Le photographe français Benjamin Hoffman a arpenté, durant cinq mois, la ville du Cap, en Afrique du Sud. De retour de son périple, il réalise Farewell Cape Town. Une série tout en contraste, à découvrir dans un ouvrage paru aux Éditions de Juillet.
« Avant même de devenir photographe, j’avais envie de l’être, de raconter des histoires en images »,
confie Benjamin Hoffman, 33 ans. Fils d’un agent littéraire, l’auteur a grandi au milieu des livres, et demeure fasciné par l’ouvrage photographique. « Il s’agit d’un objet très beau, dont j’aime la pérennité », précise-t-il. S’il a débuté sa carrière en réalisant des commandes pour la presse, le photographe s’est rapidement lassé de ce format, préférant se diriger vers une narration plus personnelle, qu’il pourra mettre en page. Ses sujets de prédilection ? « La culture en mutation et la migration », déclare-t-il. Des thèmes complexes qu’il prend le temps d’étudier. « Je passe toujours par une phase de compréhension du sujet, durant laquelle je ne réalise pas forcément d’images, explique le photographe. Pendant ce temps, je m’interroge : pourquoi est-ce que je ressens le besoin de documenter cette histoire ? Et comment la raconter ? »
Benjamin Hoffman se retrouve pour la première fois en Afrique du Sud par hasard. « J’étais en reportage au Mozambique, et je couvrais un sujet difficile, sur l’exploitation et les multinationales, raconte-t-il. Je travaillais avec une journaliste, et nous nous sommes fait prendre. Nous avons dû nous enfuir en prenant le premier billet disponible, qui nous a amenés en Afrique du Sud. » Une découverte intense, qui marque profondément l’auteur.
Un endroit qui n’existe nulle part ailleurs
Il y a trois ans, le photographe s’est rendu au Cap. Un voyage de cinq mois qui le trouble et l’inspire. « J’ai eu l’impression d’arriver en France trente ans après la Révolution française, se souvient-il. J’étais face à un pays tout neuf, encore bouleversé par la fin de l’Apartheid. » Un territoire jeune, énergique, mais aussi contrasté et terriblement violent, que Benjamin Hoffman traverse avec une aisance relative. « Là-bas, je n’étais pas considéré comme un Blanc mais comme un Français, j’ai donc pu me faufiler partout », précise-t-il. Au contact des diverses communautés, l’auteur de Farewell Cape Town découvre une ville clivée, peuplée d’hommes essayant tant bien que mal de vivre sur un même territoire, tout en se détestant. « C’est une intensité qui m’a remué, en tant que documentariste, ajoute-t-il. Un endroit fascinant, qui n’existe nulle part ailleurs. »
En shootant à l’iPhone et au noir et blanc, Benjamin Hoffman réalise une série brute et spontanée. Si le monochrome camoufle certains détails que la couleur aurait révélés, il apporte une homogénéité certaine à l’œuvre. Chaque cliché est encadré, grâce à une application chère au photographe : « Il s’agit d’un filtre, disponible sur iPhone, qui produit des contours de photos uniques et non modifiables. Une part d’incertain qui m’amuse, dans cette ère numérique. » Sombre et dramatique, Farewell Cape Town donne à voir une ville mélancolique, à la fois vibrante et désillusionnée. Un portrait pourtant tendre, animé par l’espoir d’un futur plus optimiste. L’ouvrage s’ouvre sur les textes de Sophie Bouillon, journaliste à la plume poétique, qui raconte l’expérience d’une jeune femme européenne, confrontée à ces contrastes inattendus – une épreuve qu’elle a vécue. « Le livre fait partie de la collection Villes mobiles, des Éditions de Juillet, dans laquelle la parole d’un auteur est associée aux images d’un photographe », précise Benjamin Hoffman. Placés l’un après l’autre, les deux récits se répondent, et érigent une image poignante du Cap, sublime et violente.
Farewell Cape Town, Les Éditions de Juillet, 25 €, 76 pages, disponible en pré-commande
© Benjamin Hoffman