Sidonie Ronfard métamorphose le réel

27 février 2023   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Sidonie Ronfard métamorphose le réel

Artiste photographe plasticienne, Sidonie Ronfard expérimente le médium photographique pour illustrer la chaleur de nos émotions. Diplômée de l’ENSAD, son univers entremêle un esthétisme contemplatif à une observation cartésienne d’éléments naturels.

À l’âge de dix-sept ans, Sidonie Ronfard part vivre un an à Seattle. Dans le lycée où elle est scolarisée, le Glacier Peak High School, des cours de photographie argentique noir et blanc sont dispensés. Après avoir testé le médium à l’aide d’appareils jetables offerts par son père pendant son enfance, l’artiste participe à ces cours afin d’améliorer sa pratique. Elle commence alors à capturer son quotidien et son intimité. Puis, très rapidement, Sidonie collectionne les images de la lune qui apparait et du soleil qui se lève. « C’était des repères que je partageais à des moments différents avec les autres, avec les absents. La photographie est très vite devenue un moyen de comprendre mes pensées, un dialogue intérieur face à mes peurs », confie la photographe.

Désormais jeune diplômée de l’ENSAD, l’École nationale supérieure des Arts Décoratifs de Paris, Sidonie Ronfard utilise ses clichés comme manière de rendre visible un sentiment tout en détournant la photo de sa simple reproduction du réel. En s’imprégnant des images fictives suggérées par la musique, l’artiste partage des œuvres harmonieuses qui interagissent entre elles. « Slowdive est un groupe qui m’a beaucoup inspirée. Cette mélancolie adolescente ne me quitte pas et habite mon regard sur le monde, sur la société qui m’entoure », témoigne la photographe. Peter Pan, de James Matthew Barrie, guide également l’artiste dans son processus de création. Entre un retour en enfance assumé et une précieuse maturité, l’ensemble de l’œuvre de Sidonie Ronfard est pensé, réalisé puis exposé avec justesse et précision. 

© Sidonie Ronfard© Sidonie Ronfard

Des techniques expérimentales 

Se décrivant comme une artiste photographe plasticienne, Sidonie Ronfard bouscule les codes du 8e art en jouant avec les matières, les images et les installations. Bien que le numérique ne soit pas un frein à sa production, sa créativité la pousse à utiliser la photographie analogique. « Du choix de la pellicule au tirage, le processus argentique fait battre mon coeur. Le fait de ne pas voir ce qui est pris en photo et de laisser un temps où l’image “ n’existe pas ”. J’aime ce rapport à la poussière du film argentique, de son défaut et de l’imaginaire qu’il suggère », précise-t-elle. Dans la phase de préparation d’une œuvre, après la prise de vue, Sidonie transfère ses photographies sur différents supports grâce à une technique nommée sublimation. Elle ajoute : « j’utilise également, entre autres procédés, la solarisation pour créer des fuites lumineuses lorsque je tire mes clichés au laboratoire ».

« La déformation de l’image appartient au souvenir et à la dégradation infligée par le temps. Elle nous rappelle l’évolution perpétuelle de ce qui nous entoure », explique la technicienne. La scénarisation et la mise en espace se présentent comme les points culminants de son travail et font preuve d’une très grande réflexion de la part de l’artiste. Lorsqu’elles sont sous la forme d’une installation, ses photographies s’imposent dans un espace précis et témoignent de « la mutation constante des environnements naturels, personnels et relationnels ».

© Sidonie Ronfard

Brûlure émotionnelle et distorsion du réel

La condensation sur une vitre, la lave qui explose, la tempête, les vagues, la surface d’une eau stagnante… Les inspirations majeures de Sidonie Ronfard découlent des éléments que la nature nous offre. « Le rapport à la chaleur, à une brûlure émotionnelle ou encore à une fièvre psychologique et physique sont des thèmes récurrents de mon univers. J’y confronte la tension entre les espaces humains, féminins et les espaces extérieurs », raconte-t-elle. Dans le triptyque Changement d’état, l’artiste utilise d’ailleurs la distorsion du réel afin de présenter des phénomènes naturels en mutation : un verre d’eau où l’intérieur n’est pas de la même température que son extérieur – « exactement comme on peut l’expérimenter émotionnellement » – un savon qui a fondu sous l’eau chaude et laisse apparaitre un chemin, comme des veines sur une main, et une photographie congelée qui délivre une image physiquement transformée par le changement d’état qu’elle a subi. 

