Charles Delcourt et Florent Bardos, nos coups de cœur #277, capturent des territoires. Le premier documente un village atypique du Kosovo, et le second déconstruit l’imaginaire glamour de la Côte d’Azur.
Charles Delcourt
Architecte paysagiste de formation, Charles Delcourt met son sens aigu de la composition au service de la photographie. Après avoir documenté le quotidien des habitants de l’île d’Eigg, en Écosse, l’un des rares territoires autogérés de notre planète, l’auteur, accompagné par la journaliste Clémence de Blasi, s’est intéressé à Kukavicë, petit village du Kosovo. « Il s’agit de l’État le plus jeune du monde », rappelle-t-il. Situé à 22 kilomètres de la capitale, Pristina, le hameau est entouré de plaines montagneuses. Un territoire perdu en pleine nature qui attire pourtant une population atypique. « En 2009, l’acteur Bislim Muçaj s’y installe pour tourner le film Les ânes de la frontière. Il est vite rejoint par l’équipe de tournage et le réalisateur, Fadil Hysaj, qui n’en repartira jamais », raconte Charles Delcourt. « En 2011, le réalisateur construit dans un champ un amphithéâtre de 700 places, et inaugure un festival gratuit. Un millionnaire fou y fait quant à lui construire un château délirant », poursuit-il. Véritable concentré artistique, le village grandit, accueillant des habitants qui délaissent la capitale. Un espace magique et privilégié, érigeant des ponts entre les cultures serbes et albanaises et leurs traditions communes, disparues depuis la guerre.
© Charles Delcourt
Florent Bardos
Diplômé de l’IJBA, école de journalisme de Bordeaux, Florent Bardos, 24 ans, partage son temps entre la photographie d’actualité et des projets plus personnels. « Je me suis tourné vers le 8e art à 15 ans, pour capturer mes amis skaters, à Monaco. Mais c’est finalement en 2016 que je me suis vraiment intéressé au médium – en shootant mes proches à l’argentique », explique-t-il. La Plage, série insolite et ensoleillée, est le fruit d’un trajet quotidien, en bord de mer à Menton. « Je marchais environ 20 minutes le long de cette plage pour aller et rentrer du bureau. J’ai commencé à prendre mon boîtier avec moi, pour photographier les gens que je croisais. Je continue aujourd’hui toujours cette série lorsque je descends sur la Côte d’Azur », précise-t-il. Prises au flash, les images donnent au paysage une dimension irréelle, insolite. La lumière du soleil se fait aveuglante, et “brûle” les clichés. Inspiré par l’œuvre de Martin Parr, Florent Bardos transforme cet environnement en un théâtre amusant. « J’aime beaucoup le regard que cet auteur porte sur ses sujets. Il reste empathique, tout en captant l’absurdité de certaines situations et l’étrangeté de nos comportements. Je voulais sortir de l’imaginaire glamour de la Côte d’Azur, et montrer sa dimension plus populaire – celle qui privilégie la plage publique à la privée », confie le photographe. Un travail d’une tendre légèreté.
© Florent Bardos
Image d’ouverture : © Florent Bardos