Les grillons ouvrent la voix

09 décembre 2021   •  
Écrit par Finley Cutts
Les grillons ouvrent la voix

Saviez-vous que l’élevage de grillons est une tradition particulièrement populaire en Chine ? À coups de flash et d’images colorées, Laurence Kubski s’est plongée dans l’histoire de ce curieux animal de compagnie. Cet article est à retrouver dans notre dernier numéro.

En Chine, au croisement d’une rue, sur les marchés locaux, dans la foule ou à l’abri des regards, vous n’avez qu’à tendre l’oreille pour entendre une curieuse chanson. Une musique étincelante accompagnant tous les gestes du quotidien. Un cricri aigu qui pulse le tempo des chaleurs estivales. Cet hymne – presque national – n’est nul autre que la stridulation du grillon. Curieux animal de compagnie, cet insecte occupe une place majeure dans la culture chinoise. Porte-bonheur vivant, mais également animal de combat, cette bestiole a suscité la fascination de la photographe suisse Laurence Kubski. « Garder un grillon pour l’entendre chanter est une tradition qui s’est développée il y a plus de 1 500 ans dans toutes les classes de la société », explique la photographe. D’abord simples compagnons, on a fait combattre ces insectes sous la dynastie Song, entre 960 et 1279. Ensuite interdits pendant la Révolution culturelle (1966-1976) car considérés comme un passe-temps bourgeois, les élevages reviennent à la mode aujourd’hui sous l’impulsion d’une génération de retraités qui cherchent à redécouvrir leur héritage culturel. Et avec de belles cages en bois sculptées à la main, des filets aux couleurs personnalisées, et même des arènes de combat futuristes, le retour de cette culture s’accompagne de tout un attirail d’objets développés spécifiquement autour de cet univers au fil des siècles.

© Laurence Kubski© Laurence Kubski

En immersion totale, avec un grillon chanteur dans la poche, Laurence Kubski s’est plongée dans cette tradition. Un baptême qu’elle retrace dans Crickets, un récit documentaire à l’allure de mythe oriental. « Je me suis rendue en Chine, en commençant par le plus grand marché d’insectes du pays. J’ai ensuite suivi des chasseurs de grillons dans la pénombre des champs de maïs. J’ai même rencontré des membres de la mafia achetant pour des millions de yuans certains grillons », poursuit-elle. Coutume chérie et madeleine de Proust, ce loisir apparaît avant tout comme le moteur d’un immense marché noir. Comme dans la petite bourgade de Sidian, dans la province du Shandong – surnommée « capitale des grillons » –, où la plupart des hommes prennent congé de leur tra- vail l’été afin de se consacrer pleinement à la chasse. L’argent gagné par la vente des grillons dépassant largement leur salaire habituel. Pour quelle raison ? L’immense industrie de paris clandestins autour des combats ! « Car si les combats de grillons sont pour l’instant tolérés en Chine, les paris d’argent ne le sont pas. Or tous les aficionados que j’ai rencontrés l’ont admis : les combats sans paris sont ennuyeux… »,  conclut Laurence Kubski. 

 

Cet article est à retrouver dans Fisheye #50, disponible ici

© Laurence Kubski

© Laurence Kubski© Laurence Kubski

 

© Laurence Kubski© Laurence Kubski

 

© Laurence Kubski© Laurence Kubski

 

© Laurence Kubski

 

© Laurence Kubski© Laurence Kubski

 

© Laurence Kubski

© Laurence Kubski

Explorez
Delphine Gatinois capture les feux de la vallée de Thann
© Delphine Gatinois
Delphine Gatinois capture les feux de la vallée de Thann
Fruit d’une résidence dans la vallée du Thann, en Alsace, la série Passer l’hiver de Delphine Gatinois s’attache à documenter la...
24 janvier 2025   •  
Écrit par Hugo Mangin
L'exubérance artistique au cœur du rebranding de Jaguar
© Campbell Addy et Yagamoto. Strikethrough Convention. Vue d'exposition.
L’exubérance artistique au cœur du rebranding de Jaguar
Le soir du 2 décembre 2024, à l’occasion de l’Art Week Miami, Jaguar révélait au monde sa nouvelle voiture conceptuelle, Type 00, et le...
23 janvier 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les mystères de Weegee
Collection Galerie Berinson, Berlin © Weegee Archive / International Center of Photography, New York.
Les mystères de Weegee
Pour ses cinquante ans, l’International Center of Photography (ICP) de New York a organisé une exposition dans laquelle ont été...
23 janvier 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
La sélection Instagram #489 : chambre vermeille
© Maša Stanić / Instagram
La sélection Instagram #489 : chambre vermeille
La couleur rouge a une place toute particulière en photographie. Dans les laboratoires de tirages, elle éclaire la pénombre et révèle...
14 janvier 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Pour sa première exposition, la galerie Oana Ivan rend hommage à Peter Knapp
Paris, Ungaro, broderie Jakob Schläpfer, Stern, 1967 © Peter Knapp, Courtesy de l’artiste et de Oana Ivan Gallery
Pour sa première exposition, la galerie Oana Ivan rend hommage à Peter Knapp
La galerie Oana Ivan a ouvert ses portes avec Compte à rebours, 2024-1960, une rétrospective inaugurale consacrée à Peter Knapp. Jusqu’au...
Il y a 3 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Jean-Michel André : les ténèbres dans la lumière
© Jean-Michel André. Chambre 207
Jean-Michel André : les ténèbres dans la lumière
Dans cet essai visuel relevant à la fois de la reconstitution documentaire et de l’autofiction, Jean-Michel André voyage sur les traces...
Il y a 8 heures   •  
Écrit par Gwénaëlle Fliti
Focus : emprise, kidnapping et fulguration
© Anna Szkoda
Focus : emprise, kidnapping et fulguration
Créé par les équipes de Fisheye, Focus est un format vidéo innovant qui permet de découvrir une série photo en étant guidé·e par la...
29 janvier 2025   •  
Dans Fisheye, les photographes dessinent le Royaume-Uni de demain
© Theo McInnes
Dans Fisheye, les photographes dessinent le Royaume-Uni de demain
Enjeux sociétaux, crise environnementale, représentation du genre… Les photographes publié·es sur Fisheye ne cessent de raconter, par le...
29 janvier 2025   •  
Écrit par Marie Baranger