Afirika Artfest : pluralité créative et introspection du continent africain 

15 mars 2023   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Afirika Artfest : pluralité créative et introspection du continent africain 

Afirika Artfest présente We are enough, une exposition faite d’œuvres pluridisciplinaires de onze artistes originaires d’Afrique. Cette deuxième édition examine les préjugés qui composent les sociétés contemporaines africaines de manière créative et novatrice dans une scénographie particulièrement soignée. À découvrir, en grande partie, à la 193 Gallery jusqu’au 26 mai 2023. 

« Je souhaite présenter la créativité africaine comme moi je la vois et non pas comme des experts de l’Afrique qui n’y ont pas mis un pied depuis plus de 40 ans la perçoivent », déclare Roger Niyigena Karera, commissaire de l’exposition et cofondateur d’Afirika Artfest. Après une première édition prometteuse en 2021 au cœur de la Savoie sur la thématique de la ville de demain, Afirika Artfest investit la capitale française pour son deuxième volet qui se veut être une introspection de la société contemporaine africaine. Intitulée We are enough, l’exposition se présente sous la forme de huit chapitres. Les sept premiers sont à découvrir dans les deux espaces de la 193 Gallery et le dernier à la galerie Carole Kvasnevski. 

Dans le premier chapitre de l’évènement, nommé Awareness, Joana Choumali, originaire de Côte d’Ivoire, expose, entre autres œuvres, sa vision d’un éveil méditatif. À l’aide de son smartphone, elle photographie la ville de Casablanca au Maroc – où elle a étudié les arts graphiques – entre cinq et sept heures du matin, horaire correspondant à l’heure de la première prière musulmane. Après une impression sur toile, l’artiste effectue une broderie minutieuse et précieuse. Tel un processus de méditation, elle ritualise sa pratique du matin jusqu’au soir, à l’instar de la prière. Puis, l’exposition se poursuit dans un puits de lumière consacrée au deuxième chapitre, Multiple identities, et plus précisément aux œuvres de Zanele Muholi. Dans les clichés présentés, le·a photographe d’Afrique du Sud interroge ses thématiques de prédilection : les questions d’identités et d’acceptation des différences. 

© Joana Choumali, Courtesy of 193 Gallery

© Joana Choumali, Courtesy of 193 Gallery

Des talents multiples 

Dans cette exposition, la photographie se transforme en un outil à remanier. Les arts se rencontrent pour offrir la vision d’une Afrique multiple et créative. Établie au Kenya, Thandiwe Muriu, réalise des portraits de personnes qui se fondent dans un fond de tissu africain pour mieux exister. Exposés dans le chapitre Self acceptation, les clichés de l’artiste illustre l’estime et l’amour de soi. Elle revisite les coiffures africaines populaires ainsi que des objets du quotidien par une autre fonctionnalité qui leur est associée. La place de la femme dans la société africaine s’affiche comme la thématique centrale de ses œuvres. À l’étage de ce premier lieu d’exposition, les visiteurices peuvent s’immiscer dans le monde extravagant d’April Bey, Atlantica. Entre fourrures et paillettes, l’artiste née aux Bahamas et installée à Los Angeles réalise des œuvres de grande envergure. À la frontière entre la couture et la photographie, April Bey invite les visiteurices dans un univers afrofuturiste qui forme une vive critique sociale. Elle veille à ce que les matières premières qui lui permettent de créer proviennent d’entreprises appartenant à des femmes noires. 

L’exposition se poursuit ensuite en face de l’entrée principale de la galerie, en traversant la rue, avec le cinquième chapitre, Renaissance. Les sujets présentés fâchent, mais une nouvelle conscience de la société contemporaine africaine permet de les affronter plus sereinement. Dans ce volet, Modou Dieng Yacine, originaire du Sénégal, présente un discours de paix. Sur des photos de soldats noirs d’Afrique et d’Amérique, notamment des tirailleurs sénégalais, il appose de la peinture colorée. Il s’inspire de ses jeunes héros noirs et de la culture américaine pour délivrer un message frappant : une Afrique fière de ses ancêtres et de ses valeurs ancestrales. Aussi bien personnelle que collective, l’introspection suggérée par cette exposition permet la découverte d’un riche patrimoine créatif ainsi que de l’histoire forte et puissante de l’Afrique. 

