Farewell Cape Town : un territoire fait de contrastes

01 avril 2019   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Farewell Cape Town : un territoire fait de contrastes

Le photographe français Benjamin Hoffman a arpenté, durant cinq mois, la ville du Cap, en Afrique du Sud. De retour de son périple, il réalise Farewell Cape Town. Une série tout en contraste, à découvrir dans un ouvrage paru aux Éditions de Juillet.

« Avant même de devenir photographe, j’avais envie de l’être, de raconter des histoires en images »,

confie Benjamin Hoffman, 33 ans. Fils d’un agent littéraire, l’auteur a grandi au milieu des livres, et demeure fasciné par l’ouvrage photographique. « Il s’agit d’un objet très beau, dont j’aime la pérennité », précise-t-il. S’il a débuté sa carrière en réalisant des commandes pour la presse, le photographe s’est rapidement lassé de ce format, préférant se diriger vers une narration plus personnelle, qu’il pourra mettre en page. Ses sujets de prédilection ? « La culture en mutation et la migration », déclare-t-il. Des thèmes complexes qu’il prend le temps d’étudier. « Je passe toujours par une phase de compréhension du sujet, durant laquelle je ne réalise pas forcément d’images, explique le photographe. Pendant ce temps, je m’interroge : pourquoi est-ce que je ressens le besoin de documenter cette histoire ? Et comment la raconter ? »

Benjamin Hoffman se retrouve pour la première fois en Afrique du Sud par hasard. « J’étais en reportage au Mozambique, et je couvrais un sujet difficile, sur l’exploitation et les multinationales, raconte-t-il. Je travaillais avec une journaliste, et nous nous sommes fait prendre. Nous avons dû nous enfuir en prenant le premier billet disponible, qui nous a amenés en Afrique du Sud. » Une découverte intense, qui marque profondément l’auteur.

© Benjamin Hoffman© Benjamin Hoffman

 Un endroit qui n’existe nulle part ailleurs

Il y a trois ans, le photographe s’est rendu au Cap. Un voyage de cinq mois qui le trouble et l’inspire. « J’ai eu l’impression d’arriver en France trente ans après la Révolution française, se souvient-il. J’étais face à un pays tout neuf, encore bouleversé par la fin de l’Apartheid. » Un territoire jeune, énergique, mais aussi contrasté et terriblement violent, que Benjamin Hoffman traverse avec une aisance relative. « Là-bas, je n’étais pas considéré comme un Blanc mais comme un Français, j’ai donc pu me faufiler partout », précise-t-il. Au contact des diverses communautés, l’auteur de Farewell Cape Town découvre une ville clivée, peuplée d’hommes essayant tant bien que mal de vivre sur un même territoire, tout en se détestant. « C’est une intensité qui m’a remué, en tant que documentariste, ajoute-t-il. Un endroit fascinant, qui n’existe nulle part ailleurs. »

En shootant à l’iPhone et au noir et blanc, Benjamin Hoffman réalise une série brute et spontanée. Si le monochrome camoufle certains détails que la couleur aurait révélés, il apporte une homogénéité certaine à l’œuvre. Chaque cliché est encadré, grâce à une application chère au photographe : « Il s’agit d’un filtre, disponible sur iPhone, qui produit des contours de photos uniques et non modifiables. Une part d’incertain qui m’amuse, dans cette ère numérique. » Sombre et dramatique, Farewell Cape Town donne à voir une ville mélancolique, à la fois vibrante et désillusionnée. Un portrait pourtant tendre, animé par l’espoir d’un futur plus optimiste. L’ouvrage s’ouvre sur les textes de Sophie Bouillon, journaliste à la plume poétique, qui raconte l’expérience d’une jeune femme européenne, confrontée à ces contrastes inattendus – une épreuve qu’elle a vécue. « Le livre fait partie de la collection Villes mobiles, des Éditions de Juillet, dans laquelle la parole d’un auteur est associée aux images d’un photographe », précise Benjamin Hoffman. Placés l’un après l’autre, les deux récits se répondent, et érigent une image poignante du Cap, sublime et violente.

 

Farewell Cape Town, Les Éditions de Juillet, 25 €, 76 pages, disponible en pré-commande

© Benjamin Hoffman© Benjamin Hoffman
© Benjamin Hoffman© Benjamin Hoffman
© Benjamin Hoffman© Benjamin Hoffman

© Benjamin Hoffman

© Benjamin Hoffman

Explorez
Raï de Boris Bincoletto : oublier quelqu'un pour retrouver les autres
© Boris Binceletto
Raï de Boris Bincoletto : oublier quelqu’un pour retrouver les autres
Après Solemar, son premier livre photographique qui explorait la côte Adriatique, Boris Binceletto sort Raï, qui se situe entre la...
17 décembre 2024   •  
Écrit par Hugo Mangin
Motel 42 : Eloïse Labarbe-Lafon peint le décor d’un road trip
© Eloïse Labarbe-Lafon
Motel 42 : Eloïse Labarbe-Lafon peint le décor d’un road trip
Composé d’une quarantaine de portraits pris dans des chambres durant un road trip, Motel 42 d’Eloïse Labarbe-Lafon s’impose comme un...
06 décembre 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Marie Le Gall : photographier un Maroc intime
© Marie Le Gall
Marie Le Gall : photographier un Maroc intime
Absente depuis vingt ans, lorsque Marie Le Gall retourne enfin au Maroc, elle découvre un territoire aussi étranger que familier....
22 novembre 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Visions d'Amérique latine : la séance de rattrapage Focus !
© Alex Turner
Visions d’Amérique latine : la séance de rattrapage Focus !
Des luttes engagées des catcheuses mexicaines aux cicatrices de l’impérialisme au Guatemala en passant par une folle chronique de...
20 novembre 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Les images de la semaine du 16.12.24 au 22.12.24 : une multitude de dialogues
© Rebecca Najdowski
Les images de la semaine du 16.12.24 au 22.12.24 : une multitude de dialogues
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les pages de Fisheye dévoilent une multitude de dialogues initiés par la photographie.
Il y a 9 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
The Color of Money and Trees: portraits de l'Amérique désaxée
©Tony Dočekal. Chad on Skid Row
The Color of Money and Trees: portraits de l’Amérique désaxée
Livre magistral de Tony Dočekal, The Color of Money and Trees aborde les marginalités américaines. Entre le Minnesota et la Californie...
21 décembre 2024   •  
Écrit par Hugo Mangin
Paysages mouvants : la jeune création investit le Jeu de Paume
© Prune Phi
Paysages mouvants : la jeune création investit le Jeu de Paume
Du 7 février au 23 mars 2025, le Jeu de Paume accueille le festival Paysages mouvants, un temps de réflexion et de découverte dédié à la...
20 décembre 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Mirko Ostuni : une adolescence dans les Pouilles
© Mirko Ostuni, Onde Sommerse.
Mirko Ostuni : une adolescence dans les Pouilles
Dans Onde Sommerse, Mirko Ostuni dresse le portrait de sa propre génération se mouvant au cœur des Pouilles. Cette jeunesse tendre et...
20 décembre 2024   •  
Écrit par Marie Baranger