La ville à travers des jumelles

20 mars 2018   •  
Écrit par Lou Tsatsas
La ville à travers des jumelles

Le photographe Sylvain Bonniol déménage en 2015 au sommet d’un immeuble situé sur l’Île de Nantes, au-dessus d’un chantier en plein émoi. Débute alors le projet R+14, une longue étude de la construction d’un nouvel horizon.

Depuis les débuts de sa carrière de photographe, en 2000, Sylvain Bonniol est fasciné par la perception de l’espace. Rapidement, il sort de son atelier pour s’intéresser aux territoires de constructions, ces lieux –laboratoires, usines, chantiers– où la création donne naissance à de nouveaux édifices. En ce début d’année, il sort d’ailleurs un ouvrage dédié au chantier naval de Saint Nazaire. « Depuis ces théâtres d’opérations, j’essaie de faire émerger des géographies insoupçonnées », explique Sylvain Bonniol. Il recherche avec avidité « le décalage inhérent entre l’image du réel et le réel lui-même », et ces nouveaux espaces invitent l’imaginaire dans ses photos. Une lecture fantasmagorique d’un lieu en pleine transformation.

R+14 est un journal visuel, l’étude appliquée d’un chantier changeant. Les photographies révèlent des détails infimes, dévoilés par la longue focale d’une paire de jumelles. Une contemplation sélective d’un paysage en mutation. « Lorsque j’ai emménagé dans cet appartement, j’y ai vu plus qu’un simple logement », confie l’artiste. « Il s’agissait pour moi d’une sorte de chambre photographique d’où je pouvais observer jour après jour ce morceau de ville ». Depuis son immense baie vitrée, Sylvain Bonniol documente la ville à sa manière. Les clichés sont minimalistes, portés par les lumières urbaines et les dégradés du ciel. Immeubles et machines se mélangent pour former une vision personnelle et poétique, d’un paysage en chantier. « J’y propose un voyage libre d’interprétation, qui laisse entrevoir une dimension plus intime avec le paysage », ajoute-t-il.

© Sylvain Bonniol

Dans l’intimité d’un appartement

Dans R+14, l’intimité est suggérée. Si les jumelles créent des pourtours distinctifs autour de l’image, elles évoquent aussi une certaine proximité avec le photographe. Pour capturer ces clichés, celui-ci utilise l’objectif d’un smartphone, suffisamment petit pour s’immiscer dans le tunnel des jumelles, optant pour un appareil léger, qui lui permet plus de liberté. La série emporte ainsi dans le quotidien de l’artiste. Il semble contempler avec attention le monde urbain s’agitant autour de lui. Le temps, tantôt sombre et menaçant, tantôt pâle et paisible fait défiler les journées au fil des photos, et plonge dans la construction du projet, tout comme celle du chantier. « Je souhaitais réaliser des tirages que l’on puisse tenir dans la main, ou feuilleter dans un livre », rappelle Sylvain Bonniol. Les photographies, bien que de petit format, révèlent des reliefs fascinants sous les verres de lunettes adaptées. Une expérience tout à fait immersive.

© Sylvain Bonniol© Sylvain Bonniol
© Sylvain Bonniol© Sylvain Bonniol

© Sylvain Bonniol

© Sylvain Bonniol© Sylvain Bonniol
© Sylvain Bonniol© Sylvain Bonniol

© Sylvain Bonniol

© Sylvain Bonniol© Sylvain Bonniol

© Sylvain Bonniol

© Sylvain Bonniol

Explorez
Les photographes montent sur le ring
© Mathias Zwick / Inland Stories. En jeu !, 2023
Les photographes montent sur le ring
Quelle meilleure façon de démarrer les Rencontres d’Arles 2025 qu’avec un battle d’images ? C’est la proposition d’Inland Stories pour la...
02 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Volcan, clip musical et collages : nos coups de cœur photo d’août 2025
© Vanessa Stevens
Volcan, clip musical et collages : nos coups de cœur photo d’août 2025
Expositions, immersion dans une série, anecdotes, vidéos… Chaque mois, la rédaction de Fisheye revient sur les actualités photo qui l’ont...
29 août 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Contenu sensible
Focus #80 : Sofiya Loriashvili, la femme idéale est une love doll
06:31
© Fisheye Magazine
Focus #80 : Sofiya Loriashvili, la femme idéale est une love doll
C’est l’heure du rendez-vous Focus ! Alors que sa série Only You and Me se dévoilera prochainement sur les pages de Sub #4, Sofiya...
27 août 2025   •  
Écrit par Lou Tsatsas
La sélection Instagram #521 : monstres et merveilles
© Jean Caunet / Instagram
La sélection Instagram #521 : monstres et merveilles
Les monstres, les créatures étranges et hors normes sont souvent associés au laid, au repoussant. Les artistes de notre sélection...
26 août 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Prix Viviane Esders : éclairer des trajectoires photographiques
© Bohdan Holomíček
Prix Viviane Esders : éclairer des trajectoires photographiques
Créé en 2022, le Prix Viviane Esders rend hommage à des carrières photographiques européennes souvent restées dans l’ombre. Pour sa...
06 septembre 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Sandra Calligaro : à Visa pour l'image, les Afghanes sortent de l'ombre
Fahima (17 ans) révise dans le salon familial. Elle suit un cursus accessible en ligne sur son smartphone. Kaboul, Afghanistan, 24 janvier 2025. © Sandra Calligaro / item Lauréate 2024 du Prix Françoise Demulder
Sandra Calligaro : à Visa pour l’image, les Afghanes sortent de l’ombre
Pour la 37e édition du festival Visa pour l’Image à Perpignan qui se tient jusqu’au 14 septembre 2025, la photojournaliste Sandra...
05 septembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Fisheye #73 : vivre d'Amour et d'images
© Jenny Bewer
Fisheye #73 : vivre d'Amour et d’images
Dans son numéro #73, Fisheye sonde les représentations photographiques de l’amour à l’heure de la marchandisation de l’intime. À...
05 septembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Nicole Tung, ultime lauréate du Prix Carmignac !
Diverses espèces de requins, dont certaines sont menacées d'extinction, tandis que d'autres sont classées comme vulnérables, ont été ramenées à terre à l'aube par des pêcheurs commerciaux au port de Tanjung Luar, le lundi 9 juin 2025, à Lombok Est, en Indonésie. Tanjung Luar est l'un des plus grands marchés de requins en Indonésie et en Asie du Sud-Est, d'où les ailerons de requins sont exportés vers d'autres marchés asiatiques, principalement Hong Kong et la Chine, où les os sont utilisés dans des produits cosmétiques également vendus en Chine. La viande et la peau de requin sont consommées localement comme une importante source de protéines. Ces dernières années, face aux vives critiques suscitées par l'industrie non réglementée de la pêche au requin, le gouvernement indonésien a cherché à mettre en place des contrôles plus stricts sur la chasse commerciale des requins afin de trouver un équilibre entre les besoins des pêcheurs et la nécessité de protéger les populations de requins en déclin © Nicole Tung pour la Fondation Carmignac.
Nicole Tung, ultime lauréate du Prix Carmignac !
La lauréate de la 15e édition du Prix Carmignac vient d’être révélée : il s’agit de la photojournaliste Nicole Tung. Pendant neuf mois...
04 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot