Singularité japonaise

Singularité japonaise

Dans son premier livreSnake Legs 蛇足, Max Zerrahn s’inspire d’un proverbe ancestral pour illustrer le Japon de manière paisible et silencieuse. Entre banalités et poésie du quotidien, le photographe berlinois signe une monographie envoûtante où la redondance devient fascinante.

« Un ami avec qui j’avais prévu d’aller au Japon ne pouvait plus faire le voyage. J’ai fini par m’y rendre seul, errant avec un unique but : prendre des photos. Le décalage horaire et la langue me laissaient désorienté. Jour après jour, je quittais l’hôtel à quatre ou cinq heures du matin, incapable de me rendormir, pour explorer ce nouveau territoire. Et j’ai adoré. », raconte Max Zerrahn. À son retour à Berlin, le photographe allemand passe au crible les centaines d’images capturées. Conquis par ces dernières, il décide de visiter à nouveau le pays du Soleil levant avec un objectif précis. « Cette fois-ci, j’avais une idée claire de ce que je cherchais. Le processus de prise de vues a été directement ciblé et orienté vers le projet », explique l’artiste. C’est ainsi que naît son premier ouvrage, Snake Legs 蛇足. 

© Max Zerrahn© Max Zerrahn

Aux antipodes de la frénésie japonaise

En dévorant des magazines de skate et des pochettes d’album durant l’adolescence, Max Zerrahn se passionne pour la photographie. Inspiré par différentes disciplines — musique, cinéma, théâtre, littérature — il ne cesse de chercher de nouvelles idées. Plusieurs années auront été nécessaires pour imaginer sa pratique du 8e art de manière sérieuse et professionnelle. Dans Snake Legs 蛇足, l’artiste associe la lumière naturelle à l’utilisation de téléobjectifs afin « d’observer les choses avec un peu de distance ». Discrets et silencieux, ses visuels diffusent un sentiment de sérénité. « Je me suis éloigné des principales rues et des attractions touristiques pour me rapprocher des zones résidentielles. Je préfère observer la façon dont les gens garent leur vélo, ou dont ils accrochent leur linge, plutôt que les rues commerçantes surpeuplées. » Quant au mélange du noir et blanc et de la couleur, il offre au lecteur une ligne directrice concise et assumée par l’auteur.

Le titre est inspiré du proverbe 蛇足 et signifie jambes de serpent, « Snake Legs » en anglais. La légende japonaise conte l’histoire d’un concours de dessin récompensant celui qui réaliserait le plus rapidement un serpent. Le vaincu aurait perdu trop de temps en ajoutant des jambes à son reptile esquissé… Désormais, le terme désigne une chose redondante et superflue. Dans ce projet, Max Zerrahn partage sa propre interprétation de cette expression. « La plupart des images sont des observations discrètes. C’est de la photographie de rue dans un sens revisité. Des scènes de la vie quotidienne et des petits détails étranges qui passent inaperçus et semblent redondants à certains, poursuit-il. Je n’essaie pas vraiment d’aborder des questions politiques ou sociales importantes. Au contraire, j’interroge une nouvelle façon de regarder et de vivre le monde. » Une déambulation inattendue et harmonieuse.  

 

Snake Legs 蛇足, White Belt Publishing, 26 euros ( 120 euros : livre + tirage 30×40 cm), 144 p.

 

© Max Zerrahn© Max Zerrahn

© Max Zerrahn

© Max Zerrahn© Max Zerrahn

© Max Zerrahn

© Max Zerrahn© Max Zerrahn

© Max Zerrahn

© Max Zerrahn© Max Zerrahn

© Max Zerrahn

© Max Zerrahn© Max Zerrahn

© Max Zerrahn

Explorez
Annissa Durar : une cueillette visuelle de senteurs
The Rose Harvest © Annissa Durar
Annissa Durar : une cueillette visuelle de senteurs
La photographe américano-libyenne Annissa Durar a documenté, avec beaucoup de douceur, la récolte des roses à Kelâat M’Gouna, au sud du...
13 septembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Sous le soleil d'Italie avec Valentina Luraghi
Mediterraneo © Valentina Luraghi
Sous le soleil d’Italie avec Valentina Luraghi
À travers sa série Mediterraneo, Valentina Luraghi nous transporte dans ses souvenirs d’été. Le·la spectateur·ice y découvre le...
29 août 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
La sélection Instagram #519 : évasion infinie
© Giorgia Pastorelli / Instagram
La sélection Instagram #519 : évasion infinie
Liberté. Ce mot résonne avec le clairon de l’été. Les artistes de notre sélection Instagram de la semaine célèbrent la douceur et le...
12 août 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
15 expositions photographiques à découvrir en août 2025
Jill, President Street, Brooklyn, New York, 1968 © Donna Gottschalk, Courtesy de l’artiste et de Marcelle Alix, Paris.
15 expositions photographiques à découvrir en août 2025
L’été est installé, et les vacances enfin arrivées. En parallèle des Rencontres d'Arles et pour occuper les journées chaleureuses ou les...
01 août 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Jet Siemons : combien de temps faudra‑t‑il pour qu’on m’oublie ? 
© Jet Siemons
Jet Siemons : combien de temps faudra‑t‑il pour qu’on m’oublie ? 
Dans Hannie & Billo – The Trail Project, Jet Siemons retrace la trajectoire d’un couple, Hannie et Billo, à partir d’un album photo...
Il y a 1 heure   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Ekaterina Perfilieva et l'intime au cœur de la fracture
© Ekaterina Perfilieva, Nocturnal Animals
Ekaterina Perfilieva et l’intime au cœur de la fracture
À la fois distante et profondément engagée, Ekaterina Perfilieva, artiste multidisciplinaire, interroge une contemporanéité...
17 septembre 2025   •  
Écrit par Milena III
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
© Valérie Belin
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
L’heure des rencontres « 7 à 9 de Chanel » au Jeu de Paume a sonné. En cette rentrée, c’est au tour de Valérie Belin, quatrième invitée...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Ana Corderot
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
© Sara Lepore / Instagram
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
La maison se fait à la fois abri du monde et porte vers le dehors, espace de l’intime et miroir de nos modes de vie. Les artistes de...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot