Au bord de la rivière, le Blue Bayou de Martin Colombet

10 juin 2021   •  
Écrit par Eric Karsenty
Au bord de la rivière, le Blue Bayou de Martin Colombet

Avec Blue Bayou, le photographe français Martin Colombet dresse le portrait de son amoureuse Tess, au fond des forêts qui l’ont vu grandir. Transportés ailleurs, dans un voyage sensible, on découvre les instants fleurissants d’un amour loin du monde. Cet article est à retrouver dans notre dernier numéro.

C’est un pays imaginaire composé par deux amoureux, qui sont aussi des amoureux de l’image. Martin, photographe, les compose ; et Tess, iconographe, les choisit. Mais ici, c’est d’abord son histoire à elle que Martin a choisi de raconter. Un portrait augmenté aux lieux qui l’ont vu grandir, un bayou made in France où la Franco-Américaine retrouve ses racines. L’histoire a commencé de l’autre côté de l’Atlantique, à côté de Boston, au cours de l’été 2018, quand le grand-père de Tess propose au jeune couple d’aller voir une expo de la photographe Sally Mann. « Je connaissais son travail, détaille Martin, en particulier la série Immediate Family, qui avait eu un fort écho en moi, mais je n’avais vu que le livre. Voir les tirages a été un choc pour moi et pour Tess aussi. En rentrant en France, nous avons fait les premières images. »

© Martin Colombet

Un réseau sensuel et onirique

Commencés comme un journal intime qui trace les débuts de leur histoire, les premiers calotypes tissent un réseau sensuel et onirique. Les méandres de la rivière s’associent à la douceur des corps, des plantes et des animaux qui semblent s’y fondre comme dans un songe. Le calotype, cette technique ancienne aux fortes contraintes (faible sensibilité, long temps de pose, mise au point délicate de la chambre 13×18 cm…) « influence la façon de faire de la photographie et de poser, analyse le photographe. Tout prend plus de valeur, la prise de vue devient solennelle. Ce procédé produit de la beauté au-delà de sa plastique et change le rapport au temps. » Loin de toute nostalgie ou du côté « un peu snob et élitiste » de la photographie pictorialiste, Martin n’hésite pas à ajouter des photos prises au Leica ou au smartphone afin de saisir des instants fugaces, des snapshots qui dynamisent la narration. « J’aime bien mélanger les générations d’appareils photo, ça permet de voyager dans le temps. Même si la colonne vertébrale de ce travail demeure le calotype », ajoute-t-il.

© Martin Colombet© Martin Colombet

Le premier chapitre

Au fil des images de ce huis clos dans les eaux saumâtres de ce Blue Bayou, « où elle et moi dialoguons dans l’indifférence du monde, des lieux hostiles aux civilités des adultes mais où peut s’exprimer pleinement la sauvagerie des enfants », on voit apparaître ce que Tess et Martin appellent leurs totems : des éléments qui balisent leur histoire. Ce sont pour elle les arbres, les canoés et les animaux qui l’ont vu grandir. Puis c’est un arc construit avec un jeune frêne abattu à côté de la maison, et un couteau dont le manche a été façonné avec le cerisier du jardin, que Martin lui a offert. Ou encore les brochets pêchés dans la rivière… Tout un monde aussi réel qu’imaginaire, constituant le premier chapitre d’une histoire que les deux amoureux ont bien l’intention de poursuivre. Pour leur plaisir autant que pour le nôtre.

© Martin Colombet

© Martin Colombet© Martin Colombet

© Martin Colombet

© Martin Colombet© Martin Colombet

© Martin Colombet© Martin Colombet

Blue Bayou © Martin Colombet

Explorez
La sélection Instagram #452 : la danse sous toutes ses formes
© Aleksander Varadian Johnsen / Instagram
La sélection Instagram #452 : la danse sous toutes ses formes
Cette semaine, les photographes de notre sélection Instagram capturent les corps – et même les éléments – qui dansent à en perdre...
30 avril 2024   •  
Écrit par Marie Baranger
Les coups de cœur #490 : Guillaume Nedellec et Simona Pampallona
© Guillaume Nedellec
Les coups de cœur #490 : Guillaume Nedellec et Simona Pampallona
Nos coups de cœur de la semaine, Guillaume Nedellec et Simona Pampallona, nous plongent tous·tes deux dans une esthétique en...
29 avril 2024   •  
Isabelle Vaillant : récits d’une construction intime
© Isabelle Vaillant
Isabelle Vaillant : récits d’une construction intime
Jusqu’au 19 mai 2024, la photographe Isabelle Vaillant investit L’Enfant Sauvage, à Bruxelles, en proposant une exposition rétrospective....
26 avril 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Elie Monferier : le filon au bout de l’échec
© Elie Monferier
Elie Monferier : le filon au bout de l’échec
Imaginé durant une résidence de territoire au cœur du Couserans, en Ariège, Journal des mines, autoédité par Elie Monferier, s’impose...
25 avril 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Ces séries de photographies réalisées au flash
© Nicolas Hrycaj
Ces séries de photographies réalisées au flash
En ce milieu de printemps, à mesure que les nuits s’écourtent, les flashs des appareils photo se multiplient pour immortaliser la douceur...
Il y a 3 heures   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Au Musée de la Femme, la photographie déploie son langage universel
© Camelia Shahat
Au Musée de la Femme, la photographie déploie son langage universel
Jusqu'au 31 octobre 2024, le Musée de la Femme de Marrakech accueille Photographie : le langage universel, une exposition imaginée avec...
Il y a 7 heures   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Flower Rock : Ana Núñez Rodriguez verse des larmes d’émeraude
© Ana Núñez Rodríguez
Flower Rock : Ana Núñez Rodriguez verse des larmes d’émeraude
Aujourd’hui encore, l’extraction de cette pierre charrie de nombreuses croyances et légendes. C’est ce qui a captivé Ana Núñez Rodríguez...
Il y a 11 heures   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Focus #72 : Mohamed Bourouissa esquisse les lignes de force d’une révolte
05:07
© Fisheye Magazine
Focus #72 : Mohamed Bourouissa esquisse les lignes de force d’une révolte
C’est l’heure du rendez-vous Focus ! Ce mois-ci, et en l’honneur de Signal, sa rétrospective, accueillie jusqu’au 30 juin 2024 au Palais...
01 mai 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine