Et pourtant elles photographient, étude d’une résilience féminine

30 juin 2020   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Et pourtant elles photographient, étude d’une résilience féminine

La photographe et sociologue Irène Jonas a réalisé, pour le collectif La part des femmes, une étude sociologique sur le parcours des femmes photographes. Un document nécessaire, révélant des injustices tenaces.

Collectif engagé en faveur de la visibilité et de la reconnaissance des femmes photographes, La part des femmes a commandé, en 2019, une étude sociologique à la sociologue indépendante Irène Jonas. Après avoir démontré l’importance de la souffrance au travail dans une précédente étude sur la santé des photojournalistes, l’auteure, membre de l’Association française de Sociologie, et de l’agence révélateur, se penche cette fois-ci sur le parcours des femmes du 8e art. Une recherche complète, interrogeant l’impact du milieu d’origine, des difficultés rencontrées, de la conciliation famille/travail/création, et des discours sociaux sur la procréation.

25 participantes se sont livrées à Irène Jonas, durant des entretiens d’environ une heure et demi. Âgées de 30 à plus de 60 ans, elles évoquent les doutes, et la détermination nécessaire pour arriver à bout d’un parcours semé d’embûches. Une enquête sociologique révélant les inégalités présentes au sein du métier.

Pointer du doigt les injustices flagrantes

« Loin de moi, l’idée, dans ce rapport, de dire que les hommes photographes ne peuvent pas connaître des freins dans leur carrière, liés à leur origine sociale, ethnique, ou à la transformation de l’organisation du travail »,

déclare la sociologue. Cependant, les souffrances au travail ne se déclinent pas de la même façon en fonction du genre. En parcourant les témoignages récoltés par Irène Jonas, force est de constater que les stéréotypes subsistent : « Les femmes photographes ont des aspirations plus modestes, ne courent pas après le faire de faire carrière et préfèrent garder du temps pour élever leurs enfants. Les femmes photographes manquent de confiance en elles, elles ne sont pas assez agressives pour faire face à la concurrence, et sont moins disponibles pour accepter les déplacements au dernier moment, ou pour participer à des résidences à l’étranger… » énumère-t-elle. Des idées reçues encourageant l’idée que les femmes entretiennent un rapport spécifique avec le travail artistique, et le reportage.

De leurs études, souvent influencées par la pression des parents, aux difficultés à se faire une place dans une société patriarcale, en passant par les propos sexistes, humiliants, et les réticences à embaucher une « future maman », l’étude sociologique pointe du doigt les injustices flagrantes et pourtant toujours ordinaires au sein du milieu photographique. « Et pourtant, elles photographient. Elles y arrivent envers et contre tout, mais à quel prix ! », conclut Irène Jonas. Un bilan douloureux et révélateur.

© Dolores Marat

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