Take a walk on the dark side : la photographie de Michael Ackerman

20 décembre 2013   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Take a walk on the dark side : la photographie de Michael Ackerman

© Michael Ackerman / VU’

“Ça va me prendre un peu de temps pour me lancer. Je vais m’améliorer avec le temps, ne soyez pas déçus…” Barbe éparse et lunettes cerclées d’acétate épais, Michael Ackerman a parlé. Dans un bar du 10e arrondissement de Paris, debout dans l’ombre face à la tablée de photographes venus assister à son workshop, on l’imagine mal à l’aise. Pas à sa place, trop exposé. Trop devant l’objectif. «Well, euh…», et ça commence.

Depuis 2012, Eyes in Progress organise des workshops, des ateliers photo, et réunit autour d’une même table une dizaine de photographes (“Au-delà de dix, on perd le côté personnel de la rencontre et du travail”, note Véronique Sutra, la fondatrice d’Eyes in Progress), un maître, des élèves, pour trois à quatre jours de discussion et de pratique autour d’un thème choisi. Pour ces journées de fin novembre 2013, l’atelier animé par Michael Ackerman a pour sujet la photo introspective : “Transcender la photographie”. 

Famille frappée par l’exode et les déchirures violentes de l’Holocauste, et émigrée d’Europe de l’Est au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, naissance en Israël en 1967, arrivée à New York sept ans plus tard. De ce passif familial marqué par les déracinements et les fuites en avant, Ackerman conserve toujours sur lui le cliché patiné d’un gamin en costume marin attablé devant un échiquier – son grand-père maternel disparu sans laisser de traces pendant les années de guerre, centre de gravité de son histoire personnelle. Papa depuis peu, le photographe s’est donné le devoir de laisser à sa fille “un souvenir d’où elle vient” sous la forme d’une collection de photos de famille amassées au fil des années.

“C’est cette quête de ce qui a disparu, de ce qui manque, qui m’a poussé vers la photographie : les images me permettent d’exprimer ce que je ne peux exprimer autrement. J’ai beaucoup de mal à me sentir chez moi où que ce soit. Travailler à New York a été parfait en ce sens : la photo me permettait d’entrer dans chaque communauté, puis de faire mien chaque groupe.”

De cette errance aussi maladive que salvatrice, sont nés End Time City (1993-1997), plongée au cœur de Bénarès, Smoke (1997-1998), presque-reportage réalisé dans un quartier populaire d’Atlanta, ou encore Half Life (2001-2010), aventure visuellement brutale entre Allemagne et Pologne sur les talons de ses aïeux.

“Mon père était très indépendant, il était hostile à toute forme d’autorité. J’ai hérité ça de lui : je n’arrive pas à suivre les règles, il faut toujours que je fasse les choses comme je l’entends. C’est probablement la raison pour laquelle je ne suis jamais devenu un photographe normal.” C.T.

 

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