© Thandiwe Muriu, Courtesy of 193 Gallery © Thandiwe Muriu, Courtesy of 193 Gallery 

© Thandiwe Muriu, Courtesy of 193 Gallery

© Modou Dieng Yacine, Courtesy of 193 Gallery

© Modou Dieng Yacine, Courtesy of 193 Gallery

© Zanele Muholi, Courtesy of Galerie Carole Kvasnevski © Zanele Muholi, Courtesy of Galerie Carole Kvasnevski

© Zanele Muholi, Courtesy of Galerie Carole Kvasnevski

Image d’ouverture : © Modou Dieng Yacine, Courtesy of 193 Gallery

Explorez
Dans l’œil de Pablo Saavedra de Decker : le bonheur d’être seul dans sa tête
Le général Augusto Pinochet portant le cercueil du gouverneur de la province de Santiago, Carol Urzúa, Santiago, Chili, 31 août 1983 © Marie-Laure de Decker
Dans l’œil de Pablo Saavedra de Decker : le bonheur d’être seul dans sa tête
Cette semaine, nous vous plongeons dans l’œil de Pablo Saavedra de Decker. À l’occasion de la rétrospective que la Maison...
14 juillet 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Octavio Aguilar remporte le prix Découverte Roederer
Ma yëë tunjoty, ma yëë kopkjoty, 2020. © Octavio Aguilar. Avec l’aimable autorisation de l’artiste / Parallel Oaxaca.
Octavio Aguilar remporte le prix Découverte Roederer
Pour la deuxième année consécutive, les Rencontres d'Arles mettent en lumière les sept finalistes du prix Découverte Fondation Roederer à...
12 juillet 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Rencontres d'Arles 2025 : les coups de cœur de la rédaction
Montagne de Corte, Corse, 2022. © Jean-Michel André. Avec l’aimable autorisation de l’Institut pour la photographie / Galerie Sit Down.
Rencontres d’Arles 2025 : les coups de cœur de la rédaction
En parallèle de ses articles sur la 56e édition des Rencontres d’Arles, qui se tient jusqu’au 5 octobre 2025, la rédaction...
12 juillet 2025   •  
Camille Lévêque décortique la figure du père
© Camille Lévêque. Glitch, 2014. Avec l’aimable autorisation de l’artiste
Camille Lévêque décortique la figure du père
Dans À la recherche du père, Camille Lévêque rend compte de questionnements qui l’ont traversée pendant de longues années....
10 juillet 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Polina Ganz : le rêve comme refuge
© Polina Ganz
Polina Ganz : le rêve comme refuge
La photographe allemande Polina Ganz explore des mondes imaginaires nourris par la culture underground, les visions lynchéennes et le...
Il y a 7 heures   •  
Écrit par Milena III
La sélection Instagram #515 : faire paysage
© Eleonora Busato / Instagram
La sélection Instagram #515 : faire paysage
Comment habitons-nous l’espace ? Quelle place y occupons-nous ? Les artistes de notre sélection Instagram décentrent l’être humain du...
15 juillet 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Dans l’œil de Pablo Saavedra de Decker : le bonheur d’être seul dans sa tête
Le général Augusto Pinochet portant le cercueil du gouverneur de la province de Santiago, Carol Urzúa, Santiago, Chili, 31 août 1983 © Marie-Laure de Decker
Dans l’œil de Pablo Saavedra de Decker : le bonheur d’être seul dans sa tête
Cette semaine, nous vous plongeons dans l’œil de Pablo Saavedra de Decker. À l’occasion de la rétrospective que la Maison...
14 juillet 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les coups de cœur #550 : Guillaume Hutin et Ali Beşikçi
Masumiyet © Ali Beşikçi
Les coups de cœur #550 : Guillaume Hutin et Ali Beşikçi
Guillaume Hutin et Ali Beşikçi, nos coups de cœur de la semaine, ont au centre de leur pratique la notion de dialogue. Si le premier fait...
14 juillet 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot