Les arpenteurs du paysage : Fernando Maselli

07 janvier 2021   •  
Écrit par Anaïs Viand
Les arpenteurs du paysage : Fernando Maselli

Utilisant les techniques de la photographie argentique ou numérique, mobilisant des algorithmes d’intelligence artificielle ou ayant recours à des manipulations physiques, une dizaine de photographes contemporains proposent leur vision du paysage, un des genres les plus traditionnels des modes de représentation. Nourris par des siècles d’images, ces arpenteurs du paysage explorent notre connexion au monde, notre relation au sublime ou aux territoires en lutte en escaladant les montagnes ou en s’immergeant dans les océans. Associant fiction, sciences et arts plastiques, leurs investigations poétiques questionnent notre espace et nos manières de l’habiter. Focus sur le photographe argentin Fernando Maselli. Cet article est à retrouver dans notre dernier numéro.

La religion, la philosophie, ou encore la nature sont autant de sujets qui habitent les paysages de Fernando Maselli. « Ils peuvent avoir un impact particulier sur notre perception. » Ce photographe argentin installé à Madrid depuis vingt ans amorce tous ses projets par une longue phase de documentation. « Il me faut parfois plusieurs années pour développer une idée, je considère que c’est la partie la plus importante de mon processus. Ensuite, les photos viennent d’elles-mêmes », explique-t-il.

Artificial Infinite est un bel exemple de son processus de création. « L’idée de faire des montages photographiques de paysages est apparue en 2010. J’ai ensuite beaucoup lu sur le romantisme notamment », se souvient-il. Une fois la partie conceptuelle cadrée, un nouveau défi s’est présenté à lui : la vie dans les montagnes et l’escalade. « J’ai effectué plusieurs stages d’alpinisme, et j’ai investi dans du matériel d’excursion en solo. Le physique a été un aspect important dans ce projet. »

© Fernando Maselli

Sublime terrifiant

Cette proposition n’est pas qu’une simple succession d’images inspirantes, elle représente aussi une réflexion sur le statut du sublime, soit « la beauté ajoutée à la terreur », pour reprendre la définition du sublime dans les écrits romantiques. L’artiste a choisi les montagnes et autres glaciers pour dépeindre l’immensité, la solitude ou encore le silence de la nature. « J’ai passé une nuit tout seul, j’ai eu froid et peur, mais au lever du soleil, j’ai pu découvrir un magnifique panorama. Je magnifie les montagnes pour essayer de transmettre au spectateur mon expérience vécue. » En écho à Une enquête philosophique sur l’origine du beau, l’ouvrage d’Edmond Burke publié en 1757, Fernando Maselli développe plusieurs techniques pour « produire du sublime » : fragmentation, superposition, répétition. « L’auteur raconte qu’un artiste répétant un même élément dans un cadre constant peut installer une sensation d’infini chez le spectateur », ajoute-t-il.

Pour réaliser ses images, il s’est rendu en Patagonie, à la pointe méridionale de l’Amérique du Sud, mais aussi en France, dans les Pyrénées et dans les Alpes. Mais la localisation importe peu, et l’auteur brouille les frontières de la réalité avec le désir d’installer une certaine ambiguïté. « Si j’aime réaliser des compositions irréelles, j’assure toutefois une continuité géologique ». Artificial Infinite et ses montagnes semi-obscures offrent ainsi une possible définition du « sublime terrifiant ».

 

Cet article est à retrouver dans le Fisheye #45, en kiosque et disponible ici

© Fernando Maselli

© Fernando Maselli

© Fernando Maselli© Fernando Maselli

© Fernando Maselli

Artificial Infinite © Fernando Maselli

Explorez
Approche : revient pour sa 7e édition !
Laure Winants / Courtesy Of salon A ppr oc he
Approche : revient pour sa 7e édition !
Pour sa 7e édition, le salon accueillera 15 expositions personnelles d’artistes du 9 novembre au 12 novembre 2023 !
25 septembre 2023   •  
Écrit par Lucie Guillet
Dans l'œil de Natacha de Mahieu : ce que le surtourisme doit à Instagram
© Natacha de Mahieu
Dans l’œil de Natacha de Mahieu : ce que le surtourisme doit à Instagram
Cette semaine, plongée dans l’œil de Natacha de Mahieu. Theatre of authenticity est une série née de voyages personnels de l'artiste, où...
25 septembre 2023   •  
Écrit par Milena Ill
Focus #57 : Alice Pallot et la prolifération cauchemardesque d’algues toxiques
6:27
© Fisheye Magazine
Focus #57 : Alice Pallot et la prolifération cauchemardesque d’algues toxiques
C’est l’heure du rendez-vous Focus ! Cette semaine, Alice Pallot revient sur Algues Maudites, un projet aux frontières de la science et...
20 septembre 2023   •  
Écrit par Lou Tsatsas
La deuxième édition de Photoclimat ouvre ses portes ! 
© Manon Lanjouère
La deuxième édition de Photoclimat ouvre ses portes ! 
Située dans divers lieux de plein air, la biennale sociale et environnementale de photographie Photoclimat met en lumière...
14 septembre 2023   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Les images de la semaine du 25.09.23 au 01.10.23 : intimités plurielles 
© Brea Souders
Les images de la semaine du 25.09.23 au 01.10.23 : intimités plurielles 
Dans le récap' de la semaine, retrouvez les images de Paola Paredes, Pauline Alioua, Francesco Merlini, Fernanda Tafner et Brea Souders !
Il y a 9 heures   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Zuzana Pustaiová joue de l’accordéon avec les stéréotypes 
One I Love You © Zuzana Pustaiová
Zuzana Pustaiová joue de l’accordéon avec les stéréotypes 
Son format intrigue et son contenu attire l’œil, le livre "One Day Every Day" de l’artiste slovaque Zuzana Pustaiová se compose de...
30 septembre 2023   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Prix IWPA 2023 : une édition marquée par l’engagement des lauréates
© Lee-Ann Olwage
Prix IWPA 2023 : une édition marquée par l’engagement des lauréates
Cette année, 1870 autrices venues de 116 pays différents ont candidaté au Prix IWPA. Un succès retentissant pour l’événement souhaitant...
29 septembre 2023   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Erli Grünzweil objets et  histoires farfelues
© Erli Grünzweil
Erli Grünzweil objets et histoires farfelues
Installé à Vienne, Erli Grünzweil compose en images ce qu’il conçoit comme son « monde intermédiaire ». Un lieu incertain, où « tout est...
29 septembre 2023   •  
Écrit par Ana Corderot