Approche 2024 ou l’art de mettre en scène

07 novembre 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Approche 2024 ou l’art de mettre en scène
© Antoine De Winter Courtesy Hangar Gallery
© Jackie Mulder Courtesy Janknegt Gallery

Du 7 au 10 novembre 2024, le Salon Approche présente sa 8e édition. Au 40 rue de Richelieu, à Paris, quinze expositions personnelles révèlent des scénographies remarquables soulignant la poésie des œuvres présentées. Un rendez-vous à ne pas manquer !

Au Molière, dans le premier arrondissement de la capitale, se déploie la 8e édition du Salon Approche. Sur les deux étages, quinze expositions d’artistes français·es et internationales·aux occupent les espaces, s’approprient le médium photographique en s’affranchissant des manières les plus classiques de le dévoiler. De la photogrammétrie imposante de Daniel Bourgais aux images curieusement gondolées sur du plexiglas de Hiên Hoàng, des tirages rétroéclairés sous projecteur d’Inês d’Orey aux délicats transferts sur papier de chanvre et organza de soie de Jackie Mulder, faisant apparaître les clichés en lambeaux de tissu, l’événement fait la part belle à l’originalité. Comme une manière de capter le regard, d’accrocher l’attention pour pouvoir, ensuite, laisser émerger le propos.

La mise en scène comme accroche

C’est donc un véritable florilège de mises en scène que nous offre cette édition 2024 d’Approche. Dans Followers, Antoine De Winter récupère des portraits volés sur des faux profils Instagram pour recréer – grâce à l’intelligence artificielle – des visages d’où émane une certaine étrangeté. En cyanotype sur tissu, modelées à la cire d’abeille, contrastées par la feuille d’or, ses créations nous immergent dans un univers à la fois familier et inconnu, plongé dans la pénombre d’un bleu profond, rappelant celui de nos écrans.

Tous·tes deux architectes à leur façon, Inês d’Orey et Jesse Wallace allient photographie et écrins. La première questionne les notions de monstration et de dissimulation grâce à l’utilisation de boîtes lumineuses antiques révélant ses clichés. En illuminant certains détails de ses œuvres, elle nous invite à accueillir le mystère en explorant la face cachée de notre environnement. Le second, quant à lui, manipule physiquement ses images. Ce n’est qu’en les disséquant, les détériorant qu’il parvient à trouver l’essence pure de son œuvre. Un travail d’un minimalisme hypnotique, magnifié par les cadres extraordinaires qui l’enferme. Alliant broderie, dessin et photographie, Jackie Mulder, enfin, multiplie les strates et les nuances au cœur de ses installations. De leur qualité vaporeuse émerge une métaphore de notre mémoire – celle qui renferme nos traumatismes – ainsi qu’un désir d’apaisement, perdu·e dans la contemplation de ces couches fragiles d’un extrême raffinement.

© Jesse Wallace Courtesy Galerie Écho 119

© Hiền Hoàng Courtesy MUCHO MAS!
© Inês D’Orey Courtesy Galeria Presença
© Anthony Morel Courtesy Galerie Parallax

Œuvres sensibles et éthérées

Une poésie inattendue, qui semble courir d’un accrochage à l’autre, comme un fil d’Ariane nous guidant dans les limbes d’inspirations complémentaires. C’est isolé du monde urbain qu’Anthony Morel crée. Adepte de la récupération, il joue avec les matériaux et les différents boîtiers pour bâtir des univers embrumés. Tanins d’arbre, terre, vase, charbon composent ses superpositions subtiles, comme autant d’échos à la nature sauvage qui ne cesse de l’inspirer. Cette même énergie inspire Isabelle Chapuis. Collectant la terre du lieu de ses prises de vue, peignant par-dessus l’image imprimée, elle livre des pièces uniques comme un hommage organique à l’environnement qui les a vues naître. Entre douceur et viscéralité, les nuances pourpres de ses images évoquent une nature vivante, respirant, transpirant son sol, nous attirant à elle.

Arpentant la ligne de crête entre visible et invisible, Alexandre Dupeyron rend, quant à lui, hommage à la lumière à travers Dysnomia. Libre réinterprétation en couleur d’un travail au long cours en noir et blanc, la série se fait impressionniste, presque onirique. Les tons se fondent, révèlent les détails, font du territoire capturé un espace sensible s’émancipant du simple réel. Enfin, c’est sur la douceur du papier coton qu’Alessandra Calò imprime χθόνιος (chthonien), des « excavations » photographiques ramenant à la surface des mémoires oubliées, des fragments perdus. Dans un monochrome au grain velouté, végétation et corps se fondent, s’entrecroisent, symboles de souvenirs accrochés, entrelaçant leur empreinte à notre imaginaire.

© Alexandre Dupeyron Courtesy Galerie du Jour agnès b.
© Alessandra Calò Courtesy LAB 1930

© Isabelle Chapuis Courtesy Analix Forever
© Daniel Bourgais Courtesy Galerie Data
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