C’est un propos rare que nous délivre Yumna Al-Arashi, qui considère qu’au Yémen « les femmes qui portent le hijab sont plus libres que les autres ». À 28 ans, la photographe originaire du Yémen, a sillonné pendant deux ans le Nord du pays, de Sanaa (la capitale) à Mahweet. Au centre de ses images, une femme porte fièrement le hijab et souffle le vent de la révolte dans un pays dont on ne parle que « pour évoquer la guerre et la pauvreté, alors que toute ma vie, j’y ai vu un territoire vibrant », explique Yumna.
Si la photographe est née et a grandi aux États-Unis où elle vit toujours, son attachement au pays de la Reine de Saba semble dépasser les frontières de sa propre identité. Dans le chaos politique, économique et social, les photos de Yumna révèlent des paysages d’une grande beauté et nous laissent apercevoir une autre culture du féminisme, héritée du printemps arabe de 2011. Elle est pleine d’espoir et de convictions religieuses, bien qu’aujourd’hui, les choses aient un peu changé…
Le hijab comme un bouclier
« Au Yémen, les femmes sont de vrais ninjas sous leurs habits noirs. Elles sont fortes, puissantes, gracieuses et belles, chefs de leurs maisons, de leurs familles et de leurs terres », raconte Yumna Al-Arashi, Pourtant, le Yémen est l’un des pays qui respecte le moins les droits des femmes selon une étude publiée en 2014 sur l’égalité des sexes. Paradoxe ? « Au contraire », nous dit Yumna Al-Arashi, qui poursuit : « Qu’il s’agisse du voile ou du bikini, peu importe leur garde-robe, ce qui définit l’émancipation des femmes, d’où qu’elles viennent, c’est justement l’aspiration à l’égalité des droits dans tous les domaines. Au Yémen cette aspiration est la plus forte que je n’ai jamais vue. »
Pour la photographe, déjà nommée dans le classement des femmes les plus influentes par le magazine Forbes en 2011, « les gens rejettent souvent l’idée que les femmes musulmanes puissent avoir du pouvoir et une identité simplement parce qu’elles portent le hijab ». Mais Yumna l’assure, « au Yémen, il y a un respect pour elles que nous voyons très rarement dans le monde occidental. Par ce vêtement, elles se mettent à l’abri de tout jugement qui repose sur l’apparence ».
Une autre culture du féminisme
« Je n’ai jamais considéré mon travail comme la continuité d’un autre mais je pense qu’il peut s’inscrire dans une action féministe », nous confie Yumna. Pour elle « le hijab est nécessaire dans certains pays et il m’a aidé à faire mon travail ». Le tout, pour Yumna c’est que « le féminisme supporte les femmes à tous les égards ». Et c’est peut-être dans sa capacité à saisir, tant par les images que par son propos, ce féminisme à l’orientale, que repose tout le travail de Yumna Al-Arashi.
Propos recueillis par Mélany Marfella
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