Retour à la terre

23 mars 2018   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Retour à la terre

Avec Terres Basses, Gabrielle Duplantier signe un ouvrage personnel, une brèche intime. Composé d’images en noir et blanc, son livre nous emporte dans un monde poétique, porté par le deuil.

Le nouveau livre de Gabrielle Duplantier est composé de photos prises depuis 2014. Si la photographe n’a pas pour habitude de penser en séries, ici, les images rassemblées lui parlent, et déroulent un récit commun. Terres Basses naît alors, un livre profondément sensible et douloureux. « J’ai perdu ma mère, lorsque j’ai commencé à prendre ces photos », confie-t-elle. « Une part de mon monde affectif s’est alors effondré ». Le deuil est présent sur les pages, dans chaque photo privée de couleur.

Le titre, Terres Basses, est inspiré d’un morceau composé par son frère, intitulé Low Lands. « Il évoque le voyage d’une âme dans les airs, en liberté absolue », précise Gabrielle, une pensée affectueuse à leur mère. Ce titre donne de la force à la photographe. Pour elle, il devient synonyme de réconfort, une sensation chaleureuse, trouvée cette fois loin du ciel, au ras du sol. La terre est la protagoniste du livre. Qu’elle transparaisse dans la nature boisée où qu’elle devienne planète, abritant des hommes, elle contrôle le récit, et lui impose son calme, sa sérénité. Dans Terres Basses, l’urbain est absent, et le retour aux sources semble laver les blessures.

L’image a la parole

Les mots sont absents du livre de Gabrielle, comme un hommage silencieux à l’image. « Les explications ne sont pas nécessaires, sans elles, le sens se brouille, et les images hurlent seules. La photographie est un langage en soi, qui peut aisément se passer de mots », explique-t-elle. En interdisant à ceux-ci de dénaturer ses photos, l’artiste garde le contrôle son histoire. Ici, tout est question d’émotion. Les noir et blanc évoquent à la fois la tristesse et la dépossession. « Cela ne me gêne pas », affirme la photographe. « Au contraire, il n’est alors question que de lumière, de lignes, de sensations et de symboles. » Portés par cet univers décoloré, les clichés se teintent de nostalgie. Chaque portrait laisse deviner une histoire et chaque paysage semble renvoyer à l’enfance. « Il y a la maison, les refuges, des lieux désolés… Les enfants qui grandissent autour, les gens de ma vie, ceux que j’ai croisés… Ce sont eux, et les paysages autour qui incarnent l’émotion que j’ai en moi ». Fiction ou autobiographie, l’ouvrage muet de Gabrielle raconte avec brio son histoire poignante.

© Gabrielle Duplantier

© Gabrielle Duplantier

© Gabrielle Duplantier

© Gabrielle Duplantier© Gabrielle Duplantier

© Gabrielle Duplantier© Gabrielle Duplantier

© Gabrielle Duplantier

© Gabrielle Duplantier© Gabrielle Duplantier© Gabrielle Duplantier

Terres Basses, Édition Lamaindonne, 36 €, 144 p.

© Gabrielle Duplantier

Explorez
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
© Sara Lepore / Instagram
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
La maison se fait à la fois abri du monde et porte vers le dehors, espace de l’intime et miroir de nos modes de vie. Les artistes de...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
5 coups de cœur qui témoignent d'un quotidien
I **** New York © Ludwig Favre
5 coups de cœur qui témoignent d’un quotidien
Tous les lundis, nous partageons les projets de deux photographes qui ont retenu notre attention dans nos coups de cœur. Cette semaine...
15 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les images de la semaine du 8 septembre 2025 : amour et déplacements
Couldn't Care Less © Thomas Lélu et Lee Shulman
Les images de la semaine du 8 septembre 2025 : amour et déplacements
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, l’amour et les déplacements, quels qu’ils soient, ont traversé les pages de Fisheye. Ceux-ci se...
14 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Arpita Shah et la transmission des récits féminins
© Arpita Shah
Arpita Shah et la transmission des récits féminins
À travers sa série Nalini, la photographe indo-britannique Arpita Shah explore l’histoire de sa famille et des générations de...
12 septembre 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Jet Siemons : combien de temps faudra‑t‑il pour qu’on m’oublie ? 
© Jet Siemons
Jet Siemons : combien de temps faudra‑t‑il pour qu’on m’oublie ? 
Dans Hannie & Billo – The Trail Project, Jet Siemons retrace la trajectoire d’un couple, Hannie et Billo, à partir d’un album photo...
Il y a 2 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Ekaterina Perfilieva et l'intime au cœur de la fracture
© Ekaterina Perfilieva, Nocturnal Animals
Ekaterina Perfilieva et l’intime au cœur de la fracture
À la fois distante et profondément engagée, Ekaterina Perfilieva, artiste multidisciplinaire, interroge une contemporanéité...
17 septembre 2025   •  
Écrit par Milena III
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
© Valérie Belin
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
L’heure des rencontres « 7 à 9 de Chanel » au Jeu de Paume a sonné. En cette rentrée, c’est au tour de Valérie Belin, quatrième invitée...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Ana Corderot
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
© Sara Lepore / Instagram
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
La maison se fait à la fois abri du monde et porte vers le dehors, espace de l’intime et miroir de nos modes de vie. Les artistes de...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot