
Lycien-David Cséry et Ana da Silva, nos coups de cœur de la semaine, prêtent attention aux détails. Le premier observe les objets et les corps de près pour révéler la beauté dans l’imperfection, tandis que la seconde peint des tableaux monochromes abstraits des émotions qui la traversent.
Lycien-David Cséry
Lycien-David Cséry n’a jamais d’idées fixes quand il crée des images. « Je ne recherche pas un motif particulier et je n’essaie pas de prouver quoi que ce soit à travers mes photographies. Je travaille à partir de l’observation, pas de l’intention », confie-t-il. Alors avec son objectif, l’artiste visuel allemand dévoile des objets, des corps, des textures, toutes ces choses qui selon ses mots « coexistent sans hiérarchie. » « Je m’intéresse au contact, à la pression et à la proximité – à la manière dont les corps, les objets et les surfaces s’influencent et se transforment mutuellement », poursuit-il. C’est ainsi que Lycien-David Cséry compose Cracks and Dents, une exploration effrénée de l’usure des voitures. Des carrosseries écorchées, des rétroviseurs en berne, des parechocs cabossés : « Nous nous efforçons d’effacer activement les défauts et les détritus […]. Mais malgré le perfectionnisme élégant qui régit notre idéologie contemporaine, nous trouvons partout des signes du contraire : les cicatrices, les imperfections et les ecchymoses que la vie apporte inévitablement avec elle », commente le photographe à propos de sa série. De manière crue et sincère, il donne une place à ce qu’on cherche à cacher, il met en lumière ce qu’on ne veut pas voir, il révèle la beauté qui gît dans les failles. « Je suis convaincu que le sens apparaît si l’on y prête vraiment attention », conclut le photographe.






Ana da Silva
Une silhouette stylisée semble assise sur le bord de la fenêtre, une autre pourrait être issue d’un book de mode. En face, des taches blanches qui ressemblent à des bulles s’échappent d’une mer de noir. Ces photographies autant abstraites qu’envoûtantes ont été réalisées par Ana da Silva, jeune autrice portugaise, installée à Porto. « Je cherche à transformer les émotions en images, à rendre visibles les expériences intérieures », explique-t-elle. Formée à l’Institut des arts et de l’image puis à l’Institut portugais de photographie, elle conçoit l’appareil photo comme un outil thérapeutique et le 8e art comme un langage créatif. « Je travaille exclusivement en noir et blanc, car cela élimine les distractions et me permet de me concentrer sur la forme, le contraste et les sensations », précise-t-elle. Ses abstractions naissent de la musique, sa principale source d’inspiration : « Elle s’infiltre dans mes images comme la lumière dans l’ombre », ajoute Ana da Silva. Jouant avec le flou et la texture, elle « explore la frontière entre la clarté et le chaos ». En résultent des tableaux monochromes magnétiques qui happent celle ou celui qui les regarde, qui invitent à s’approcher un peu plus près pour tenter d’en déceler les formes qui s’y échappent. « Je cherche à trouver un sens dans la tension et l’immobilité afin de révéler la beauté même dans les moments d’inquiétude », conclut Ana da Silva.



