Du 16 octobre au 30 novembre 2025, la Fisheye Gallery présente Deuil blanc, de Flore Prébay, dans le cadre des Rencontres photographiques du 10e et de la Biennale de l’Image Tangible. Ce travail plastique est une réponse artistique à la disparition progressive de la mère de l’autrice, atteinte de la maladie de Charcot.
Dans Deuil blanc, série réalisée par Flore Prébay, l’on navigue de la fragilité du papier jusqu’à la délicatesse des teintes de bleu glacé et de terre chaude rehaussées à l’aquarelle. Un travail qui se veut être le témoignage intime des sentiments de l’artiste face à l’annonce de la maladie de sa mère. Avec une sensibilité tangible, ce projet explore l’expérience de ce « deuil qui vient avant le deuil ». Dans les panoramas perdus d’Islande qu’elle saisit lors de son voyage introspectif, elle retrouve le portrait de sa mère. « Initialement, je devais me rendre en Islande avec elle, mais les symptômes ont évolué trop vite, confie Flore Prébay. J’y suis donc allée en van avec une amie. » Là-bas, sans le conscientiser tout de suite, l’artiste fait des paysages « une métaphore du cerveau malade qui dégénère, une analogie du temps qui passe et qu’on ne peut pas contrôler ». La lente disparition de sa mère se dessine alors avec pudeur. « De retour à Paris, j’ai compris que c’était ainsi que je devais la présenter, à travers mes sentiments, sans la montrer de manière frontale, précise-t-elle. Et l’Islande, entre ses volcans, ses glaciers, sa terre brûlée et sa verdure luxuriante, résonnait avec mon chaos intérieur. »
Une œuvre évolutive et unique
Pour donner corps à la disparition progressive de sa mère, Flore Prébay s’appuie sur des tirages uniques, réalisés sur des papiers artisanaux conçus par son oncle. « Il y a quelque temps, il m’avait offert une pochette avec plusieurs de ses fabrications. Je la gardais dans un coin, la réservant pour un projet spécial. Après mon voyage, j’ai retrouvé ce trésor qui contenait des feuilles noires et marrons me faisant penser à la roche. Elles répondaient parfaitement aux paysages d’Islande et à Deuil blanc », soutient l’artiste. Jouant entre l’image numérique et les papiers texturés, Flore Prébay enrichit ses photographies de touches d’aquarelle. Ces marques fugaces symbolisent l’éphémère et l’effacement, reflétant l’évolution de la maladie. « Chaque impression est sur un papier différent, comme chaque prisme de la démence est différent en fonction des dialogues échangés ou de la journée. J’aime cette idée de démultiplier les sensations et les œuvres », constate-t-elle. La feuille, une extension de ses images et non simplement le support, compose également son livre d’artiste. Celui-ci est entré dans la collection de la BnF en édition limitée. Aujourd’hui, Flore Prébay espère que son travail en hommage à sa mère contribuera également à faire avancer la recherche sur la maladie de Charcot, citant aussi l’engagement d’Olivier Goy, cofondateur de la Fondation photo4food et de l’association Les Invincibles, atteint lui aussi de cette maladie incurable.
À partir du 5 novembre, la série Deuil Blanc entrera en dialogue avec les photographies encapsulées dans de la glace de l’artiste Frédéric Froument.