Faisons l’amour, pas la guerre

14 décembre 2022   •  
Écrit par Anaïs Viand
Faisons l’amour, pas la guerre

Sujets insolites ou tendances, faites un break avec notre curiosité. Quand les tenues de camouflage s’illuminent d’une nuance de rose choquante, c’est une alerte. Dans Show of force, le photographe David Degner questionne la présence des militaires et forces de l’ordre dans l’espace public. 

« Les armes à feu sont efficaces même si elles ne sont pas utilisées ». Inutile d’être un·e expert·e pour confirmer le propos de David Degner, un photographe installé à New York. Un soldat peut contrôler une population de sa simple présence. Droit dans son uniforme, l’arme au bras, un regard ou un déplacement agressifs suffisent à rassurer les un·e·s et effrayer les autres. Ouvrir le débat. Tel est l’objectif du photographe qui a travaillé au Moyen-Orient, et notamment en Égypte, durant dix ans. Il a vécu quelques révolutions depuis l’intérieur. « Je me souviens des premiers jours sur place…Cela me faisait bizarre de voir des soldats et des chars dans les rues, et puis un mois plus tard, tout cela était devenu très normal. Ils se fondaient dans la masse ». Sans vivre de tels conflits, le constat est là : la démonstration de force ne choque plus, ou du moins est rentrée dans le quotidien des citadins. Dans les couloirs de métro, les gares ou encore en pleine rue, une instance suprême veille sur nous. Dans son ouvrageVilles sous contrôle, Stephen Graham explique que l’une des caractéristiques remarquables de l’espace urbain contemporain est son intersection croissante avec l’espace militaire : en même temps que des pratiques ouvertement militaires s’exportent dans les villes, la nécessité de livrer bataille en milieu urbain remodèle les stratégies guerrières. Et dans cet espace de vulnérabilité, de nouveaux outils de surveillance et armes apparaissent et brouillent « dangereusement les frontières juridiques et opérationnelles qui séparent la police, le renseignement, et l’armée, la guerre et la paix, les opérations locales, nationales et internationales ».

© David Degner© David Degner

Désarmer le débat

Non, les images de David n’ont pas été réalisées durant une campagne de sensibilisation contre le cancer du sein, et il s’agit encore moins d’un coup de communication lancée par l’entreprise Mattel pour faire la promotion d’une nouvelle Barbie. Et oui, le travail de Richard Mosse en République Démocratique du Congo a largement influencé David Degner. « Il a réussi à mettre en lumière une guerre souvent ignorée. Ses choix esthétiques ont soulevé d’autres questions en moi. Alors que les manifestations Black Lives Matter ont éclaté à la suite du meurtre de Georges Floyd, et que la police et l’armée ont été appelées, j’ai choisi de témoigner de la militarisation de nos villes. J’ai imité les films de surveillance spéciaux utilisés par les militaires au milieu du siècle dernier. Les pellicules avaient une coloration rose pour délimiter la végétation de la non-végétation ». Il ne s’agit pas ici de déceler l’ennemi planqué dans la jungle, mais de mettre le curseur sur la performance des forces militaires dans les villes américaines. De questionner cette présence anormale, bref, de désarmer le débat. « Les armes sont parfois nécessaires, mais il ne faut pas les glorifier ni s’en satisfaire », conclut l’auteur.

© David Degner© David Degner

© David Degner© David Degner

© David Degner© David Degner

© David Degner

© David Degner

Explorez
Mode et séduction : Austn Fischer allie art et Tinder
© Austn Fischer
Mode et séduction : Austn Fischer allie art et Tinder
Installé à Londres, Austn Fischer puise dans les ressorts de la communauté LGBTQIA+ pour interroger les notions traditionnelles de genre....
21 novembre 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Eleana Konstantellos : faire vrai pour voir le faux
Chupacabras © Eleana Konstantellos
Eleana Konstantellos : faire vrai pour voir le faux
Eleana Konstantellos développe, depuis 2019, de nombreux projets photographiques mêlant mise en scène et recherche...
19 novembre 2024   •  
Écrit par Hugo Mangin
La sélection Instagram #481 : par ici la monnaie
© Suzy Holak / Instagram
La sélection Instagram #481 : par ici la monnaie
Est-ce un vice de vouloir posséder de l’argent et des biens ? Bijoux ou billets de banque, tout élément tape-à-l’œil attire le regard des...
19 novembre 2024   •  
Écrit par Marie Baranger
Les images de la semaine du 11.11.24 au 17.11.24 : la politique dans le viseur
L’ancien président Donald Trump avec ses fils, des membres du parti et des supporter·ices lors de la convention nationale républicaine à Milwaukee, dans le Wisconsin, le 15 juillet 2024 © Joseph Rushmore.
Les images de la semaine du 11.11.24 au 17.11.24 : la politique dans le viseur
C’est l’heure du récap ! La politique et les questions sociétales sont au cœur de cette nouvelle semaine de novembre.
17 novembre 2024   •  
Écrit par Marie Baranger
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Marie Le Gall : photographier un Maroc intime
© Marie Le Gall
Marie Le Gall : photographier un Maroc intime
Absente depuis vingt ans, lorsque Marie Le Gall retourne enfin au Maroc, elle découvre un territoire aussi étranger que familier....
22 novembre 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Aleksandra Żalińska rend un tendre hommage à sa grand-mère
© Aleksandra Żalińska
Aleksandra Żalińska rend un tendre hommage à sa grand-mère
À travers But please be careful out there, Aleksandra Żalińska photographie sa grand-mère, avec qui elle entretient une grande...
22 novembre 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Mode et séduction : Austn Fischer allie art et Tinder
© Austn Fischer
Mode et séduction : Austn Fischer allie art et Tinder
Installé à Londres, Austn Fischer puise dans les ressorts de la communauté LGBTQIA+ pour interroger les notions traditionnelles de genre....
21 novembre 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Elie Monferier : visible à la foi
© Elie Monferier
Elie Monferier : visible à la foi
À travers Sanctuaire – troisième chapitre d’un projet au long cours – Elie Monferier révèle, dans un noir et blanc pictorialiste...
21 novembre 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas