L’âme de la matière

24 décembre 2020   •  
Écrit par Lou Tsatsas
L’âme de la matière

Avec Miner, un travail créatif sur les matières et les minéraux, l’artiste américaine Lindsey Kennedy questionne notre rapport à l’intimité. Une notion mise à mal par un confinement prolongé.

« Je passe par différentes phases, durant lesquelles je suis obsédée par une texture, une palette de couleurs, un effet visuel particuliers. Je passe alors de nombreuses heures sur internet – et dans des friperies – à la recherche d’objets, de pierres, de verres, de fabriques… »

, raconte Lindsey Kennedy.

Fascinée par les matières, la photographe venue de Santa Fe s’enferme, des jours durant, dans son studio à la recherche des bonnes combinaisons. Douceur et rugosité fusionnent dans ses œuvres presque tactiles et questionnent notre rapport au toucher. Drapés dans des tissus de soie ou de velours, les rochers et noyaux de fruits deviennent des trésors étincelants de mille feux. Un univers minéral que l’on retrouve dans Miner, un travail minimaliste autour de la notion d’intimité. « Comme beaucoup de personnes, l’intimité émotionnelle est quelque chose que j’ai subi, que l’on m’a poussée à vivre. Je la perçois comme une monnaie d’échange, que je ne peux jamais vraiment éviter », confie-t-elle.

© Lindsey Kennedy© Lindsey Kennedy

Un répit hors de l’obscurité

Inspirée par la crise sanitaire et le confinement imposé à la population, Lindsey Kennedy s’est interrogée sur les changements que ceux-ci provoquent au cœur des relations. « Tout est devenu assez extrême. Certaines connexions ont ralenti, ou se sont même effacées à cause de la quarantaine. D’autres se sont considérablement accélérés, grandissant dans un manque d’espace. Ces changements, ainsi que notre désir de cultiver l’intimité par l’intermédiaire d’écrans m’ont poussé à me questionner, à tenter de représenter ce voile qui nous enveloppe », raconte l’artiste.

Au cœur de Miner, les minéraux aux bords coupants représentent notre essence : parée de matières luisantes, mais incapable d’en sortir. Les animaux écorchés, quant à eux, évoquent notre liberté, arrachée, mise à terre. En utilisant des tons doux, des textures lisses, la photographe nous propose un répit hors de l’obscurité. Un havre de paix influencé par la folie du monde extérieur et pourtant rassurant. « J’essaie toujours de créer des œuvres tendres. Dernièrement, je pense que cette esthétique est devenue une forme d’apaisement personnel », ajoute-t-elle. Fragile, vulnérable, précieuse, son allégorie de l’intimité nous invite à repenser nos relations et à faire le point sur notre santé mentale.

© Lindsey Kennedy© Lindsey Kennedy
© Lindsey Kennedy© Lindsey Kennedy
© Lindsey Kennedy© Lindsey Kennedy

© Lindsey Kennedy

Explorez
Éléa-Jeanne Schmitter en zone trouble
© Éléa-Jeanne Schmitter
Éléa-Jeanne Schmitter en zone trouble
Die Tore – en allemand, « les portes » – a été publié dans le livre On Death édité par Humble Arts Foundation et Kris Graves Projects...
03 juin 2025   •  
Écrit par Milena III
Les coups de cœur #545 : Rose Guiheux et Maksim Semionov
Melvin and Milan's room, 2024 © Rose Guiheux
Les coups de cœur #545 : Rose Guiheux et Maksim Semionov
Rose Guiheux et Maksim Semionov, nos coups de cœur de la semaine, explorent l’individu dans son rapport à l’autre et à l’espace. Abordant...
02 juin 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Huá biàn : quand la musique se rebelle
Love, de la série Huá biàn © Agathe Veidt
Huá biàn : quand la musique se rebelle
Agathe Veidt saisit la fête et les chants de révolte au cœur d’une boîte de nuit de renom à Shenzhen. De retour en France, elle tricote...
29 mai 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Katrin Koenning et le deuil partagé du vivant
© Katrin Koenning, between the skin and sea / Courtesy of the artist and Chose Commune
Katrin Koenning et le deuil partagé du vivant
Photographe établie en Australie, Katrin Koenning signe between the skin and sea, un livre bouleversant paru chez Chose Commune en 2024....
27 mai 2025   •  
Écrit par Milena III
Nos derniers articles
Voir tous les articles
12 expositions photographiques à découvrir en juin 2025
Vietnam, 1971 © Marie-Laure de Decker
12 expositions photographiques à découvrir en juin 2025
L’arrivée de l'été fait également fleurir de nombreuses expositions. Pour occuper les journées chaleureuses ou les week-ends, entre deux...
05 juin 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
La MAZ recompose la map
© Shai Andrade, Omi Ori, 2022
La MAZ recompose la map
Pensée dans la continuité des Rencontres photographiques de Guyane, la Maison de la photographie Guyane-Amazonie (MAZ) ouvrira ses portes...
05 juin 2025   •  
Écrit par Eric Karsenty
L’image comme manifeste au Moulin Blanchard
Le Beat Hotel, 9 rue Gît-le-Coeur, Chambre 41. Thelma Shumsky, scientifique américaine et son amie suédoise Gun, 1957 © Harold Chapman (TopFoto, Roger Viollet)
L’image comme manifeste au Moulin Blanchard
Le Moulin Blanchard rappelle que l’art peut encore être une arme intime et révoltée. Rien d’exhaustif : soixante ans après la Beat...
04 juin 2025   •  
Écrit par Fabrice Laroche
Les Mesnographies 2025 : la sororité comme cri de ralliement
© Thalía Gochez
Les Mesnographies 2025 : la sororité comme cri de ralliement
Du 7 juin au 14 juillet 2025, le festival Les Mesnographies revient pour une cinquième année dans le parc municipal des Mesnuls. Une...
04 juin 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas