Fotohaus : ce qui se cache derrière les murs

23 juillet 2019   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Fotohaus : ce qui se cache derrière les murs

Jusqu’au 31 juillet 2019, Fotohaus Paris Berlin accueille, dans le cadre du festival Voies Off à Arles, l’exposition collective Mur(s) / Mauer(n). Un thème complexe et contemporain, sublimé par un cadre unique.

Créé en 2015, Fotohaus Paris Berlin s’est imposé comme un lieu d’échange et de rencontre entre photographes, galeries, collectionneurs, éditeurs et passionnés du 8e art. Chaque année, cet événement imaginé par ParisBerlin fotogroup investit une grande maison, rue de la Roquette, durant les Rencontres d’Arles. Tout le mois de juillet, les regards d’une cinquantaine d’artistes et de collectifs se croisent, autour d’un thème commun.

Cette année, c’est le concept de mur qui a inspiré Fotohaus. De 1961 à 1989, le mur de Berlin a symbolisé une confrontation entre deux puissances opposées, deux idéologies. Aujourd’hui, plus de soixante murs hautement sécurisés existent en Europe. Peur de l’autre, isolationnisme, ou nationalisme, ces barrières questionnent les valeurs de l’Union européenne et semblent encourager chaque peuple à s’enfermer. Géopolitiques, factuelles, métaphoriques ou poétiques, les images présentées au sein de cette maison de la photo interrogent les notions de liberté, de censure, d’exil ou encore de passage. Remplie d’artistes talentueux, l’exposition Mur(s) / Mauer(n) invite le visiteur à poser un autre regard sur les murs de notre quotidien.

© Holger Biermann

© Holger Biermann

Visibles comme invisibles

C’est aux passages que se sont intéressés les auteurs du collectif Les Associés. Sébastien Sindeu, Joël Peyrou, Olivier Panier des Touches, Elie Monferier et Alexandre Dupeyron documentent ces lieux, réels ou symboliques, marquant une frontière, séparant des espaces, des cultures, des mondes. Qu’ils documentent les flux migratoires, les sensations d’isolement dans une société étrangère, ou la vulnérabilité poussant l’Homme à se construire des barrières, les photographes représentent avec talent les murs visibles comme invisibles.

© Alexandre Dupeyron

© Alexandre Dupeyron

Maud Lecompte, Laura Bonnefous, Margaux Roy, Gabrielle Chaillat et Luc Quelin, du collectif F1.4 occupent l’espace avec des œuvres en volume. Leurs créations deviennent alors un assemblage artistique, représentant un édifice visuel. En jouant avec l’accrochage, les liens esthétiques entre Homme et territoire, ou en choisissant le mur comme support, ces artistes étudient avec poésie leur environnement. Une vision douce et onirique de notre monde.

© Gabrielle Chaillat© Maud Lecompte

© à g. Gabrielle Chaillat et à d. Maud Lecompte

Une délicatesse que l’on retrouve dans les images de Peter Puklus. Ce photographe hongrois interroge à travers le 8e art le rôle social de l’homme, les relations père-fils et la prédestination à la paternité. Un déterminisme ancré dans nos sociétés, symbolique d’un mur métaphorique. Miguel Bursch, quant à lui, imagine une ligne de démarcation entre illusion et désillusion, apparence et réalité. Réalisés à Blackpool, au Royaume-Uni, ses clichés capturent un territoire ambigu, divisé entre un quotidien obscur – chômage, toxicomanie – et un flux touristique croissant.

© Peter Puklus© Miguel Brusch

© à g. Peter Puklus à d. Miguel Brusch

Plus réaliste et poignante, la série Utopia de Sebastian Wells donne à voir des camps de réfugiés du monde entier. Ni lieu, ni ville, ses camps fleurissent et abritent des survivants, se battant pour s’adapter à une nouvelle situation de crise. En voyageant en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient, l’auteur a capturé 24 camps. Des espaces devenus le foyer d’une nouvelle catégorie humaine : le réfugié.

Concrets ou imaginaires, les murs présentés à Fotohaus s’assemblent à merveille. Dans ce décor unique – les œuvres décorent toutes les pièces de la maison, des salons aux salles de bain – leurs multiples définitions se complètent et dialoguent. Une immersion réussie.

© Sebastian Wells

© Sebastian Wells

© Marion Brun© Casper Christophersen

© à g. Marion Brun et d. Casper Christophersen

© Margaux Roy© Anja Conrad

© à g. Margaux Roy et à d. Anja Conrad

Image d’ouverture © Alexandre Dupeyron

Explorez
Ekaterina Perfilieva et l'intime au cœur de la fracture
© Ekaterina Perfilieva, Nocturnal Animals
Ekaterina Perfilieva et l’intime au cœur de la fracture
À la fois distante et profondément engagée, Ekaterina Perfilieva, artiste multidisciplinaire, interroge une contemporanéité...
Il y a 11 heures   •  
Écrit par Milena III
Le ministère de l’Aménagement du territoire fête les 80 ans de la Libération
Megapolis, Puteaux, 2025 © Aleksander Filippov
Le ministère de l’Aménagement du territoire fête les 80 ans de la Libération
À l’occasion des 80 ans de la Libération, les ministères de l’Aménagement du territoire et de la Transition écologique ont lancé...
08 septembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Les coups de cœur #558 : Marina Viguier et Emma Tholot
Carmela, série Carmela © Emma Tholot
Les coups de cœur #558 : Marina Viguier et Emma Tholot
Marina Viguier et Emma Tholot, nos coups de cœur de la semaine, explorent la théâtralité comme outil de résistance, de liberté et de...
08 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Les images de la semaine du 1er septembre 2025 : le pouvoir des images
© Julie Wintrebert, Crazy Beaches, 2024 / courtesy of the artist and festival Les Femmes et la mer
Les images de la semaine du 1er septembre 2025 : le pouvoir des images
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, pour la rentrée, les pages de Fisheye se mettent au rythme du photojournalisme, des expériences...
07 septembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Ekaterina Perfilieva et l'intime au cœur de la fracture
© Ekaterina Perfilieva, Nocturnal Animals
Ekaterina Perfilieva et l’intime au cœur de la fracture
À la fois distante et profondément engagée, Ekaterina Perfilieva, artiste multidisciplinaire, interroge une contemporanéité...
Il y a 11 heures   •  
Écrit par Milena III
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
© Valérie Belin
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
L’heure des rencontres « 7 à 9 de Chanel » au Jeu de Paume a sonné. En cette rentrée, c’est au tour de Valérie Belin, quatrième invitée...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Ana Corderot
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
© Sara Lepore / Instagram
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
La maison se fait à la fois abri du monde et porte vers le dehors, espace de l’intime et miroir de nos modes de vie. Les artistes de...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
5 coups de cœur qui témoignent d'un quotidien
I **** New York © Ludwig Favre
5 coups de cœur qui témoignent d’un quotidien
Tous les lundis, nous partageons les projets de deux photographes qui ont retenu notre attention dans nos coups de cœur. Cette semaine...
15 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet