Comment donner du sens à la perte d’un être cher ? Avec Borders of Nothingness, Margaret Lansink, photographe néerlandaise, tente de trouver des réponses. Une série métaphorique à fleur de peau, à découvrir durant les Rencontres d’Arles.
Pour Margaret Lansink, la photographie est un art profondément intuitif. Son boîtier l’accompagne dans chaque étape de sa vie, afin d’immortaliser des souvenirs et de combler des vides. « C’est devenu une véritable nécessité, pour moi », explique-t-elle. « Comme si j’avais enfin trouvé un moyen d’exprimer mes émotions ». Lorsque sa fille décide de mettre fin à leur relation, la photographe entreprend un voyage à la fois physique et métaphorique. Durant six semaines de résidence artistique au Japon, elle ressent cette perte d’un être cher, une sensation qui s’empare de tout son corps. Là-bas, elle découvre la philosophie wabi sabi, un courant de pensée visant à accepter les choses telles qu’elles sont, en recherchant la beauté dans l’imperfection. « C’est grâce à cette révélation – que la beauté et la souffrance sont imparfaites et éphémères – que j’ai pu déjouer les pièges de ma propre peur, et m’en séparer temporairement, à la frontière du vide », confie Margaret.
Une introspection salutaire
Sombres, les photographies de l’artiste apparaissent comme des fragments de pensées bruts et douloureux. Les corps nus, en négatif peuplent les clichés, et forment un ensemble à la fois tendre et désordonné. Un panorama des sentiments de la photographe. « Ma série évoque le deuil, de façon cru, mais aussi l’amour infini, la volonté de lâcher prise et l’envie de faire confiance à nouveau », précise-t-elle. Borders of Nothingness s’impose comme un cri sourd, et un témoignage d’affection. « J’ai eu des difficultés à publier cette histoire », confie Margaret. « Ne ferais-je pas de mal à ma fille ? J’ai donc montré les images à mes autres enfants, en leur demandant ce qu’ils ressentaient. Leur réponse unanime a été « de l’amour » ». En produisant cette série à fleur de peau, la photographe s’immerge dans son propre imaginaire. Les images au grain puissant se lisent comme des bribes de souvenirs, un retour vers l’intime et la douceur. Ici, les opposés s’attirent, la perte et la découverte, la douleur et l’amour. En documentant la fin d’une relation, Margaret met en lumière une toute autre émotion : le miracle de la connexion humaine.
© Margaret Lansink