Photographe venue de Hongrie, Csilla Klenyánszki s’intéresse à la place de la femme dans notre société. Ses créations mêlent sculpture, performance et image et mettent en lumière l’absurdité de notre quotidien. Une vision contemporaine à découvrir à Paris Photo.
Csilla Klenyánszki, photographe et artiste hongroise conçoit des œuvres hybrides – entre image, performance et installation. En 2012, Csilla termine ses études en photographie à l’Académie de Kooning, à Rotterdam. Elle se lance alors dans « une exploration de l’équilibre ». « Mes projets se trouvent aux frontières de l’absurde, explique-t-elle, quelque chose qui peut sembler étrange finit toujours par trouver sa place. » Psychologique comme physique, l’équilibre que la photographe travaille est fragile, friable. Dans Good Luck, sa première série photographique, datant de 2013, elle tente de l’interpréter en image. « Les clichés de Good Luck montrent cet instant d’équilibre éphémère, lorsque tout semble parfait, immobile, précise Csilla. Pour atteindre ce résultat, concentration et chance sont nécessaires. » Un processus lent, demandant une certaine patience à l’artiste, qui voit dans ces installations un rituel, une méditation. Une fois la construction érigée, les éléments se fondent les uns dans les autres, et forment une grande sculpture. « Ils interagissent et travaillent ensemble, ils se supportent les uns les autres, afin de ne pas s’effondrer », explique la photographe. La métaphore troublante d’une société idéale.
Un corps féminin dominé par le poids des corvées
Après être devenue mère, en 2015, Csilla décide de se concentrer sur l’image de la femme dans notre société. Souvent conceptuelles, ses images utilisent des objets – des accessoires à la fois universels et symboliques – afin d’interroger nos coutumes. « Je ne cherche pas à créer des images surréalistes, l’absurde est plutôt la conséquence de mes recherches, déclare la photographe. Le monde dans lequel nous vivons est suffisamment insensé pour être une source d’inspiration. » Dans ses clichés évoluent des corps déshumanisés, soumis aux nombreux accessoires placés autour d’eux : une horloge, des ustensiles de ménage, ou encore des fleurs.
The reminiscence of being a woman montre un corps féminin dominé par le poids des corvées domestiques. Effaçant la frontière entre femme et objet, Csilla interroge son public : « Comment séparer l’identité d’un corps, et sa fonctionnalité ? » Le visage caché, les expressions masquées, les modèles évoluent dans un univers surréaliste, devenus de simples ustensiles. Dans House/hold, la photographe étudie la charge mentale – charge invisible représentant l’organisation de tout ce qui touche la sphère domestique : achats, soins, ménage, etc. « Je propose une solution ironique : incorporer trente minutes de yoga à ces sessions de rangement », s’amuse Csilla. L’entretien de la maison devient alors un instant de méditation, au cours duquel la femme transforme cette corvée en un exercice spirituel.
Entre photographie et performance, l’artiste hongroise invite l’absurde dans ses créations. Des mises en scène dont l’apparente légèreté met en lumière les inégalités de notre société. Un travail féministe à découvrir à Paris Photo, du 8 au 11 novembre.
© Csilla Klenyanszki