« Donner une image à ce dieu imaginaire » 

08 mars 2018   •  
Écrit par Fisheye Magazine
« Donner une image à ce dieu imaginaire » 

Ishola Akpo, né en 1983, vit et travaille à Cotonou, au Bénin. Ses photographies mixent réalité et surréalité. Chaque niveau de lecture métamorphose ses images. Dans sa série photographique Daïbi,  inspirée par les chasseurs Nago de la région de Savè, au Bénin, il figure un dieu imaginaire aux allures plurielles. La Fondation Montresso présente actuellement son travail à Marrakech dans le cadre du programme In-Discipline,  dont la première édition est consacrée au Bénin. Entrevue signée Camille Moulonguet.

Camille Moulonguet : Comment est née cette série ?

Ishola Akpo : Ce travail repose sur la divinité Ogun, venue du Nigeria et présente au Bénin. Cette divinité est adorée par les chasseurs, les forgerons, tous ceux qui ont un lien avec le métal. Un élément que l’on retrouve dans chaque image de la série. Daïbi renvoie à un dieu imaginaire qui n’a pas de représentation fixe et que j’ai imaginé.

Pourquoi les chasseurs ont-ils pris une telle place dans ce travail ?

Quand les chasseurs s’en vont chasser, ce n’est pas nécessairement pour tuer les animaux, mais pour communiquer avec eux, entrer en contact avec les esprits ou chercher des plantes médicinales afin de pouvoir soigner les malades. Ces chasseurs s’enduisent tout le corps de poudre à canon et prennent une nouvelle identité. Ils se transforment pour pouvoir discuter avec les animaux. Je me suis dit qu’il fallait partir de cela pour donner une image à ce dieu imaginaire, Daïbi. Moi-même, je mène une quête identitaire et en prenant des identités multiples, je comprends qu’un homme est pluriel.

© Ishola Akpo

Pourquoi avoir choisi de faire des autoportraits ?

Quand je me prends en photo, ce n’est pas moi-même, Ishola, que je prends. La photo, c’est comme un miroir à partir duquel je me pose des questions. Est-ce moi ? Est-ce mon corps ? Ce sont des expériences que je fais et des questions que je pose. Dans une de ces photographies, je pose des éléments métalliques sur mes oreilles pour entendre les ancêtres, les génies, et communiquer avec eux. C’est une forme d’énergie qui me permet d’avancer dans ma vie. À travers mes images et moi, je suis sûr que d’autres personnes en quête identitaire pourront trouver des réponses ou, du moins, y verront des pistes.

Dans le cadre du programme d’aide à la création et à la diffusion de jeunes artistes, initié par la Fondation Montresso cette année, vous avez poursuivi cette série Daïbi au Maroc. Que vous a apporté cette nouvelle présence géographique ?

J’ai fait figurer ce dieu dans plusieurs environnements : les contextes béninois et marocain. J’ai utilisé la culture marocaine pour imaginer d’autres entités avec des éléments trouvés dans les souks. La culture marocaine est si riche ! Le fil conducteur étant le métal, j’ai essayé de trouver des accessoires qui ont des liens entre les deux pays pour réaliser ces autoportraits. Je me suis emparé d’éléments inspirants. Il y avait, par exemple, le voile métallique qui empêche de lever les yeux sur quelqu’un que l’on respecte particulièrement. Une marque de respect que l’on retrouve au Maroc comme au Bénin. Quand je suis arrivé au Maroc, je n’ai pas renié qui je suis, au contraire, j’ai essayé de mélanger la culture marocaine à la mienne afin de créer une nouvelle identité.

© Ishola Akpo© Ishola Akpo© Ishola Akpo

© Ishola Akpo

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