Natalie Maximova

17 mai 2016   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Natalie Maximova
Avec sa série “Hyperborea”, Natalie Maximova, une photographe russe de 29 ans, revient sur la terre des Dieux, un lieu qu’elle tient secret même si l’on sait qu’il se situe quelque part dans le Grand Nord. Attentive aux minéraux, elle nous transporte dans une mythologie grecque plus actuelle qu’on pourrait le penser, dévoilant une nature puissante et belle au point de s’agenouiller devant elle.

Fisheye Magazine : D’où t’est venue l’idée de cette série ?

Natalie Maximova : J’ai toujours voulu voir ce qui se passait dans le Grand Nord. J’y suis d’abord allée spontanément pour mon projet No Man’s Land en me concentrant sur l’état actuel des territoires. Ce travail m’a conduit à une perception plus personnelle du paysage et de sa mélancolie. J’ai été profondément impressionnée par la nature puissante et unique. Cela m’a donné un élément de recherche plus profond : l’Histoire. J’y ai découvert le mythe grec au sujet de la terre utopique d’Hyperborée, située quelque part dans le Grand Nord. Elle représentait la terre parfaite, celle où vivaient les Titans et les Dieux. Un peu comme Utopia, qui n’a jamais été trouvée. J’ai pris cette légende comme référence pour mon projet. Je l’ai connecté à un contexte historique du lieu et associé aux idées de Nietzsche et de l’Übermensch, ou de l’Overman, autrement dit à l’idée du « Surhomme ».

© Natalie Maximova
© Natalie Maximova

Dans la description de ton travail, tu parles pourtant d’un « symbole de la puissance inhumaine ». Qu’entends-tu par là ?

Il pourrait être, par exemple, la nature. Ici, le paysage devient lui-même un symbole de quelque chose qui se situe bien au-delà de l’être humain, il témoigne de la nature primitive de l’homme, de son incapacité à s’élever lui-même. C’est ça, le symbole de la puissance inhumaine. J’en parle dans la description de mon travail, que je considère comme une partie importante à la compréhension de l’ensemble de la série. Elle donne quelques indices à suivre, mais ne précise cependant pas que chacun peut en tirer ses propres interprétations et c’est plutôt le cas.

Que représente l’homme en uniforme militaire ?

Il représente toute personne qui fait une tentative d’entrer dans cet univers sacré. Mes personnages sont condamnés à se distancer du paysage, représentation d’un lieu inaccessible. Là, l’uniforme militaire apporte sa fonction principale : le camouflage. Il reflète la volonté de se fondre dans le paysage ou de se rapprocher de lui. Cela me rappelle le mythe du « Trickster » (l’arnaqueur en français). Ce sont des chiffres qui apparaissent dans de nombreuses cultures comme le croisement des frontières.

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© Natalie Maximova
© Natalie Maximova
© Natalie Maximova

Dans cette série, la pierre semble avoir une place importante. Pourquoi ?

La pierre ou la montagne ont une signification symbolique très forte dans la mythologie. Elles sont les sujets de nombreuses légendes, considérées comme le centre de l’univers sacré. Chez les Grecs, la montagne est une maison pour les Dieux, un lieu d’amour éternel, ainsi qu’un lieu de sépulture pour les héros tombés. Les Hyperboréens, eux, croyaient vivre au-delà de ces blocs de pierre. En tant que matière, elle représente la froideur, la dureté et l’immortalité. Elle garde des traces de l’Histoire incomparablement plus vieilles que l’humanité elle-même.

© Natalie Maximova
© Natalie Maximova

Qu’est-ce qui t’a attiré dans ces déserts de pierre et d’eau ?

Je suppose que je me sens plus consciente et vivante dans ce genre d’endroits, loin de toute distraction inutile. Le temps ralentit en quelque sorte et je peux voir plus loin. Cela m’aide à me vider la tête et à me concentrer sur des choses plus importantes.

Si tu devais sélectionner une photo dans ta série, laquelle choisirais-tu ?

Il est difficile de choisir quelque chose séparément de la série. En général, je ne préfère aucune de mes photographies. Elles sont simplement un moment de silence après.

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