L’Australie : quand la chance vous sourit

11 octobre 2019   •  
Écrit par Lou Tsatsas
L’Australie : quand la chance vous sourit

Lauréat de la Carte Blanche étudiants organisée par Paris Photo, Chris Hoare y exposera The worst poem in the universe, un projet réalisé en Australie, interrogeant la notion de chance au cœur d’un pays complexe, hanté par ses richesses et ses inégalités.

C’est à 17 ans, en découvrant les chambres noires de son école d’art, que Chris Hoare a débuté sa relation avec la photographie. Le jeune auteur, installé à Bristol, n’a depuis plus jamais quitté son boîtier. « J’ai toujours réalisé des documentaires, j’essaie de raconter des histoires avec mes images, et le portrait joue un rôle conséquent dans chacun de mes projets », explique-t-il. Son esthétique évolue lorsqu’il se plonge dans The worst poem in the universe, un travail conséquent entamé en 2015 et terminé en 2019. Ses images se transforment alors en un récit, organisé à la manière d’un script de film ; un conte cinématographique aux nombreuses influences.

En 2014, Chris Hoare découvre le Hip-hop aborigène, et se passionne pour la culture australienne. Il s’y rend l’année suivante durant un mois, tentant de capturer l’effervescence de ce mouvement. « Mais je me suis lassé de mon langage photographique – je shootais alors un reportage en numérique, confie-t-il. J’ai rapidement réalisé que je manquais considérablement de temps pour traiter ce sujet d’une manière satisfaisante. » En parallèle du périple, le photographe se plonge dans un ouvrage de Donald Home appelé Lucky Country, explorant la notion de chance en terres australiennes. Un thème qui l’intrigue et l’inspire, le poussant dès son retour à s’envoler de nouveau pour s’installer dans le pays une année entière. « J’ai traversé l’espace d’un bout à l’autre. Puis j’ai économisé pour un ultime voyage, me permettant de m’attarder sur Sidney et la Gold Coast », ajoute-t-il. Une immersion totale dans ce lieu fascinant, qui lui fait oublier les frustrations des premières esquisses et le plonge dans un nouveau projet.

© Chris Hoare© Chris Hoare

Fantasmes et réalités

L’ouvrage de Donald Home, publié en 1964 s’affirme comme une critique du pays et de ses habitants. Pourtant, l’adage « lucky country » est devenu populaire en Australie, où le livre a rencontré un grand succès. Les plages de sable fin, l’incroyable diversité de la faune et flore, l’attitude décontracté des Australiens évoquent un paradis terrestre utopique. Un territoire abondant et riche, aux ressources illimitées. « Après avoir passé quelque temps là-bas, il m’a paru évident que ce mode de vie n’est pas accessible à tous. Les populations aborigènes vivent en marge de cette société, et les Australiens sont reconnus pour être des joueurs compulsifs, perdant leurs économies dans des paris », confie Chris Hoare, qui s’est également intéressé au personnage de Gina Rinehart, une milliardaire australienne, auteure de Our Future, désigné « pire poème de l’univers » par une journaliste. Une œuvre dénigrant la campagne anti-minière du gouvernement. « J’étais fascinée par son histoire – elle a hérité de l’industrie minière de son père, de sa richesse et de son influence – et je me suis interrogé sur son rapport à la chance », précise le photographe. Aussi absurde que charismatique, la PDG devient une parfaite protagoniste, soulignant les contrastes entre fantasme et réalité, désinvolture et inégalité.

Avec The worst poem in the universe, Chris Hoare tisse des liens entre ses personnages, et développe un récit complexe. Ses palettes de couleurs soigneusement travaillées et ses monochromes poétiques illustrent à la fois le charme et les contrastes de l’Australie. « C’est un endroit magnifique, qui peut parfois être considéré comme une terre d’opportunité, mais il est clair que ce pays est plus complexe qu’il n’est souvent représenté », déclare le photographe. En jouant sur les mots et les apparences, il donne à voir un espace tout en nuance, révélant la discrimination et l’injustice, comme l’insouciance et la splendeur.

© Chris Hoare© Chris Hoare
© Chris Hoare© Chris Hoare
© Chris Hoare© Chris Hoare
© Chris Hoare© Chris Hoare
© Chris Hoare© Chris Hoare
© Chris Hoare© Chris Hoare

© Chris Hoare

Explorez
Stefan Dotter, dans le sillage des femmes de la mer
© Stefan Dotter
Stefan Dotter, dans le sillage des femmes de la mer
Photographe allemand installé à Tokyo, Stefan Dotter signe, avec Women of the Sea, une immersion sensible au cœur d’une tradition...
À l'instant   •  
Écrit par Cassandre Thomas
11 séries photographiques qui mettent le Brésil à l’honneur
© Alice Quaresma
11 séries photographiques qui mettent le Brésil à l’honneur
L’année 2025 est marquée par la saison France-Brésil. Ce programme a pour ambition de renforcer les liens entre les deux pays en nouant...
23 avril 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Les coups de cœur #540 : Rosalie Kassanda et François Dareau
© Rosalie Kassanda
Les coups de cœur #540 : Rosalie Kassanda et François Dareau
Nos coups de cœur de la semaine, Rosalie Kassanda et François Dareau, arpentent les rues du monde en quête de quelques étonnements et...
21 avril 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
12 expositions photographiques à découvrir en avril 2025
© Delali Ayivi
12 expositions photographiques à découvrir en avril 2025
L’arrivée du printemps fait également fleurir de nombreuses expositions. Pour occuper les journées qui s’allongent ou les week-ends...
18 avril 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Stefan Dotter, dans le sillage des femmes de la mer
© Stefan Dotter
Stefan Dotter, dans le sillage des femmes de la mer
Photographe allemand installé à Tokyo, Stefan Dotter signe, avec Women of the Sea, une immersion sensible au cœur d’une tradition...
À l'instant   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Kyotographie : cap sur Kyoto, où l’image devient territoire
© Mao Ishikawa
Kyotographie : cap sur Kyoto, où l’image devient territoire
Direction le Japon, plus précisément Kyoto, où le festival Kyotographie, fondé en 2013 par Lucille Reyboz et Yusuke Nakanishi, explore...
Il y a 4 heures   •  
Écrit par Fabrice Laroche
Fotografia Europea : l'âge des possibles, entre rêves et révoltes
© Vinca Petersen
Fotografia Europea : l’âge des possibles, entre rêves et révoltes
Jusqu'au 8 juin 2025, la ville de Reggio Emilia accueille la 20e édition de Fotografia Europea, un festival qui, cette année, se penche...
24 avril 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Kayla Connors : Ô monde réel
© Kayla Connors
Kayla Connors : Ô monde réel
Puisant son inspiration dans le cinéma, Kayla Connors s’empare des codes de la mode pour conter des histoires singulières, ancrées dans...
24 avril 2025   •  
Écrit par Ana Corderot