Non loin de Bruxelles, en Belgique, se déroule, jusqu’au 17 septembre 2017, une nouvelle manifestation photo. En plein cœur des ruines d’une abbaye du XIIe siècle, le festival Brassage photographique est un projet engagé et ambitieux. Focus sur une première édition dynamique.
Lorsqu’on arrive à Villers-la-Ville
par la route, la surprise et l’émotion s’enchaînent sans transition. Au loin se dressent, imposantes, les ruines magistrales d’une abbaye du XIIe siècle. Nichés dans la région wallonne, ces incroyables vestiges sont pour la première fois l’écrin d’une manifestation dédiée au huitième art, le festival Brassage photographique, lancé le 17 juin. Si son nom se réfère à la tradition belge du brassage de la bière, il renvoie aussi à la notion de diversité, primordiale dans ce cas. Il se déploie en quinze expositions sur les quelque 8 000 mètres carrés du domaine abbatial. Quinze expositions à travers quinze lieux : de la colline qui surplombe le jardin de la Pharmacie au jardin de l’Abbé, jusqu’aux anciens vignobles qui s’élèvent le long d’un escalier de cent marches… la photographie se déploie dans un cadre exceptionnel. L’association entre les tirages grand format exposés en plein air et ce lieu patrimonial crée une émotion d’une rare intensité.
Bastien Duval, 24 ans, est à l’origine de ce projet. Passionné de photographie, il raconte : « J’ai composé ce festival un peu comme un bouquin dont chaque exposition serait un chapitre. » Brassage est construit en trois volets dont les deux premiers sont consacrés au continent africain. L’un souligne les approches poétiques et artistiques de Colin Delfosse (Les Catcheurs de Kinshasa), Maroesjka Lavigne (Land of Nothingness), et Tahir Carl Karmali (Jua Kali, Kenya). Le second met en avant des démarches plus journalistiques de Ruben Salgado Escudero (Solar Portraits in Uganda), Pascal Maitre (Les Baobabs de Madagascar), et Nyani Quarmyne – avec notamment son travail sur le climat réalisé dans le cadre d’une mission pour Médecins sans frontières, partenaire de l’événement.
Présentées dans le chapitre, les images poignantes de Nyani Quarmyne sont issues d’une commande pour Médecins sans Frontières.
Les anciens vignobles de l’abbaye s’élèvent le long d’un escalier de cent marches… Le long duquel sont exposées, entre autres, les photographies tirées de la série Wild Iceland, de Nicola Odemann.
Des énergies nouvelles
Le véritable coup de maître, c’est d’avoir fait en sorte d’exposer des jeunes photographes dans un troisième volet consacré à l’Europe. « Je crois très fort au projet européen. Et j’avais envie de mettre en commun les histoires de plusieurs artistes européens, explique Bastien. En revanche, je n’ai pas réfléchi en termes d’émergents, l’idée c’était vraiment d’amener de la découverte. Car il y a un vrai terreau d’expérimentation du côté de la jeunesse : une souplesse dans le travail, une envie… c’est très intéressant de travailler dans cette nébuleuse-là. » C’est nécessaire aussi. Nicola Odemann, qui expose Wild Iceland, présente sa première exposition aux côtés de Quentin Bruno, Sébastien Van Malleghem, Julie Hascoët, Anna Filipova et Antoine Bruy. « Ce ne sont pas les travaux qu’on va voir le plus souvent, en galerie notamment. Mais c’est justement ce qui m’intéresse », poursuit Bastien.
Pour Pascal Fautré, directeur de l’abbaye, « ce projet s’intègre parfaitement dans le positionnement sociétal de l’abbaye de Villers-la-Ville. » Il souligne l’originalité de cet événement, et surtout, « ce qui est intéressant pour nous, c’est d’offrir l’opportunité à une nouvelle génération de photographes d’exposer sur un site comme celui-là. » Nicola Odemann nous confie sa « grande émotion. C’est très encourageant pour moi, car je n’avais jamais vu mes images de cette façon, ça me motive à progresser ». Il y a de la générosité dans ce festival que Bastien Duval a bâti entre les murs de cette abbaye transformée, le temps d’un été, en cathédrale de la diversité, de la découverte et du partage. À déguster sans modération, avec quelques gorgées de bière.
Credit: © Anna Filipova
À g. : © Anna Filipova ¦ À d. : © Sébastien Van Malleghem
Extrait de la série Congolese Wrestlers. Ce reportage sur les catcheurs de Kinshasa ouvre le parcours du festival © Colin Delfosse
Extrait de Solar Portraits in Uganda, © Rubén Salgado Escudero
© Quentin Bruno
Extraits de la série Murs de l’Atlantique, © Julie Hascoët
Extrait de Land of Nothingness, © Maroesjka Lavigne
Extrait de Wild Iceland, © Nicola Odemann
Extrait de Jua Kali, Kenya, © Tahir Carl Karmali