Le voyage photographique de Jonathan Pivovar avec sa grand-mère défunte

11 juillet 2017   •  
Écrit par Anaïs Viand
Le voyage photographique de Jonathan Pivovar avec sa grand-mère défunte

En 2011, alors qu’il était en Irlande pour ses études, Jonathan Pivovar reçoit un colis surprise pour son anniversaire. Il provient de sa famille. Il découvre dans ce paquet un sac contenant les cendres de sa grand-mère défunte. Depuis maintenant 6 ans, il disperse quelques cendres au cours de ses voyages. Il signe avec All the Things I Never Got to Do with My Grandmother, une série surprenante et poignante.

C’est parce que sa grand-mère avait des origines irlandaises que les cendres lui ont été confiées. « L’idée était de répandre les cendres de ma grand-mère dans quelques endroits d’Irlande et de photographier ces lieux », nous raconte Jonathan Pivovar. Plus il avançait dans son projet et plus il se rendait compte qu’un seul pays ne suffirait pas. C’est vers l’Europe tout entière qu’il s’est tourné. Aujourd’hui, il a parcouru plus d’une trentaine de villes. Il a ainsi voyagé dans des endroits que sa grand-mère aurait aimé découvrir et où, physiquement « elle n’aurait pas été capable d’aller ». Il nous avoue avoir été dans « des lieux où [il ne serait] jamais allé de [lui]-même. » La majorité de ses photos ont été effectuées à la chambre noire par des inconnus ou des amis. Il a accepté de perdre le contrôle sur le processus photographique : « Si je réglais l’exposition, ils étaient maîtres de la composition. » Flous non désirés, images sous exposées, il nous révèle avoir une préférence pour les images « paraissant être des ratées

La photographie et ses vertus thérapeutiques

Singulier, déroutant, ce projet est surtout affectif. « Je voulais que ma famille puisse tourner la page, surtout ma mère ». Aujourd’hui, la photographie est devenue un moyen de « développer une relation entre [sa] grand-mère et [lui] ». Car Jonathan Pivovar était proche de sa grand-mère – ils se parlaient au téléphone, se voyaient pendant les vacances – il n’a jamais vraiment eu « l’impression d’avoir construit un réel lien avec elle ». La venue de ce colis a provoqué un déclic : « J’ai senti que c’était le bon moment pour me connecter à elle ».  Jonathan a toujours cru à la preuve par l’image. Plus jeune, il considérait la photo comme un moyen de prouver l’existence de sa réalité : « Parce qu’il y avait une photo, il y avait une preuve que j’y étais et qu’il s’était vraiment passé quelque chose ». Privé de son appareil photo, l’instant lui échappait. Aujourd’hui, il a appris à fabriquer des images pour « créer l’illusion de la preuve ». À travers All the Things I Never Got to Do with My Grandmother, il a pu fournir les preuves d’un souvenir d’ « une relation qui n’existait pas avant. »  

© Jonathan Pivovar

© Jonathan Pivovar
© Jonathan Pivovar
© Jonathan Pivovar

© Jonathan Pivovar © Jonathan Pivovar

Images par © Jonathan Pivovar

Explorez
La sélection Instagram #525 : fragment ou totalité ?
© Michał Bugalski / Instagram
La sélection Instagram #525 : fragment ou totalité ?
L’acte photographique est un geste de découpe : l’image ne retient qu’une portion du réel, délimitée par le cadrage. Elle peut donc être...
23 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Jet Siemons : combien de temps faudra‑t‑il pour qu’on m’oublie ? 
© Jet Siemons
Jet Siemons : combien de temps faudra‑t‑il pour qu’on m’oublie ? 
Dans Hannie & Billo – The Trail Project, Jet Siemons retrace la trajectoire d’un couple, Hannie et Billo, à partir d’un album photo...
18 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
© Valérie Belin
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
L’heure des rencontres « 7 à 9 de Chanel » au Jeu de Paume a sonné. En cette rentrée, c’est au tour de Valérie Belin, quatrième invitée...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Ana Corderot
Couldn’t Care Less de Thomas Lélu et Lee Shulman : un livre à votre image
Couldn't Care Less © Thomas Lélu et Lee Shulman
Couldn’t Care Less de Thomas Lélu et Lee Shulman : un livre à votre image
Sous le soleil arlésien, nous avons rencontré Lee Shulman et Thomas Lélu à l’occasion de la sortie de Couldn’t Care Less. Pour réaliser...
11 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Photoclimat 2025 : la photographie au service de l’environnement
© Juliette-Andréa Élie / Fondation Avril
Photoclimat 2025 : la photographie au service de l’environnement
Jusqu’au 12 octobre 2025, la 3e édition de la biennale Photoclimat prend ses quartiers à Paris. De la place de la Concorde à celle de...
27 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Valentin Derom : photographier le soin dans toute son ambivalence
© Valentin Derom
Valentin Derom : photographier le soin dans toute son ambivalence
Avec Support Systems, Valentin Derom explore les gestes de soin là où on ne les attend pas : dans les étables, aux côtés de son père...
26 septembre 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
L'engagement écologique et la photographie : la séance de rattrapage Focus
© Sophie Alyz
L’engagement écologique et la photographie : la séance de rattrapage Focus
Les photographes des épisodes de Focus sélectionnés ici s’emparent de leur médium pour raconter des récits d’engagement environnemental....
25 septembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Faire de la lenteur une attention : Ils en avaient 16 de Léo d'Oriano
© Léo d'Oriano
Faire de la lenteur une attention : Ils en avaient 16 de Léo d’Oriano
Dans le cadre de la Grande commande pour le photojournalisme de la BNF, Léo d’Oriano a suivi, entre 2021 et 2022. Intitulée Ils en...
25 septembre 2025   •  
Écrit par Fabrice Laroche