365 autoportraits sans visage

13 mai 2015   •  
Écrit par Fisheye Magazine
365 autoportraits sans visage
Depuis septembre dernier, Clémentine Gras réalise un autoportrait par jour, avec beaucoup d’autodérision. Une série drôle, touchante et remarquablement bien réalisée. Entretien.

“Incongrue, loufoque, personnelle, graphique et humoristique”. Ce sont les adjectifs qui viennent à l’esprit de Clémentine Gras, 22 ans, lorsqu’on lui demande de décrire son travail. Malgré les hésitations, la pudeur, la jeune femme nous décrit avec justesse les idées et les sentiments qui imprègnent les clichés de son projet 365 sans visage». Car depuis 206 jours, Clémentine réalise une mise en scène par jour.

“L’idée principale, c’est de se dévoiler sans vraiment se montrer. La personnalité, ça ne se devine pas sur un visage.”

j195-365-un-peu-tard-fisheyelemagj197-365-faut-penser-au-tri-fisheyelemagj200-365-irreelle-fisheyelemagj201-365-je-sais-je-perds-tout-fisheyelemagj203-365-brillance-fisheyelemagj204-365-ecoliere-perpetuelle-fisheyelemagj205-365-tiens-toi-droite-fisheyelemagj171-365-fisheyelemagj173-365-cheveux-jusqu-aux-pieds-fisheyelemagj159-365-une-petite-soif-fisheyelemagj165-365-oeuf-sous-le-coude-fisheyelemagj166-365-blessure-passagere-fisheyelemag

C’est un projet d’école (Clémentine a suivi un BTS en Design Graphique et suit actuellement un BEP en photo) que la photographe s’est rapidement approprié: “Je me suis prise au jeu au fur et à mesure et, progressivement, j’ai consacré davantage de temps à la construction de mes images.” Elle précise: “C’est très vite devenu des autoportraits parce que c’est plus simple et plus rapide à réaliser.

Clémentine se met en scène avec beaucoup d’auto-dérision et de spontanéité. Une idée lui vient en tête et en 20 minutes, la photo est prise: “Je l’avoue, parfois je perds patience quand je ne parviens pas à faire ce je veux. Ça peut aussi prendre deux heures. Du coup je demande au petit frère de m’aider.” Autre contrainte: “Je ne travaille qu’avec la lumière du jour, plus douce, plus naturelle. Du coup en décembre j’ai eu quelques difficultés, parce qu’il faisait nuit très tôt ce qui me laissait peu de temps pour réaliser une image.

"Lol", photo réalisée le 24 décembre 2014, extraite de la série "365 jours sans visage" / © Clémentine Gras
“Lol”, photo réalisée le 24 décembre 2014, extraite de la série “365 jours sans visage” / © Clémentine Gras

Inspirée par des figures comme Guy Bourdin ou Isabelle Chapuis, Clémentine se nourrit aussi beaucoup du travail d’artistes qui s’exposent sur le Net. Avant d’ajouter timidement: “Puis bon, c’est aussi la vie, le quotidien qui m’inspirent.

Mystérieuse “moi”

Partant du principe que l’on ne connaît jamais vraiment quelqu’un, Clémentine joue sur l’anonymat, se cache le visage tout en se mettant en scène. Son environnement devient le théâtre de ses émotions, qu’elle cherche à exprimer à travers l’objectif: “un peu comme une thérapie, oui».

Elle évoque par exemple l’image n°177, dans laquelle elle aligne une série de coquillettes: “Je suis une vraie fainéante ! Mais ce que mon entourage sait un peu moins, c’est que j’ai aussi un côté très maniaque. Je l’ai laissé s’exprimer dans cette photo.

"She's a maniaaaaaaaaaaaac !". Photo extraite de la série "365 jours sans visage" / © Clémentine Gras
“She’s a maniaaaaaaaaaaaac !”. Photo extraite de la série “365 jours sans visage” / © Clémentine Gras

Idem dans la photo baptisée “Ma mer me manque” (n°170) pour laquelle elle a fait poser son frère. C’est ici une délicate attention à une grand-mère disparue, aux origines bretonnes et plus largement à la famille, subtilement exposés.

"Ma mer me manque". Photo extraite de la série "365 jours sans visage" / © Clémentine Gras
“Ma mer me manque”. Photo extraite de la série “365 jours sans visage” / © Clémentine Gras

Si elle pense déjà à l’après (éditer un livre ou monter une expo…), s’il arrive qu’elle se lasse un peu, parfois, de ces autoportraits, Clémentine est bien dans ce projet, “parce qu’il me fait grandir, mûrir, aussi bien dans ma démarche photographique que dans le graphisme”. Clémentine a su développer un style, une cohérence qui augurent déjà d’un bel avenir artistique.

En (sa)voir plus

Toutes les photos de Clémentine sont à retrouver sur TumblrFlickr et Facebook.

Explorez
13 expositions photographiques à découvrir en octobre 2025
Residency InCadaqués 2025 © Antoine De Winter
13 expositions photographiques à découvrir en octobre 2025
La rentrée scolaire est souvent synonyme de foisonnement d'expositions. Pour occuper les journées d'automne et faire face à la dépression...
08 octobre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Antoine Béguier, au cœur des strates identitaires du Kirghizistan
Autoroute de la soie © Antoine Béguier
Antoine Béguier, au cœur des strates identitaires du Kirghizistan
Antoine Béguier a parcouru le Kirghizistan pendant plusieurs années. Ses voyages et ses rencontres lui ont révélé un pays en pleine...
01 octobre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Annissa Durar : une cueillette visuelle de senteurs
The Rose Harvest © Annissa Durar
Annissa Durar : une cueillette visuelle de senteurs
La photographe américano-libyenne Annissa Durar a documenté, avec beaucoup de douceur, la récolte des roses à Kelâat M’Gouna, au sud du...
13 septembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Sous le soleil d'Italie avec Valentina Luraghi
Mediterraneo © Valentina Luraghi
Sous le soleil d’Italie avec Valentina Luraghi
À travers sa série Mediterraneo, Valentina Luraghi nous transporte dans ses souvenirs d’été. Le·la spectateur·ice y découvre le...
29 août 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Les images de la semaine du 6 octobre 2025 : expositions automnales
Éphémère, de la série Deuil blanc © Flore Prébay
Les images de la semaine du 6 octobre 2025 : expositions automnales
C’est l’heure du récap ! À l’approche des vacances de la Toussaint, les pages de Fisheye vous dévoilent de nouvelles expositions à...
12 octobre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Jeu de Paume : Luc Delahaye, le monde en suspens
© Luc Delahaye
Jeu de Paume : Luc Delahaye, le monde en suspens
Luc Delahaye, ancien grand reporter devenu artiste, transforme le regard documentaire en une méditation silencieuse sur le monde. De ses...
11 octobre 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Voyage au centre de la terre brésilienne
Périphérie de São Paulo, 2020 @Vincent Catala
Voyage au centre de la terre brésilienne
Comment représenter un pays de façon juste et nuancée, loin des clichés véhiculés autour de ce dernier ? L’impressionnant Île-Brésil de...
10 octobre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Prix Photographie & Sciences : Julien Lombardi et Richard Pak exposent à la Villa Pérochon
Inframundo, de la série Planeta, 2024 © Julien Lombardi
Prix Photographie & Sciences : Julien Lombardi et Richard Pak exposent à la Villa Pérochon
Du 11 octobre 2025 au 21 février 2026, la Villa Pérochon devient théâtre de sciences, présentant les travaux de Julien Lombardi, lauréat...
10 octobre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger