Cédrine Scheidig : réflexion poétique et politique sur l’hybridité culturelle

14 février 2023   •  
Écrit par Costanza Spina
Cédrine Scheidig : réflexion poétique et politique sur l'hybridité culturelle
Le Studio de la MEP accueille une exposition de la franco-caribéenne Cédrine Scheidig, lauréate du Prix Dior de la Photographie et des Arts Visuels pour Jeunes Talents 2021. L’artiste mêle nature, humanité, corps, vie urbaine et nature morte, en bâtissant des ponts entre des mondes à l’apparence irréconciliables et en menant une réflexion sur l’hybridité culturelle. À voir jusqu’au 26 mars.
Née en 1994, Cédrine Scheidig est une photographe originaire de la Seine-Saint-Denis. Diplômée de l’ENSP d’Arles, elle vit et travaille en région parisienne. Lauréate du Prix Dior à Arles en 2021, elle se place aujourd’hui parmi les talents émergents de la photographie à suivre de près : en 2022, le British Journal of Photography  la nomme en effet parmi les « Ones to Watch ». En 2023, elle ouvre la nouvelle saison du Studio de la Maison Européenne de la Photographie avec une exposition exceptionnelle : de la terre à la mer. Dans ce parcours, la photographe présente deux séries qu’elle met en dialogue : It is a Blessing to be the Color of Earth (2020), documentant la vie des membres de la diaspora africaine-caribéenne qui résident en banlieue parisienne, et Les mornes, le feu, entamée en 2022 dans la ville martiniquaise de Fort-de-France. Ses portraits baignés de lumière et ses paysages urbains ouvrent une réflexion autour de l’identité post-coloniale et de l’hybridité culturelle et mettent en avant un travail photographique nourri du métissage, de la rencontre et du partage.

Diamant, 2022 © Cédrine Scheidig

Diamant, 2022 © Cédrine Scheidig

Récits personnels de la jeunesse diasporique

Au centre des récits composés par Cédrine Scheidig réside la question de l’hybridité culturelle d’une jeunesse diasporique en quête de repères. En s’affranchissant des codes conventionnels de la photographie documentaire, l’autrice exprime sa propre vision de la jeunesse des îles et véhicule une certaine subjectivité autour de la représentation de sa quête d’identité. Ce qu’elle souhaite ? Transmettre la sensation d’un lieu et d’une histoire plutôt qu’une réalité neutre. C’est à travers ces récits personnels qu’elle parvient à tirer le portrait de ces jeunes, réalisant des clichés au sein desquels la lumière est omniprésente, frontale, poétique, mais sans fioritures.

Une simplicité narrative faisant émerger les sujets politiques qui animent les deux séries : l’identité de cette jeunesse, le passé colonial, la masculinité contemporaine, ou encore la migration et l’hybridation. L’exposition, intitulée de la mer à la terre, incarne la pérégrination du lieu d’origine au lieu de vie – une interprétation littérale du voyage des îles vers le continent. Un titre qui évoque plus largement le voyage et ses possibilités de métissage et de rencontre. Comme l’affirme la photographe, son corpus est constitué de « plusieurs espaces, plusieurs cultures, différents rapports à la Terre et à l’Histoire. » Au lendemain du Prix Dior, Cédrine Scheidig revenait en ces termes sur sa démarche artistique : « mon travail photographique est une élaboration poétique autour de corps et d’expériences qui sont assez peu représentés ou qui sont représentés d’une façon très spécifique par les médias et par les discours dominants. Qui sont finalement assez peu explorés d’une manière créative et sensible. »

Palmier, 2021 © Cédrine ScheidigRobi, 2020 © Cédrine Scheidig

© à g. Palmier, 2021 © Cédrine Scheidig, à d. Robi, 2020 © Cédrine Scheidig

Femme-mangrove, 2021 © Cédrine ScheidigGold, 2022 © Cédrine Scheidig

© à g. Femme-mangrove, 2021 © Cédrine Scheidig, à d. Gold, 2022 © Cédrine Scheidig

Image d’ouverture : Diamant, 2022 © Cédrine Scheidig

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