À seulement 24 ans, Elie Theunissen et Sarah Jacques développent tous deux des univers bien particuliers. L’un s’intéresse au monde de la nuit tandis que l’autre explore celui des rêves. Voici nos coups de cœur #347.
Elie Theunissen
« J’ai une façon de photographier assez instinctive, pulsionnelle. J’aime les appareils rapides, légers – des petits compacts flash ou des télémétriques. Je favorise le travail en noir et blanc argentique, car la maniabilité et la diversité des pellicules sont des paramètres que je trouve passionnants. Je retouche très peu mes images, je préfère que l’altération de mes prises de vue soit due à la chimie et à ma façon de développer »
, raconte Elie Theunissen, 24 ans. C’est à Bruxelles, lors de soirée que le photographe se découvre un intérêt pour le 8e art. Dans la vie nocturne, au cœur de la ville, il commence à figer, au flash, des instants bruts qui l’attirent. « J’aime l’indiscipline, et le fait d’oser me rapprocher des gens pour photographier un moment volé. Je capture la nuit comme temporalité, comme interdit », confie-t-il. Une passion qu’il développe ensuite à l’école supérieure des arts le 75. Au centre de ses compositions récentes ? Le couvre-feu, et ses conséquences sur nos sorties. « Je suis passé de clichés de jeunes éméchés, s’embrassant et s’oubliant, à traquer les vestiges de traces humaines dans les rues, au rythme des sirènes, seuls bruits restants dans ces villes mortes », explique-t-il. Inspiré par les réalisations d’Anders Petersen et de Ragnar Axelsson et leurs « univers noirs, parfois glauques », l’auteur s’attache à magnifier le grotesque, et l’ordinaire, révélant d’infimes détails.
© Elie Theunissen
Sarah Jacques
Étudiante à Gobelins, l’école de l’image, Sarah Jacques a grandi au contact des arts. « Mon beau-père est peintre et ma mère était chanteuse d’opéra. Elle était vraiment habitée par son art, je pense qu’elle m’a transmis cette passion », précise-t-elle. Grande rêveuse depuis l’enfance, c’est grâce aux images qu’elle communique et partage aux autres les nuances de son propre monde. « J’aime explorer le flou, la déformation et les couleurs. J’écris souvent mes songes, j’essaie d’écouter mon inconscient et je garde en mémoire ces éléments imaginés pour les reproduire en créant des mises en scène. J’aime imaginer des créatures irréelles, comme des femmes poissons. Les corps, dans mes images, sont nus, à la fois pudiques et sensuels. J’aime y ajouter une dimension mystérieuse : est-ce que ces êtres volent ? Est-ce qu’ils flottent ? Je tente également de m’approcher d’un aspect pictural en jouant avec des matières, des tissus, des objets qui deviennent des filtres entre mon boîtier et mon sujet », raconte-t-elle. Fascinée par l’onirisme, l’autrice joue avec différentes notions et explore des thématiques aussi abstraites qu’universelles : la nature, le lâcher-prise, l’inconscient, l’amour, le trouble, l’impalpable, ou encore le paradis. Jouant avec la distorsion et les couleurs, elle façonne un monde fantaisiste où le champ des possibles ne cesse de s’étirer. Un univers inspiré par la douceur de Sarah Moon, d’Elina Kechicheva ou encore de Paul Rousteau.
© Sarah Jacques
Image d’ouverture : © Sarah Jacques