Mary Gelman, photographe et sociologue russe, s’intéresse particulièrement aux relations humaines. Dans sa série Svetlana, elle part à la découverte d’une communauté autonome, composée de personnes souffrant de troubles mentaux.
Alors qu’elle est encore étudiante, Mary Gelman accumule les petits boulots. Cette vie bien remplie la propulse dans un monde en pleine effervescence. « J’assistais à tellement de moments spéciaux, parfois absurdes, parfois miraculeux », se souvient-elle. « Aujourd’hui, je me définis comme une observatrice passionnée ». Son appareil photo toujours à la main, elle tente de comprendre son environnement social. En 2016, au cours de ses recherches, elle découvre Svetlana, un « village social » – une communauté autonome vivant loin du monde moderne – situé dans l’oblast de Leningrad, en Russie. Un lieu créé dans le but d’aider les personnes souffrant de troubles mentaux. « Le village leur donne l’opportunité de vivre librement, tout en étant aidés par des tuteurs et des volontaires », explique Mary. « Ici, personne n’est contrôlé, et les portes sont ouvertes à tous. Les résidents ne sont pas catégorisés, il n’y a ni « sain », ni « malade », seulement des individus ».
S’intégrer à la communauté
Svetlana est une communauté autonome. La quarantaine de résidents cultive elle-même sa nourriture. Dans ce lieu utopique, les différences sont effacées, et les hommes exercent le métier qu’ils souhaitent, sans interdit. « Dès mon premier séjour là-bas, je suis tombée amoureuse de cet endroit », confie la photographe. Pour elle, le village existe en dehors du monde moderne. Un paradis « qui agrandit notre perception et détruit nos images préconçues du comportement humain ». Lorsqu’elle photographie les habitants de Svetlana pour la première fois, ceux-ci posent et sourient. Pourtant, alors que ses visites deviennent habituelles, la photographe devient l’une des leurs, et capture des instants intimes et tendres. « Nous parlions beaucoup ensemble, et j’ai appris à les connaître », ajoute-t-elle. Svetlana fait partie du mouvement Camphill, inspiré par la philosophie du sociologue autrichien Rudolph Steiner. La communauté représente un refuge, parmi cent autres, installés dans vingt pays différents. « Le mouvement met en lumière le développement d’une communauté à travers l’art et la culture de la terre », précise Mary. Loin des préjugés, les habitants apprennent à se faire confiance, à évoluer ensemble, comme si, coupée du monde, l’intolérance s’effaçait.
© Mary Gelman