L’exposition Martine Franck inaugure les nouveaux espaces de la Fondation Henri Cartier-Bresson. Une première rétrospective du travail de cette artiste belge, guidée par son empathie.
Les nouveaux espaces de la Fondation Henri Cartier-Bresson ont ouvert leurs portes le 6 novembre dernier. Lumineux, le lieu accueille les visiteurs dans une cour intérieure qui donne sur « les perles des archives », des photographies légendées, affichées sur les murs. Un ornement qui attire les regards des passants, et leur donne un aperçu de l’œuvre des photographes mis en avant à la Fondation.
Dans la grande salle d’exposition, pensée spécialement pour accueillir et sublimer des photos – aucun reflet ne vient ternir la beauté de l’image -, trônent les clichés de Martine Franck, femme de Cartier-Bresson, décédée en 2012. La scénographie est sobre, mais élégante. Elle convient à merveille à la simplicité, la délicatesse des œuvres de l’artiste. Portraits et paysages se répondent, et mettent en exergue les deux facettes de Martine : la photographe de l’instant, et l’observatrice, plus patiente. « Henri Cartier-Bresson continuait à déclarer qu’elle n’était pas faite pour le trottoir, et brillait dans ses compositions plus contemplatives », confie Agnès Sire, commissaire de l’exposition, et directrice artistique de la Fondation.
Une gentillesse séduisante
Cette exposition s’impose comme la première rétrospective dédiée à Martine Franck. Le parcours, pensé comme une chronologie, nous accompagne et met en lumière l’évolution de la photographe, de ses portraits à ses compositions plus abstraites. Pourtant, parmi la vaste sélection d’images, la compassion de l’artiste lie les époques. « Elle possède la même empathie pour une jeune fille qui pleure De Gaulle que pour ce vieil homme, qui s’oppose au mouvement Mai 68 », remarque Agnès Sire, devant des clichés de manifestations, en France. « Elle était évidemment très partisane et militante, mais son respect pour les gens était si grand que son altruisme se manifestait toujours », ajoute-t-elle.
Dans les différents recoins de la salle, défilent à tour de rôle des portraits de personnes âgées, de personnalités – David Goldblatt, Saul Leiter, et même son mari – mais aussi d’enfants bouddhistes, vivant dans des monastères dans l’attente de devenir lama. « La notion d’offrir un regard était très important pour elle », précise Agnès. « S’il ne se passe rien entre elle et son modèle, alors le portrait ne peut être bon ». C’est donc cette complicité particulière, cette gentillesse séduisante qui habitent les photographies de Martine Franck. Une empathie que l’on retrouve même dans ses clichés les plus récents, des études abstraites autour de la pierre, écho de sa passion pour la sculpture. « Martine me disait “ne t’en fais pas, je vais me fondre dans la nature” », conclut Agnès. Un besoin d’osmose qu’elle recherche même dans son environnement.
© Martine Franck / Magnum Photos