Les vertus psychanalytiques de l’image

07 avril 2020   •  
Écrit par Anaïs Viand
Les vertus psychanalytiques de l’image

Durant dix ans, le photographe italien Marco Marzocchi a mené une enquête sur son passé. Il présente dans son ouvrage Oyster les résultats de son processus. Un récit autobiographique, vacillant entre impulsivité et rationalité.

« J’essaye toujours de me placer dans une position inconfortable, afin d’éviter la paresse et de travailler au mieux l’étonnement », annonce Marco Marzocchi. En se plongeant dans son histoire familiale, le photographe italien né en 1974 a choisi d’exorciser la douleur et de chercher l’amour. Un challenge peu évident pour celui qui a grandi avec des parents absents cultivant le secret. « Je ne les ai pas vraiment connus. Ils se sont séparés lorsque j’avais 6 ans, et sont tous deux morts jeunes », confie le photographe qui a amorcé un travail intime en 2007. « Au commencement, j’abordais ces questions personnelles sans jamais me concentrer sur l’ensemble, il me fallait faire face à beaucoup de douleur. Je ressentais le besoin de retrouver mes parents dans d’autres individus, et de créer de nouvelles images pour exprimer de vieilles choses. Ma sœur a eu sa première fille en 2011, et cela a transformé mon point de vue sur toute notre histoire. J’ai effectué des recherches sur tous les membres de ma famille pour essayer de les comprendre et percer les secrets. En 2016, j’ai suivi un workshop avec Jh Engstrom et Margot Wallard. J’ai poursuivi mon projet tout en changeant de perspectives : je me suis mis à célébrer l’amour, ou plutôt à comprendre, accepter, pardonner et ressentir de la compassion ».

© Marco Marzocchi

L’existence dans ses formes les plus sombres

Durant dix ans, il confronte en images le présent au passé et instaure un dialogue intense. En témoigne son ouvrage sublime fonctionnant comme un leporello intitulé Osyter. « Le point culminant de 20 ans de psychanalyse. Un ensemble arraché de mon abdomen et servi dans une assiette. Une célébration autant qu’un adieu à ce qui a été », commente le photographe au sujet de son journal visuel. Et bien que l’ouvrage marque la fin d’un chapitre douloureux pour son auteur, l’objet renvoie au symbolisme de l’ouroboros (représentation d’un serpent ou d’un dragon qui se mord la queue). La fin et le début se confondent, car la vie n’est qu’une transformation constante. « Là où il y a une défaite, il y a aussi une acceptation, complète Marco Marzocchi. Oyster symbolise mon parcours de vie, parsemé de doutes et de questions. Je n’ai trouvé aucune réponse mais j’ai comblé un vide tout en acceptant mes interrogations ». En menant cette quête autobiographique, l’artiste italien, questionne l’existence dans ses formes les plus sombres. « Le monde est une huître enfermée dans une coquille. On en aime le goût mais on ne peut pas en supporter l’odeur » dit la chanson « Oyster », interprétée par Jawbreaker (album Dear you). La boucle est bouclée.

Oyster, Void, 38€, 84p.

© Marco Marzocchi © Marco Marzocchi

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© Marco Marzocchi

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