« Tous ces récits d’exodes sont universels »

30 avril 2018   •  
Écrit par Lou Tsatsas
« Tous ces récits d’exodes sont universels »

John Francis Peters a arpenté les États-Unis de long en large. Lorsqu’il déménage à San Diego, en 2012, il découvre une curieuse communauté de voyageurs, venue passer l’hiver loin du froid. Rencontre avec l’auteur de California Winter.

Fisheye : As-tu toujours su que tu voulais être photographe ?

John Francis Peters : Je suis tombé amoureux de la photographie en 1998, lorsque j’ai déménagé à New York. J’y avais commencé des études de design, mais durant la première année, nous avions un cours de photos, avec un accès à une chambre noire. J’ai tout de suite su que mon avenir était tracé, et je ne l’ai jamais regretté.

Quel type de photographie pratiques-tu ?

Je dirais que j’ai un faible pour la photographie documentaire, au sens large du thème. En fait, c’est la représentation des sujets qui m’intéresse, c’est un véritable challenge. Que mes photos parlent d’environnement, de culture ou de style, je mets un point d’honneur à être créatif, à explorer différents sujets pour voir où ils me mènent.

C’est comme ça que tu as commencé California Winter ?

Oui, j’ai commencé ce projet sans concept particulier. J’ai du mal à pas prévoir les choses, car notre monde est beaucoup trop chaotique et complexe pour être appréhendé. Pour cette série, j’ai voulu mettre en avant les parts d’ombres et de lumières de notre existence. C’est quelque chose que je pouvais facilement mettre en relation avec ce California winter.

Qu’est-ce que c’est, d’ailleurs, cet hiver californien ?

C’est un phénomène que j’ai pu observer dès mon arrivée en Californie, en 2012. Tous les ans, des communautés de voyageurs s’arrêtent à San Diego pour passer l’hiver. Ce sont des nomades, qui se dirigent vers le sud des États-Unis, pour fuir le froid du nord du pays, et du Canada. Je pense que beaucoup de personnes voient ma série comme une étude sur des sans-abri. Pourtant, ces gens seraient offensés s’ils savaient qu’on les perçoit ainsi. Ce sont simplement des hommes, qui arpentent le monde, en emportant leur « chez eux » avec eux.

© John Francis Peters

C’était compliqué de faire honneur à leur histoire ?

C’était un travail de longue haleine. J’ai commencé à collectionner des séries de portraits, de paysages, de natures mortes et même d’entretiens avec ces voyageurs. J’ai fait des recherches sur leur passé, et sur l’environnement de San Diego, pour me mettre dans leur peau. C’est une communauté riche, composée aussi bien d’habitués des routes et de jeunes explorateurs, découvrant l’Amérique avant de retourner dans la « réalité ». Des gens qui sont là par choix, et des personnes qui fuient un quotidien trop douloureux. Tous ces récits d’exodes sont universels, et s’appliquent à la communauté, comme au pays entier.

Tu te sentais proche de cette communauté ?

Absolument. Depuis tout petit, je voyage d’un bout à l’autre du pays. Ma famille a beaucoup déménagé, et ces changements m’ont poussé à explorer mon environnement, à découvrir des cultures lointaines, pour mieux comprendre le monde. La découverte est primordiale pour percer les « bulles » dans lesquelles les gens vivent. Apprendre à connaître ces gens a renforcé mon besoin de voyager.

Cette série a-t-elle engendré de nouveaux projets ?

J’espère pouvoir faire de California Winter un livre. Ce format me permettrait de mettre en avant les histoires incroyables de ces nomades. Ce sont des gens courageux, qui essaient de vivre et d’être heureux, en dépit d’un monde qui ne leur convient pas. Cette façon de vivre pourrait remplir des pages et des pages !

© John Francis Peters

© John Francis Peters

© John Francis Peters© John Francis Peters
© John Francis Peters© John Francis Peters
© John Francis Peters© John Francis Peters

© John Francis Peters© John Francis Peters

© John Francis Peters

Explorez
Les coups de cœur #568 : Bastien Bilheux et Thao-Ly
© Bastien Bilheux
Les coups de cœur #568 : Bastien Bilheux et Thao-Ly
Bastien Bilheux et Thao-Ly, nos coups de cœur de la semaine, vous plongent dans deux récits différents qui ont en commun un aspect...
08 décembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Dörte Eißfeldt, lauréate du prix Viviane Esders 2025
© Dörte Eißfeldt
Dörte Eißfeldt, lauréate du prix Viviane Esders 2025
Dörte Eißfeldt reçoit le prix Viviane Esders 2025 pour une œuvre qui repousse les frontières du médium, alliant rigueur conceptuelle et...
06 décembre 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Bellissima : la fabrique des apparences par Carla Rossi
© Carla Rossi
Bellissima : la fabrique des apparences par Carla Rossi
Dans son ouvrage Bellissima, publié par Art Paper Editions, Carla Rossi explore les désirs, les façades et les codes qui façonnent la...
03 décembre 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
5 événements photo à découvrir ce week-end
Rikka, la petite Balinaise, Fernand Nathan, Paris, 1956 © Dominique Darbois, Françoise Denoyelle.
5 événements photo à découvrir ce week-end
Ça y est, le week-end est là. Si vous prévoyez une sortie culturelle, mais ne savez pas encore où aller, voici cinq événements...
29 novembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Cloud Dancer : 7 séries photo qui arborent la couleur Pantone 2026
© Damien Krisl
Cloud Dancer : 7 séries photo qui arborent la couleur Pantone 2026
Chaque mois de décembre, Pantone dévoile sa couleur pour l’année suivante. Pour 2026, il s’agira de « Cloud Dancer », à savoir une nuance...
Il y a 3 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Extrême Hôtel : voyage dans l’œuvre intime et colorée de Raymond Depardon
Italie, Sicile, Taormine, 1981 © Raymond Depardon / Magnum Photos
Extrême Hôtel : voyage dans l’œuvre intime et colorée de Raymond Depardon
Après huit mois de travaux pour rénovation, le Pavillon populaire de Montpellier rouvre ses portes. À cette occasion, le musée...
Il y a 8 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Twist : les basculements du regard de Grade Solomon
© Grade Solomon
Twist : les basculements du regard de Grade Solomon
Grâce à l'impression risographie, Grade Solomon raconte les formes de vie et les états d’âme dans ce qu’ils ont de familier et de...
09 décembre 2025   •  
Écrit par Milena III
La sélection Instagram #536 : perceptions altérées
© Melchior Dias Santos / Instagram
La sélection Instagram #536 : perceptions altérées
Les artistes de notre sélection Instagram de la semaine s’amusent à déformer leurs images. Ils et elles jouent avec le flou, la...
09 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger