Maison Rouge, fenouil et nostalgie

15 septembre 2018   •  
Écrit par Benoît Baume
Maison Rouge, fenouil et nostalgie

On avait beau être au courant depuis plus d’un an et demi, la fermeture effective fin octobre de la Maison Rouge m’a mis un petit coup au moral. Nonobstant le fait que j’habite littéralement à côté de cette fondation et que je n’ai pas dû manquer beaucoup de ses expositions en quatorze ans, ce lieu incarnait une vitalité de la création sans réel équivalent à Paris. Antoine de Galbert, son désormais célèbre fondateur, ne s’amusait plus et voulait prolonger autrement son engagement dans l’art. Atypique, la Maison Rouge a su créer des expositions beaucoup plus inattendues et pertinentes que la plupart des lieux de la capitale qui se limitent par la célébrité des artistes ou la peur de se tromper. Pendant est-parisien miniature – avec seulement 1300 mètres carrés d’espace d’exposition – du Palais de Tokyo, la Maison Rouge charmait par sa capacité à surprendre, par sa programmation éclectique et interdisciplinaire, qui savait nous questionner constamment. La photo n’était pas le cœur du projet, mais elle fut largement et régulièrement mise en valeur pendant ces années.

On pense évidemment à l’exposition Après Eden, qui, avec plus de 800 photographies de la collection Walther, avait été imaginée par Simon Njami fin 2015, ou, plus récemment, Étranger résident, où Marin Karmitz mettait lui-même en scène sa sélection l’an dernier. Évidemment, au-delà de ces poids lourds, la Maison Rouge savait détecter les avant-gardes, comme elle le fit avec Mathieu Pernot et Philippe Artières pour l’exposition L’Asile des photographies, ou avec Stéphanie Solinas pour Sans être rien de particulier. Des noms qui occupent désormais le haut de l’affiche. La Maison Rouge, c’était aussi l’occasion de découvrir régulièrement des parties du sublime fonds d’Antoine de Galbert, notamment ses coiffes ethniques qu’il vient de léguer au musée des Confluences, à Lyon. On a d’ailleurs pu admirer cette année, pendant les Rencontres d’Arles, dans le cadre de la programmation Actes Sud, la qualité de sa collection de portraits – avec beaucoup de photos – qui dessine un rapport à l’étrangeté.

On se doit aussi de souligner que, même si les carrot cakes et les tartes au fenouil étaient un peu chers, on adorait passer du temps dans le café de la fondation, et on ressortait en arborant fièrement ce M coloré collé à notre veste. Avec la fin de la Maison Rouge, c’est aussi le déséquilibre culturel de l’Est parisien qui grandit. Une vision de l’art contemporain qui disparaît. En aucun cas cela ne peut être une bonne nouvelle, mais cette petite fondation a eu le mérite de faire bouger les lignes. Alors ne perdez pas de temps, et courez à la dernière, L’Envol ou le rêve de voler, jusqu’au 28 octobre. Comme souvent, l’exposition ne fait pas consensus ; certains détestent, j’ai adoré. Peut-être par nostalgie, mais cela n’a plus vraiment d’importance.

Explorez
La sélection Instagram #537 : bandes de copines
© Natural Johnson / Instagram
La sélection Instagram #537 : bandes de copines
Dans notre sélection Instagram de la semaine, les artistes célèbrent l’amitié féminine et la sororité. Sur leurs photographies, des...
Il y a 9 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
Extrême Hôtel : voyage dans l’œuvre intime et colorée de Raymond Depardon
Italie, Sicile, Taormine, 1981 © Raymond Depardon / Magnum Photos
Extrême Hôtel : voyage dans l’œuvre intime et colorée de Raymond Depardon
Après huit mois de travaux pour rénovation, le Pavillon populaire de Montpellier rouvre ses portes. À cette occasion, le musée...
10 décembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Twist : les basculements du regard de Grade Solomon
© Grade Solomon
Twist : les basculements du regard de Grade Solomon
Grâce à l'impression risographie, Grade Solomon raconte les formes de vie et les états d’âme dans ce qu’ils ont de familier et de...
09 décembre 2025   •  
Écrit par Milena III
Kincső Bede : Déshéritée
© Kincső Bede
Kincső Bede : Déshéritée
Dans son livre Porcelain and Wool, Kincső Bede se réapproprie son identité transverse par des objets, des lieux et des tissus de la...
04 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Martin Parr : des photographes de Bristol lui rendent hommage
© Fabrice Laroche
Martin Parr : des photographes de Bristol lui rendent hommage
Consciemment ou non, des photographes du monde entier travaillent sous l’influence de Martin Parr. Mais pour la communauté photographique...
Il y a 4 heures   •  
Écrit par Thomas Andrei
La sélection Instagram #537 : bandes de copines
© Natural Johnson / Instagram
La sélection Instagram #537 : bandes de copines
Dans notre sélection Instagram de la semaine, les artistes célèbrent l’amitié féminine et la sororité. Sur leurs photographies, des...
Il y a 9 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
La rétrospective de Madeleine de Sinéty, entre France et États-Unis
© Madeleine de Sinéty
La rétrospective de Madeleine de Sinéty, entre France et États-Unis
L’exposition Madeleine de Sinéty. Une vie, présentée au Château de Tours jusqu'au 17 mai 2026, puis au Jeu de Paume du 12 juin au 27...
15 décembre 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Les coups de cœur #569 : Axel Pimont et Pierre Leu
© Axel Pimont
Les coups de cœur #569 : Axel Pimont et Pierre Leu
Axel Pimont et Pierre Leu, nos coups de cœur de la semaine, pratiquent avec retenue la photographie de rue. Si les deux cherchent à...
15 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger