Les coups de cœur #528 : Mélodie Roulaud et LickieMcGuire

20 janvier 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les coups de cœur #528 : Mélodie Roulaud et LickieMcGuire
© LickieMcGuire
Chimigramme de la biodiversité d'un estran
© Mélodie Roulaud

Mélodie Roulaud et LickieMcGuire, nos coups de cœur de la semaine, se livrent toutes deux à une pratique photographique ayant trait à l’archive. La première documente la vie d’un estran de Saint-Malo tandis que la seconde compose un journal visuel.

Mélodie Roulaud

« Après avoir étudié pendant plusieurs années la représentation du corps, particulièrement dans le contexte de la mode, j’ai ressenti une envie profonde de travailler avec des éléments naturels, confie Mélodie Roulaud. Cette nouvelle orientation s’inscrit dans une réflexion de longue date, cherchant à développer des projets qui permettraient d’être dans la nature et d’explorer des lieux comme la plage du Sillon, à Saint-Malo. » Intertidal est né de ce besoin de changement éprouvé par la photographe de commande. Pour réaliser cette série, celle-ci a puisé dans son approche du regard féminin afin de sonder la relation que les êtres entretiennent avec leur environnement. Les images suivent alors le cycle des marées, qui rythme l’existence au sein de ce territoire. Avec délicatesse, les monochromes donnent à voir les activités humaines qui prennent place lorsque la mer se retire : des promenades sans but, des quêtes de trésors comme des recherches scientifiques. « Ils révèlent comment la plage devient un espace de guérison émotionnelle et de révérence spirituelle, de découverte et de contemplation », explique l’autrice. Dans un mouvement collaboratif porté par le hasard et les procédés techniques, la biodiversité côtière apparaît quant à elle sur des chimigrammes et des photogrammes. « Les matériaux organiques interagissent directement avec les surfaces photosensibles, créant leurs propres “autoportraits” et offrant un dialogue imaginé avec les expériences humaines. Ces empreintes révèlent une dimension cosmique inattendue, transformant le paysage terrestre en paysage céleste », assure-t-elle. En un regard, l’estran prend ainsi la forme d’une toile vierge sur laquelle nous pouvons projeter les réalités qui sont les nôtres, nos préoccupations comme nos rêveries d’un monde en perpétuel changement.

Pièces entourées d'aluminium dans un estran
© Mélodie Roulaud
Personne se promenant au bord d'un estran
© Mélodie Roulaud
Chimigramme de la biodiversité d'un estran
© Mélodie Roulaud
Panier de course rempli d'algues
© Mélodie Roulaud
Chimigramme de la biodiversité d'un estran
© Mélodie Roulaud
Femme rousse et tatouée allongée sur un lit
© LickieMcGuire

LickieMcGuire

« Mon approche vient de la peur de rater quelque chose de sublime dans le banal », commence celle qui se fait surnommer LickieMcGuire. Installée à Bruxelles, la photographe s’est prise de passion pour le médium à l’adolescence. Elle se plaisait alors à découvrir les clichés conservés dans les greniers poussiéreux. « J’adorais le fait de les extraire de l’oubli et de retrouver des visages, des objets qui m’étaient totalement inconnus, mais dont la mémoire subsistait. Cela a éveillé mon intérêt pour la conversation personnelle et l’archivage, et ce qui deviendrait ma pratique », déclare-t-elle. De fait, cet attrait l’a également poussée à prendre l’habitude, à son tour, d’immortaliser son quotidien. Chaque évènement s’impose dès lors comme un moment singulier qu’il convient de figer et sa petite-amie se fait muse ou fil conducteur d’une époque. « Pour moi, l’enjeu principal est de revenir avec des photographies qui revêtent un sentiment spécial, nous explique-t-elle. Elles me rappellent à la fois des sensations, des souvenirs, mais aussi me rassurent puisqu’elles rendent impossible l’oubli. » Assemblées selon les formes ou les couleurs qu’elles présentent, les images rendent compte d’une ambiance et racontent ainsi des bribes d’existence dans lesquelles le sujet s’efface toujours au profit des lieux ou des circonstances. « Je ne sais pas si mes tirages sont intrinsèquement queer, je ne cherche pas forcément à ce qu’ils soient lus comme tels. Cependant, dans certains d’entre eux, je retrouve un peu de violence, un peu de mélancolie… Cela pourrait paraître pessimiste, mais ces composantes font partie intégrante de ces réalités, donc je raconte peut-être quelque chose de nos histoires, mais je n’en ai pas la prétention », conclut notre interlocutrice. 

Jambes d'un couple assis dans un jardin
© LickieMcGuire
Une petite fiole se trouve au pied d'une personne qui porte un pantalon noir pailleté
© LickieMcGuire
Femme assise sur une tombe, dans un cimetière
© LickieMcGuire
Habitacle d'une voiture
© LickieMcGuire
À lire aussi
Les coups de cœur #527 : Éloi Ficat et Vincent Binant
© Éloi Ficat
Les coups de cœur #527 : Éloi Ficat et Vincent Binant
Éloi Ficat et Vincent Binant, nos coups de cœur de la semaine, nous emmènent dans leur promenade lyrique à travers les paysages perdus et…
13 janvier 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les coups de cœur #526 : Rhoda Tchokokam et Emmanuelle Firman
© Rhoda Tchokokam
Les coups de cœur #526 : Rhoda Tchokokam et Emmanuelle Firman
Rhoda Tchokokam et Emmanuelle Firman, nos coups de cœur de la semaine, redonnent vie à des fragments d’existence. La première les…
06 janvier 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Explorez
Issei Suda, chroniqueur d’un Japon entre deux mondes
© Issei Suda
Issei Suda, chroniqueur d’un Japon entre deux mondes
Le Centre de la photographie de Mougins présente, jusqu'au 8 juin 2025, une exposition sur le photographe japonais iconique Issei Suda.
29 avril 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Stefan Dotter, dans le sillage des femmes de la mer
© Stefan Dotter
Stefan Dotter, dans le sillage des femmes de la mer
Photographe allemand installé à Tokyo, Stefan Dotter signe, avec Women of the Sea, une immersion sensible au cœur d’une tradition...
25 avril 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
11 séries photographiques qui mettent le Brésil à l’honneur
© Alice Quaresma
11 séries photographiques qui mettent le Brésil à l’honneur
L’année 2025 est marquée par la saison France-Brésil. Ce programme a pour ambition de renforcer les liens entre les deux pays en nouant...
23 avril 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Les coups de cœur #540 : Rosalie Kassanda et François Dareau
© Rosalie Kassanda
Les coups de cœur #540 : Rosalie Kassanda et François Dareau
Nos coups de cœur de la semaine, Rosalie Kassanda et François Dareau, arpentent les rues du monde en quête de quelques étonnements et...
21 avril 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Bienal’25 Fotografia do Porto : bâtir dès maintenant le monde de demain
© Claudia Andujar & A Luta Yanomami
Bienal’25 Fotografia do Porto : bâtir dès maintenant le monde de demain
La Bienal’25 Fotografia do Porto se tiendra du 15 mai au 29 juillet prochain. Cette année, la thématique « Tomorrow Today » traverse les...
01 mai 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Prix Mentor : Au hasard des rencontres
Heidie et Gaëtan. © Émeline Sauser
Prix Mentor : Au hasard des rencontres
Grande gagnante de la finale du prix Mentor à Paris en décembre dernier, Émeline Sauser est de nouveau sur les routes pour poursuivre sa...
01 mai 2025   •  
Écrit par Gwénaëlle Fliti
Focus #77 : La dysmorphophobie vue par Flore Prébay
05:16
Focus #77 : La dysmorphophobie vue par Flore Prébay
Après une pause bien méritée, Focus revient, ce mois-ci, avec un épisode dédié à Flore Prébay et sa série Illusion. Un travail pictural à...
30 avril 2025   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Pôle Nord, corgis et plongeuses japonaises : nos coups de cœur photo d’avril 2025
Images issues de Midnight Sun (Collapse Books, 2025) © Aliocha Boi
Pôle Nord, corgis et plongeuses japonaises : nos coups de cœur photo d’avril 2025
Expositions, immersion dans une série, anecdotes, vidéos… Chaque mois, la rédaction de Fisheye revient sur les actualités photo qui l’ont...
30 avril 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet