Découverte récente, coup de foudre artistique, ou même artiste phare… Dans chaque numéro, différents membres de l’équipe Fisheye prennent la parole et partagent leur obsession photographique du moment. Lumière aujourd’hui sur Michael Young, choisi par Bastien Forato, directeur artistique.
Comme bien souvent, tout a commencé par une rencontre. Celle de David, un revendeur de magazines érotiques gay vintages sur eBay et du photographe Michael Young, qui a permis d’initier un projet sensible et intime : Hidden Glances. Découverte au gré de mes curations pour le magazine, cette série a capté mon attention : celle du créatif qui apprécie la finesse des compositions où s’entremêlent avec virtuosité corps, matières, silhouettes et formes colorées issues des calendriers découpés par l’artiste ; mais aussi celle de l’homme complexé évoluant dans une société patriarcale où le corps masculin, athlétique et musclé, est érigé comme parangon de virilité. C’est alors que, entre confusion et fantasme, mon regard s’est perdu au milieu de ces corps bodybuildés gorgés de testostérone. Des archétypes de modèles hétérosexuels qui se donnent à voir sous toutes leurs coutures. Mais ce qui les distingue est évidemment la découpe chirurgicale de Michael Young qui bâtit des fenêtres de chair sur ces corps déconstruits et dépossédés de leur identité. Un geste vif et sec empreint de symbolique qui vient resculpter le marbre de ces objets (de désir) qui ont façonné une partie de la culture queer jusqu’à aujourd’hui. Un moyen pour le photographe de dépasser la peur éprouvée dans sa jeunesse par le tabou du regard posé sur ces hommes qu’il a dû épier du coin de l’œil pour ne pas voir son homosexualité dévoilée, mais aussi une manière d’ouvrir pour son public des fenêtres sur un monde à déconstruire et reconstruire par le regard.
Cet article est à retrouver dans Fisheye #53, disponible ici.
© Michael Young