Issue de la série Inside Insight, le cliché amitiés incarne, quant à lui, la douceur et la violence. Il illustre une main propre qui vient à l’aide de deux mains recouvertes de prune dégoulinante, ressemblant à du sang. « Un mouvement libre assez complexe s’est produit sur cette image qui parle de “ se salir les mains ”, du soutien et d’une certaine fièvre de par la chaleur de sa colorimétrie », explique l’autrice. Essence importante dans sa créativité, l’amour passionnel, amical et les relations qui en découlent, permettent à Sidonie Ronfard d’interroger dans sa démarche photographique les doutes, les défauts complexés par notre société et la force féminine. 

© Sidonie Ronfard
© Sidonie Ronfard© Sidonie Ronfard
© Sidonie Ronfard© Sidonie Ronfard
© Sidonie Ronfard© Sidonie Ronfard
© Sidonie Ronfard© Sidonie Ronfard
© Sidonie Ronfard

© Sidonie Ronfard

© Sidonie Ronfard© Sidonie Ronfard

© Sidonie Ronfard

© Sidonie Ronfard

Explorez
Julie Jones est nommée directrice de la Maison européenne de la photographie
Julie Jones © Agnès Geoffray
Julie Jones est nommée directrice de la Maison européenne de la photographie
Le conseil d’administration de la Maison européenne de la photographie vient de révéler le nom de sa nouvelle directrice : il s’agit de...
12 décembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
4 livres photo, signés Fisheye Éditions, à (s’)offrir à Noël
© Boby
4 livres photo, signés Fisheye Éditions, à (s’)offrir à Noël
Offrir un ouvrage à Noël est toujours une belle manière d’ouvrir des portes sur de nouveaux univers. À cet effet, nous avons...
12 décembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Cloud Dancer : 7 séries photo qui arborent la couleur Pantone 2026
© Damien Krisl
Cloud Dancer : 7 séries photo qui arborent la couleur Pantone 2026
Chaque mois de décembre, Pantone dévoile sa couleur pour l’année suivante. Pour 2026, il s’agira de « Cloud Dancer », à savoir une nuance...
10 décembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
La sélection Instagram #536 : perceptions altérées
© Melchior Dias Santos / Instagram
La sélection Instagram #536 : perceptions altérées
Les artistes de notre sélection Instagram de la semaine s’amusent à déformer leurs images. Ils et elles jouent avec le flou, la...
09 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Grégoire Beraud et les terres colorées de l'Amazonie
Kipatsi © Grégoire Beraud
Grégoire Beraud et les terres colorées de l’Amazonie
Dans sa série Kípatsi, réalisée dans l’Amazonie péruvienne, Grégoire Beraud met en lumière la communauté Matsigenka, sa relation à la...
13 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
À la MEP, les échos de vie urbaine de Sarah van Rij
© Sarah van Rij
À la MEP, les échos de vie urbaine de Sarah van Rij
Jusqu’au 25 janvier 2026, Sarah van Rij investit le Studio de la Maison européenne de la photographie et présente Atlas of Echoes....
12 décembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Julie Jones est nommée directrice de la Maison européenne de la photographie
Julie Jones © Agnès Geoffray
Julie Jones est nommée directrice de la Maison européenne de la photographie
Le conseil d’administration de la Maison européenne de la photographie vient de révéler le nom de sa nouvelle directrice : il s’agit de...
12 décembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
4 livres photo, signés Fisheye Éditions, à (s’)offrir à Noël
© Boby
4 livres photo, signés Fisheye Éditions, à (s’)offrir à Noël
Offrir un ouvrage à Noël est toujours une belle manière d’ouvrir des portes sur de nouveaux univers. À cet effet, nous avons...
12 décembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet