Du 30 août au 14 septembre 2025, Perpignan accueille la 37e édition de Visa pour l’image, le grand rendez-vous international du photojournalisme. Avec 28 expositions et six soirées de projection, le festival met en lumière un journalisme visuel libre, engagé et profondément ancré dans l’actualité du monde. Entre conflits, urgences climatiques et récits de vie, l’événement invite à regarder sans détour ce que d’autres vivent, le tout documenté par celles et ceux qui risquent souvent leur vie pour témoigner.
Alors que le monde vacille sous le poids de conflits, de catastrophes climatiques et de fractures sociales toujours plus profondes, Visa pour l’image maintient son cap : celui de porter la voix des photojournalistes qui, chaque jour, témoignent du réel. Fidèle à son esprit depuis 1989, le festival transforme Perpignan en carrefour mondial de l’information visuelle et offre une vitrine au photojournalisme de terrain, rigoureux, profondément humain et souvent bouleversant. « How many times can a man turn his head, pretending he just doesn’t see? », écrit Pierre Conte, président de l’association organisatrice, en citant le titre Blowin’ in the Wind de Bob Dylan. Et c’est précisément contre cette indifférence et ces trop nombreux yeux fermés sur notre société en crise que Visa pour l’image existe. Cette mission, aussi simple que nécessaire, irriguera les 26 expositions principales, les deux expositions invitées, ainsi que les six soirées de projection au Campo Santo. « Le monde devient fou et toujours plus cruel pour les innocents. Cette actualité déjà effrayante est de plus manipulée, saturée de fake news dopées à une IA encore incontrôlée », poursuit Pierre Conte.
À travers une sélection toujours exigeante, le cofondateur et directeur artistique Jean-François Leroy revendique un journalisme à contre-courant du sensationnalisme, dans un monde qui « tourne encore moins rond que d’habitude ». « Nous maintiendrons notre cap : montrer le meilleur du photojournalisme. Des informations nuancées et vérifiées, provenant du terrain et non des réseaux sociaux », rappelle-t-il, opposant le regard des professionnel·les aux images générées par intelligence artificielle. Et pour ceux qui ne pourront se rendre à Perpignan, la plupart des expositions seront accessibles en ligne, sur réservation, sur le site officiel du festival.
Regards du monde
Chaque année, Visa pour l’image met à l’honneur des regards singuliers qui racontent, chacun à leur manière, les bouleversements de notre époque. Parmi les expositions phares de 2025, cinq photographes se distinguent par la puissance de leur travail et l’urgence de leurs sujets. Lauréat du Visa d’or humanitaire du Comité international de la Croix-Rouge, Saher Alghorra signe un reportage saisissant sur la vie à Gaza entre octobre 2023 et mai 2025. Pendant plus de dix-sept mois, le photographe de Zuma Press a documenté l’enfermement, la peur, mais aussi la résilience d’une population prise dans une offensive d’une violence inédite. Avec ses clichés, ce sont des familles entières qu’il immortalise, oscillant entre survie et dignité. Le festival rend également un hommage poignant à Fatma Hassona, photojournaliste gazaouie tuée en avril 2025 lors d’une attaque ciblée. Son exposition L’œil de Gaza présente un travail réalisé au printemps et à l’été 2024, en collaboration avec la cinéaste Sepideh Farsi. À travers ses photos, c’est un quotidien à la fois banal et tragique qui transparaît, entre ruines et espoir suspendu.
Dans un registre différent, Josh Edelson couvre pour l’AFP, depuis 2025, les incendies dévastateurs qui ravagent la Californie. Ses images retracent une décennie de flammes, entre scènes apocalyptiques et instants d’humanité. Un travail donnant chair à l’urgence climatique. Avec American Madness, Adam Gray explore une autre forme de chaos : celui qui secoue les États-Unis depuis l’assaut du Capitole en janvier 2021. Du cœur de Washington aux frontières du Mexique, son regard révèle une société fracturée, oscillant entre nationalisme exacerbé et désillusions démocratiques. Visa pour l’image est bien plus qu’un rendez-vous culturel. C’est une invitation à ouvrir les yeux, à comprendre et à témoigner. Comme le rappelle Jean-François Leroy : « Longtemps, la principale critique faite au festival était d’être trop sombre, trop violent, trop pessimiste. Nous n’étions, malheureusement, qu’un peu trop en avance sur notre temps. Le monde va mal, et cette fois, ce sont tous les autres qui le disent. Partout. Tout le temps. »