Flore Prébay : De deuil et de papier

09 octobre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Flore Prébay : De deuil et de papier
Iceberg, de la série Deuil blanc © Flore Prébay
Une femme en robe bleue marche sur une plage
Éphémère, de la série Deuil blanc © Flore Prébay

Du 16 octobre au 30 novembre 2025, la Fisheye Gallery présente Deuil blanc, de Flore Prébay, dans le cadre des Rencontres photographiques du 10e et de la Biennale de l’Image Tangible. Ce travail plastique est une réponse artistique à la disparition progressive de la mère de l’autrice, atteinte de la maladie de Charcot.

Dans Deuil blanc, série réalisée par Flore Prébay, l’on navigue de la fragilité du papier jusqu’à la délicatesse des teintes de bleu glacé et de terre chaude rehaussées à l’aquarelle. Un travail qui se veut être le témoignage intime des sentiments de l’artiste face à l’annonce de la maladie de sa mère. Avec une sensibilité tangible, ce projet explore l’expérience de ce « deuil qui vient avant le deuil ». Dans les panoramas perdus d’Islande qu’elle saisit lors de son voyage introspectif, elle retrouve le portrait de sa mère. « Initialement, je devais me rendre en Islande avec elle, mais les symptômes ont évolué trop vite, confie Flore Prébay. J’y suis donc allée en van avec une amie. » Là-bas, sans le conscientiser tout de suite, l’artiste fait des paysages « une métaphore du cerveau malade qui dégénère, une analogie du temps qui passe et qu’on ne peut pas contrôler ». La lente disparition de sa mère se dessine alors avec pudeur. « De retour à Paris, j’ai compris que c’était ainsi que je devais la présenter, à travers mes sentiments, sans la montrer de manière frontale, précise-t-elle. Et l’Islande, entre ses volcans, ses glaciers, sa terre brûlée et sa verdure luxuriante, résonnait avec mon chaos intérieur. »

Une personne dans un paysage de terre
Multivers, de la série Deuil blanc © Flore Prébay
un glacier
Glacier, de la série Deuil blanc © Flore Prébay

Une œuvre évolutive et unique

Pour donner corps à la disparition progressive de sa mère, Flore Prébay s’appuie sur des tirages uniques, réalisés sur des papiers artisanaux conçus par son oncle. « Il y a quelque temps, il m’avait offert une pochette avec plusieurs de ses fabrications. Je la gardais dans un coin, la réservant pour un projet spécial. Après mon voyage, j’ai retrouvé ce trésor qui contenait des feuilles noires et marrons me faisant penser à la roche. Elles répondaient parfaitement aux paysages d’Islande et à Deuil blanc », soutient l’artiste. Jouant entre l’image numérique et les papiers texturés, Flore Prébay enrichit ses photographies de touches d’aquarelle. Ces marques fugaces symbolisent l’éphémère et l’effacement, reflétant l’évolution de la maladie. « Chaque impression est sur un papier différent, comme chaque prisme de la démence est différent en fonction des dialogues échangés ou de la journée. J’aime cette idée de démultiplier les sensations et les œuvres », constate-t-elle. La feuille, une extension de ses images et non simplement le support, compose également son livre d’artiste. Celui-ci est entré dans la collection de la BnF en édition limitée. Aujourd’hui, Flore Prébay espère que son travail en hommage à sa mère contribuera également à faire avancer la recherche sur la maladie de Charcot, citant aussi l’engagement d’Olivier Goy, cofondateur de la Fondation photo4food et de l’association Les Invincibles, atteint lui aussi de cette maladie incurable.

À partir du 5 novembre, la série Deuil Blanc entrera en dialogue avec les photographies encapsulées dans de la glace de l’artiste Frédéric Froument.

À lire aussi
Le Prix Picto de la Photographie de Mode 2024 dévoile son palmarès !
© Yama Ndiaye
Le Prix Picto de la Photographie de Mode 2024 dévoile son palmarès !
Il y a tout juste un mois, le jury du Prix Picto de la Photographie de Mode se réunissait au Palais Galliera pour décerner un prix et…
05 juin 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Illusions : la dysmorphophobie dans l’univers de la mode
Illusions : la dysmorphophobie dans l’univers de la mode
La photographe française diplômée de l’École de Condé, Flore Prebay a fait le choix de se…
31 juillet 2023   •  
Écrit par Anaïs Viand

Explorez
Kincső Bede : Déshéritée
© Kincső Bede
Kincső Bede : Déshéritée
Dans son livre Porcelain and Wool, Kincső Bede se réapproprie son identité transverse par des objets, des lieux et des tissus de la...
04 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Mouche Books édite son premier livre photo-poésie Selfportraits
© Lena Kunz
Mouche Books édite son premier livre photo-poésie Selfportraits
La revue Mouche, qui fait dialoguer le 8e art avec la poésie depuis quatre ans, lance sa maison d’édition Mouche Books avec comme premier...
27 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Corps, catch et injonctions : la séance de rattrapage Focus
©Théo Saffroy / Courtesy of Point Éphémère
Corps, catch et injonctions : la séance de rattrapage Focus
Les photographes des épisodes de Focus sélectionnés ici révèlent les corps et dénoncent les injonctions que nous leur collons. Ils et...
26 novembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Dans l’œil de Naïma Lecomte : rendez-vous au bord de l’eau après les cours
© Naïma Lecomte / Planches Contact Festival
Dans l’œil de Naïma Lecomte : rendez-vous au bord de l’eau après les cours
Cette semaine, nous vous plongeons dans l’œil de Naïma Lecomte. Jusqu’au 4 janvier 2026, l’artiste présente Ce qui borde à Planches...
24 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Les coups de cœur #568 : Bastien Bilheux et Thao-Ly
© Bastien Bilheux
Les coups de cœur #568 : Bastien Bilheux et Thao-Ly
Bastien Bilheux et Thao-Ly, nos coups de cœur de la semaine, vous plongent dans deux récits différents qui ont en commun un aspect...
08 décembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les images de la semaine du 1er décembre 2025 : surface et profondeur
© Carla Rossi
Les images de la semaine du 1er décembre 2025 : surface et profondeur
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les photographes publiés sur les pages de Fisheye s’intéressent autant à la surface qu’à la...
07 décembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Dörte Eißfeldt, lauréate du prix Viviane Esders 2025
© Dörte Eißfeldt
Dörte Eißfeldt, lauréate du prix Viviane Esders 2025
Dörte Eißfeldt reçoit le prix Viviane Esders 2025 pour une œuvre qui repousse les frontières du médium, alliant rigueur conceptuelle et...
06 décembre 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
3 livres à offrir à Noël : réel, fiction et mode
Dior par Yuriko Takagi © Yuriko Takagi
3 livres à offrir à Noël : réel, fiction et mode
Noël approche. À cette occasion, la rédaction de Fisheye vous concocte des sélections de ses livres photo préférés, que vous...
05 décembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine