Tina Merandon : les chiens sont lâchés

08 juin 2017   •  
Écrit par Eric Karsenty
Tina Merandon : les chiens sont lâchés

« Violence, barbarie, radicalisation fasciste… Je ressentais depuis plusieurs années une ambiance très proche de l’entre-deux-guerres en Europe, autour de 1930. Une violence sourde ou déclarée, une situation explosive. Mes chiens expriment ce que je ressens », déclare Tina Merandon quand on lui demande l’origine de sa série Les Chiens, réalisée entre 2008 et 2013. La photographe fait partie du dossier de notre dernier numéro, “Bestiaire moderne”.

Ses photos vous sautent littéralement à la gueule, surtout quand on les découvre dans les tirages grand format qu’affectionne la photographe. « Je voulais traduire cette peur, cette violence en images. Une manière de dépasser la narration, de se tourner vers la sensation, d’agir immédiatement sur le spectateur en le touchant par l’instinct, la force émotionnelle », complète-t-elle. Un travail de mise en scène monté avec un dresseur, où l’auteure utilise des flashs et un fond noir qui décontextualisent la situation « pour donner place au rêve ou au cauchemar ».

Extrait de la série Les chiens, France, 2010, © Tina Merandon / Signatures

Dans Anima (2014) et Fratres (2015-2016), c’est le lien entre l’homme et l’animal, la complicité, le côté fusionnel de leur relation, qui est exploré par la photographe. « Pour l’enfant, l’animal est le prolongement de son corps, c’est une sorte d’incorporation indifférenciée qui permet l’invention d’un nouvel être hybride et féerique : l’homme-animal. Les postures, souvent contorsionnées et improbables, qui évoquent la défense, l’hystérie ou le plaisir sont en fait des prolongements de l’animal. Comme si les deux corps n’en faisaient plus qu’un, fragilisant ainsi la frontière entre humanité et animalité », analyse la critique Dominique Baqué. La notion d’animalité et l’image de l’animal sont des constantes qui traversent plusieurs séries de Tina Merandon. « Ce qui m’intéresse, c’est le mimétisme, l’osmose entre l’homme et l’animal, comment l’un imprègne l’autre, et réciproquement. Cela questionne l’identité de l’homme dans une société très virtuelle, très déconnectée, avec en même temps des résurgences tribales et primaires. »

Extrait de la série "Les chiens", France, 2010, © Tina Merandon / Signatures
Extrait de la série “Les chiens”, France, 2010, © Tina Merandon / Signatures
Extrait de la série "Les chiens", France, 2010, © Tina Merandon / Signatures
Extrait de la série “Les chiens”, France, 2010, © Tina Merandon / Signatures
Extrait de la série "Les chiens", France, 2010, © Tina Merandon / Signatures
Extrait de la série “Les chiens”, France, 2010, © Tina Merandon / Signatures
Extrait de la série "Les chiens", France, 2010, © Tina Merandon / Signatures
Extrait de la série “Les chiens”, France, 2010, © Tina Merandon / Signatures
Extrait de la série "Les chiens", France, 2010, © Tina Merandon / Signatures
Extrait de la série “Les chiens”, France, 2010, © Tina Merandon / Signatures
Extrait de la série "Les chiens", France, 2010, © Tina Merandon / Signatures
Extrait de la série “Les chiens”, France, 2010, © Tina Merandon / Signatures

Images extraites de la série “Les chiens”, France, 2010, © Tina Merandon / Signatures

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