Avec Warn’d in Vain et Back to Nowhere, deux ouvrages complémentaires illustrant ses voyages à New York et en Crète, le photographe grec Charalampos Kydonakis réinvente la street photography et dévoile ses visions cauchemardesques.
« Je n’aime pas être “enterré” sous un style, qu’il soit street, documentaire ou encore paysage. Je réalise tout simplement des photos sales »,
déclare Charalampos Kydonakis, plus connu sous le pseudonyme de Dirtyharrry. Architecte de formation, cet artiste crétois a acheté son premier boîtier argentique en 1997, avant de se tourner vers le numérique en 2008. Il partage depuis, sur son « dirty blog », ses errances cauchemardesques dans des lieux sans repère. Séries – et livres – complémentaires, Warn’d in Vain et Back to Nowhere font le récit de deux expériences de voyages uniques. « La première représente le vagabondage d’un étranger dans la ville la plus photographiée du monde – New York – et la seconde dévoile ma vision de la Crète, cette île que jamais je ne pourrais percevoir à la manière d’un étranger », explique l’artiste.
Créations chimériques
Imprégnées d’une énergie macabre, les images des deux ouvrages se fondent dans une mise en scène similaire. Le flash éclaire des détails étranges, effrayants, et les trainés laissées par les hommes, les objets, évoquent des fissures surnaturelles. « Si les deux environnements sont différents, ces projets ont été shootés par une même personne, conservant les mêmes souvenirs et les mêmes agonies », prévient Charalampos Kydonakis. Poussé par sa grande curiosité, il traverse les villes, les pays, à la recherche de l’inconnu, s’immisçant dans les quartiers emblématiques des métropoles, ou les paysages nocturnes et sauvages. « Je ne veux pas rater la moindre occasion de découvrir un endroit, qu’il soit lointain ou voisin », précise-t-il.
Dans ce chaos visuel, on devine l’amour du photographe pour le surréalisme et le cinéma d’avant-garde. Au cœur des clichés, les volutes mystérieuses et créations chimériques rappellent les tableaux hallucinatoires du peintre et sculpteur Max Ernst, qui, comme le photographe, transformait le réel en rêves éveillés. En plongeant au cœur de cet univers tumultueux, la notion de familiarité s’estompe. Où nous trouvons-nous ? Dans les rues grouillantes d’une ville américaine ? Au bord de la mer Égée ? Ou dans l’imaginaire sans limites d’un artiste fou ? À travers ces scènes oniriques, les silhouettes des lieux se métamorphosent et projettent leurs ombres sur nos certitudes.
Warn’d in Vain et Back to Nowhere, autopublication, 160 pages chacun
© Charalampos Kydonakis