est pour cela que je me trouve vers l’écriture », reconnaît la photographe. Par ses images, Amy Sacka créée des liens qui la rapproche de sa terre d’origine. Obsédée par la peur d’oublier, elle veut également construire la mémoire des lieux avant qu’ils ne disparaissent dans les grandes transformations que connaît le paysage urbain. « Souvent, nous partons et nous oublions la terre et les lieux qui importent tellement pour notre identité. Je veux conserver ces liens avec mes photos. »
© Amy Sacka