Autoportraits plastiques et sensibles, les Métamorphoses de Gabriel Dia se lisent comme des explorations de notre corps, vers une recherche décomplexée d’une totale liberté. Un travail à retrouver à la Fisheye Gallery jusqu’au 5 mars !
« Je viens d’un pays où l’homosexualité est un crime pénal. Lorsque tu entends tes propres parents se moquer d’une communauté à laquelle tu te sens lié, c’est douloureux. Si je ne me sens pas “que” photographe LGBTQIA+, je reste très engagé dans cette cause – je vise simplement quelque chose de plus large », confie Gabriel Dia. En 2008, à 18 ans, convaincu qu’il ne pourra jamais vivre librement dans son Sénégal natal, l’artiste s’envole pour la France, où, à force de détermination, il entame une carrière en tant qu’ingénieur nucléaire. Ce n’est que dix ans plus tard qu’il se tourne vers l’image, suite à un besoin viscéral de partager sa passion, de faire ressortir ses émotions face à l’objectif. Une démarche marquée par des expérimentations chimiques qui lui sont désormais familières. Animé par les sensations, les mouvements, les nuances qui composent l’être humain, Gabriel Dia se dénude face à l’objectif. Un corps en transe, un corps qui danse. De sa silhouette se dégage une force farouche, un désir de crier sa souffrance au monde pour mieux l’exorciser. « J’ai tout de suite perçu le médium comme un élément libérateur.
Aujourd’hui, je tâche de travailler en couleurs pour passer à quelque chose de plus positif. Les choses avancent, nous arrivons à un stade où l’on peut faire ce que l’on veut sans que cela pose problème, peu importe notre genre, ou notre orientation sexuelle », explique-t-il. Série anthologique reprenant quatre années de travail, Métamorphoses illustre cette quête fiévreuse de liberté. Composée d’autoportraits – un genre « pratique avant tout, qui me permet de travailler lorsque j’en ai envie », s’amuse l’auteur – ce projet mêle monochromes et aquarelles, chorégraphies et poses assumées pour conter l’avancement d’un être et sa guérison, de la douleur à l’acceptation, à l’exaltation. « Dans ces autoportraits, il y a une sorte de fil conducteur, une recherche, une envie de se positionner. Il fallait que ce soit moi, il fallait que je me mouille. Raconter sa propre histoire, s’engager est nécessaire: je pense qu’il faut donner plus lorsqu’on est photographe », déclare-t-il.
Et quel accessoire plus parlant que son propre corps ? Jouant avec les ombres, les doubles expositions, le grain, les flashs, Gabriel Dia compose une série de portraits métaphoriques, dans lesquels sa silhouette est aussi bien épiée que dissimulée. De la mode aux arts plastiques, aux représentations plus expérimentales, l’artiste fusionne les genres, animé par un désir féroce de révéler son identité sans restriction aucune. « J’ai cette sensation que le corps est le moyen d’expression le plus vaste et le plus fort. On naît dedans, on ne peut pas s’en débarrasser. C’est l’outil le plus puissant à notre disposition », commente-t-il. Et de ce corps-à-corps intime, où il endosse les rôles d’adversaire et de confident, naissent des instants de grâce. Des moments d’apesanteur où l’humain s’élève, porté par la tolérance et la joie qui animent les clichés. « C’est la signification du titre de cette série : je me métamorphose. Je deviens quelqu’un d’autre pour être moi », conclut Gabriel Dia.
Ne manquez pas le vernissage de l’exposition, jeudi 27 janvier à partir de 18h30 !
© Gabriel Dia