Sujets insolites ou tendances, faites un break avec notre curiosité de la semaine. Inspirée par les grands maîtres de la Renaissance italienne et flamande, Romina Ressia donne à voir des portraits burlesques et décalés. Un mélange singulier qui entremêle deux époques plus semblables qu’il n’en a l’air.
Œuvres baroques et objets mainstream, issus de la culture populaire contemporaine. À première vue, rien ne prédestinait la rencontre de ces deux univers. De même que rien ne vouait Romina Ressia, aujourd’hui âgée de 40 ans, à devenir photographe. C’est après avoir travaillé dans l’administration d’une grande entreprise internationale qu’elle se décide enfin à changer de voie. Douée avec les chiffres, l’artiste argentine ne voulait point décevoir sa famille. Toutefois, très vite, elle s’est aperçue que l’enthousiasme des débuts s’évanouissait. « Mes intérêts et même ma personnalité étaient totalement différents de ceux de mes collègues qui y travaillaient », se souvient Romina Ressia. Elle décide alors de s’essayer à diverses activités extraprofessionnelles, artistiques, dont la photographie fait partie.
Une alternance entre deux médiums complémentaires
« Ma passion pour ces domaines créatifs vient de mon enfance, j’ai toujours été très orientée vers ce genre de disciplines », précise Romina Ressia. Sa première entrevue avec une reproduction de Las Meninas de Diego Velázquez lui a fait une forte impression. À huit ans, elle n’avait pas encore conscience de ce qu’est l’art. Pourtant, la toile baroque l’intriguait déjà : qui sont les personnes représentées ? Pourquoi le peintre a-t-il fait leur portrait ? Comment vivaient-ils à cette époque-là ? Malgré son jeune âge, Romina Ressia a souhaité immortaliser ses proches. Ainsi, elle passait le plus clair de son temps à dessiner, participait à quelques ateliers créatifs et a même demandé, pour l’un de ses anniversaires, un boîtier argentique. Une alternance entre deux médiums complémentaires, toujours d’actualité, qui lui permet de s’exprimer différemment au gré de ses projets. Car lorsque ses personnages fantasques n’animent pas ses clichés, l’auteure les esquisse à coup de peinture à l’huile.
Questionner le monde dans lequel nous évoluons
Habits d’époque, perruques poudrées, clair-obscur maîtrisé… Les compositions de Romina Ressia singent donc les grandes lignes des tableaux qui ont fait la renommée du quattrocento. À la nuance près qu’elles introduisent des éléments qui appartiennent à nos sociétés contemporaines. « Les objets ont une fonction qui va au-delà de l’usage qu’ils sont censés avoir. Ils nous aident à comprendre ce que les gens vivent dans un contexte donné. Cela dit, il ne faut pas se contenter d’une simple lecture. » Chewing-gum, ballons, mégaphone ou skateboard : tout est prétexte à interroger le monde dans lequel nous évoluons.
Car selon Romina Ressia, ces deux époques se rejoignent en bien des aspects. « En l’espace de six siècles, l’espèce humaine a-t-elle suffisamment changé pour ne plus rien avoir en commun ? L’essence de nos inquiétudes est-elle totalement différente ? La plupart d’entre elles ne gravitent-elles pas autour de problématiques liées au pouvoir et à la poursuite de l’amour ? Notre société et le comportement de l’être humain m’intéressent beaucoup. Bien sûr, on peut appréhender mes œuvres par le biais de l’histoire de l’art, mais ce dont je parle a trait au monde actuel. Par conséquent, chaque individu, quel que soit son âge, créera une expérience unique à partir de mon travail. » Une conclusion qui, finalement, invite spectateurs et spectatrices à se laisser porter par leur imagination pour s’en faire leur propre interprétation.
© Romina Ressia