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Dans cet espace pensé comme une exposition, un·e photographe et un·e commissaire croisent leurs regards. Pour cette première édition, Emile Gostelie explore les réalités invisibles de la matière et de la perception, tandis qu’Emilia Genuardi, fondatrice du salon a ppr oc he, qui se tient du 13 au 16 novembre, inscrit ce travail dans un dialogue autour de l’image contemporaine et de ses métamorphoses.
Emile Gostelie : « Je me considère comme un chercheur artistique, explorant des réalités que nous ne pouvons pas voir. La science est pour moi une source d’inspiration essentielle, et la conjuguer avec la liberté créative me donne l’opportunité de devenir le “chercheur” que j’ai toujours voulu être. Je suis particulièrement fasciné par le physicien Ludwig Boltzmann (1844- 1906) et ses travaux sur l’entropie. Il suggérait que notre monde macroscopique visible ne serait qu’une accumulation statistique – une ombre, pourrait-on dire – des positions combinées d’innombrables particules minuscules qui, invisibles pour nous, se déplacent en permanence et forment sans cesse de nouvelles micro-constellations aléatoires.
Mon projet au long cours a commencé il y a plusieurs années, lors d’un séjour en Normandie. J’ai pris un unique cliché d’un tas de foin. Bien qu’ordinaire, ce tas de foin m’a coupé le souffle. Il a éveillé en moi des “souvenirs” de formes que je n’avais jamais vues, mais que je reconnaissais pourtant. Lorsque je suis revenu quelques jours plus tard, le tas avait disparu. Mais l’image, elle, est restée, tout comme l’élan de découvrir ce que cette image contenait sans le révéler.
Cherchant une approche pour libérer le potentiel de cette image unique, je me suis tourné vers l’idée de Boltzmann : de petites particules qui s’assemblent en différentes constellations. J’ai commencé à déconstruire puis à recomposer l’image originale à la main. En faisant cela, je révèle et découvre d’infinies mutations et de nouveaux sens. Je vois une “réalité” évoluer vers de nouvelles “réalités” et vers des monuments mythiques. Je vois cet objet familier devenir un prisme d’imagination, de mémoire et de transformation – un processus qui interroge la valeur de réalité de la perception, de la photographie et de mes propres intentions obsessionnelles. »



Art et science
Pour Emilia Genuardi, la démarche d’Emile Gostelie relève autant de l’art que de la pensée scientifique. « Il transforme la simplicité du quotidien en un champ d’exploration poétique », souligne-t-elle. Ce projet touche aussi par son universalité : nul besoin d’explications pour y entrer. Il se suffit à lui-même et invite chacun·e à s’y plonger librement. C’est dans cette perspective qu’Emilia Genuardi a choisi de présenter le travail d’Emile Gostelie lors de la prochaine édition du salon a ppr oc he, salon qu’elle a fondé en 2017 à Paris et qui se tient chaque année au Molière, un hôtel particulier du 1er arrondissement (40, rue de Richelieu). Devenu un rendez-vous incontournable du mois de novembre, il révèle des pratiques singulières, souvent peu visibles ailleurs, et propose d’autres manières d’expérimenter l’image.
Pensée au plus près des œuvres, la scénographie de l’événement fait partie intégrante de cette démarche. Elle se nourrit du caractère intime du lieu pour créer des résonances entre les projets présentés et transformer l’espace en un véritable lieu d’exposition. Emilia Genuardi défend ainsi une expérience globale, où artistes, commissaires invité·es, galeries et publics participent ensemble à une même conversation autour de l’image contemporaine. « Nous travaillons main dans la main : les échanges ne s’arrêtent pas à la fin du salon, ils se prolongent bien au-delà et créent des liens durables », explique-t-elle tout en insistant sur l’importance de ces collaborations à long terme qui prolongent et enrichissent le travail des artistes.
Entrée libre sur réservation. www.approche.paris.
Cet article est à retrouver dans Fisheye #74.