Benjamin Schmuck : « Lever les sages »

22 avril 2021   •  
Écrit par Finley Cutts
Benjamin Schmuck : « Lever les sages »

Dans Lever les sages, Benjamin Schmuck voyage au Bénin pour rencontrer celles et ceux qui célèbrent la mort autrement. Lors de cérémonies flamboyantes et colorées, le photographe français immortalise nos défunts – d’une façon paradoxalement pleine de vie. Cet article est à retrouver dans notre dernier numéro.

La mort est un sujet tabou, parfois romantique mais toujours producteur de fantasmes. Après avoir visionné les vidéos de clôture du Festival international de Porto-Novo, la capitale du Bénin, où des défunts « assistent à des célébrations », Benjamin Schmuck a décidé de se rendre sur place. « À vrai dire, je n’avais jamais rien vu de tel », se souvient le photographe français. Dans les rues de la ville, des centaines de divinités masquées défilaient au rythme des tambours, habillées de couleurs vives caractéristiques d’une partie de l’Afrique de l’Ouest, en particulier du Bénin – berceau de la religion vaudoue. Mystique et fascinante, cette dernière devient le sujet de la série Lever les sages« Au Bénin,“Lever les sages” désigne l’action de remercier un prêtre vaudou pour les conseils prodigués. Pour moi, c’est aussi invoquer le défunt et le faire passer du monde des morts à celui des vivants », explique-t-il. Avec des costumes riches en détails et hauts en couleur, la mort devient une célébration spirituelle, loin des tabous qui lui sont attachés en France. « La place du mort dans la société béninoise et cette manière de la représenter me bouleversent, tant elle est exacerbée », poursuit-il.

© Benjamin Schmuck

Ode radieuse à nos défunts

Ne connaissant pas les coutumes du pays, Benjamin Schmuck a eu recours à un guide qui lui a permis d’accéder aux rituels vaudous de ces sociétés secrètes. « Je me souviens notamment d’une cérémonie dans un petit village non loin de Calavi. Le prêtre parlait du pouvoir de l’eau, j’entendais le bruit de la pluie tomber sur la tôle au-dessus de ma tête… pendant qu’à l’extérieur le soleil était au zénith », se souvient-il. Impressionné par la force de cette liturgie, le photographe a gardé une certaine distance qui a influencé ses images. « Je sortais l’appareil photo uniquement quand on m’invitait à le faire. On ne sait pas qui est sous le masque. On dit même qu’un non-initié ne doit pas toucher le pagne d’une divinité, au risque de mourir », explique l’artiste. Grand Popo, Ouidah, Abomey… De ville en ville, dans le sud du pays, l’artiste multiplie les rencontres. L’une d’entre elles le conduit à Augustin Sanou, peintre béninois connu pour avoir peint les murs d’un couvent vaudou. « Augustin a eu la gentillesse de collaborer avec moi. Il a peint plusieurs tableaux à partir de mes images. La découverte de ces très belles peintures est sans doute l’un des moments les plus émouvants de mon voyage », explique Benjamin Schmuck. Ode radieuse à nos défunts, Lever les sages célèbre avec ses costumes flamboyants une autre vision de la mort, paradoxalement pleine de vie.

Présentée au Festival Circulation(s) jusqu’au 9 mai, Lever les sages paraîtra bientôt sous forme de livre aux éditions Entorse

© Benjamin Schmuck

 

© Benjamin Schmuck

 

© Benjamin Schmuck

 

© Benjamin Schmuck

 

© Benjamin Schmuck

© Benjamin Schmuck

Lever les sages © Benjamin Schmuck

Explorez
Marc Riboud : dix ans de conflit vietnamien dans une exposition
À la sortie de l'école dans un village de la côte, Nord Vietnam, 1969 © Marc Riboud / Fonds Marc Riboud au musée Guimet
Marc Riboud : dix ans de conflit vietnamien dans une exposition
Le musée Guimet des Arts asiatiques et l’association Les Amis de Marc Riboud s’unissent pour présenter l’exposition Marc Riboud –...
18 avril 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Basile Pelletier et Sølve Sundsbø conversent : « La curiosité est ma principale source d'inspiration »
Le linge, 2021 © Basile Pelletier
Basile Pelletier et Sølve Sundsbø conversent : « La curiosité est ma principale source d’inspiration »
Le jeune talent Basile Pelletier, 21 ans, ancien élève de la section art et image de l’école Kourtrajmé, échange avec le photographe...
17 avril 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
La sélection Instagram #502 : rebelle un jour, rebelle toujours
© Piotr Pietrus / Instagram
La sélection Instagram #502 : rebelle un jour, rebelle toujours
Les artistes de notre sélection Instagram de la semaine font résistance. Résistance contre l’oppression, contre les diktats, contre les...
15 avril 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Fotohaus Bordeaux 2025 : des existences engagées
© Olivia Gay
Fotohaus Bordeaux 2025 : des existences engagées
La quatrième édition de Fotohaus Bordeaux a commencé. Jusqu’au 27 avril 2025, l’Hôtel de Ragueneau accueille l’événement qui, cette...
12 avril 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
La sélection Instagram #503 : les pieds sur Terre
© Garrison Garner / Instagram
La sélection Instagram #503 : les pieds sur Terre
À l’occasion de la journée de la Terre, les artistes de notre sélection Instagram de la semaine célèbrent notre planète. Iels...
Il y a 2 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
Dans l'œil de SMITH : métamorphose des sols
Dami (Fulmen), 2024 © SMITH, Courtesy Galerie Christophe Gaillard.
Dans l’œil de SMITH : métamorphose des sols
Aujourd’hui, plongée dans l’œil de SMITH, qui nous révèle les dessous de deux images issues de sa série Dami (Fulmen), réalisée lors de...
21 avril 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les coups de cœur #540 : Rosalie Kassanda et François Dareau
© Rosalie Kassanda
Les coups de cœur #540 : Rosalie Kassanda et François Dareau
Nos coups de cœur de la semaine, Rosalie Kassanda et François Dareau, arpentent les rues du monde en quête de quelques étonnements et...
21 avril 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les images de la semaine du 14 avril 2025 : mémoire et conversations
© Louise Desnos
Les images de la semaine du 14 avril 2025 : mémoire et conversations
C’est l’heure du récap ! Récits intimes, histoires personnelles ou collectives, approches de la photographie… Cette semaine, la mémoire...
20 avril 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet