Mayssa Mehenni et Raphaël Creton, nos coups de cœur #395 traduisent tous deux en images la sensibilité qui les anime. Voici deux univers emplis d’émotions.
Mayssa Mehenni
Lorsque Mayssa Mehenni a découvert le 8e art, il y a cinq ans, il s’est imposé à elle comme une évidence. Un outil, capable de retranscrire ses émotions, de traduire sa sensibilité avec précision. « J’essaie de faire de la poésie en image. Je capture la nature, le ciel, la mer, les oiseaux, les nuages, le mouvement, la lumière, les matières, les textures… Je m’inspire souvent de concepts philosophiques, de sentiments humains et de mes propres pensées : l’amour, l’amitié, les blessures, l’âme… », confie-t-elle. Étudiante en cinéma, l’autrice de 24 ans développe son œil grâce à ses cours et observe le monde, à la recherche de ce qui la fait vibrer. Privilégiant l’argentique – un outil dont l’absence immédiate de visibilité lui permet de se concentrer sur l’instant et non le résultat – elle pose un regard poétique sur son environnement, et teinte le réel d’une palette féérique. Inspirée par l’émotion brute de Daido Moriyama, les envolées oniriques de Sarah Moon, ou encore les scènes picturales et intemporelles d’Albarrán Cabrera, Mayssa Mehenni poursuit sa quête du beau, du touchant. De l’image non pas « parfaite » mais capable de passer aux regardeur·ses l’étendue de son propre ressenti.
© Mayssa Mehenni
Raphaël Creton
« Je ne crois pas avoir (encore) trouvé ma place dans cet univers. Je crains aussi de quitter ces lieux sans avoir chanté ma chanson. Alors, l’objet, l’appareil photo, me recentre et m’ancre. Il me permet de faire taire le bruit et d’entrer en action, d’avoir une forme de légitimité dans cet espace »,
déclare Raphaël Creton. À 52 ans, le photographe trouve dans son médium de prédilection la force brève et intense d’un Haiku japonais. Une œuvre courte, célébrant « l’évanescence des choses et les sensations qu’elles suscitent ». Privilégiant le rapport à l’autre, il immortalise à l’aide de son boîtier des portraits d’humains qui se démarquent, qui dénotent par leur parcours atypiques. Des mises en scène convoquant la narration, et nous invitant à imaginer les suites des amorces qu’il partage. Et cette créativité, Raphaël Creton la nourrit grâce à une puissante sensibilité. Un panel d’événements, de détails, de figures artistiques qui ne cessent de l’inspirer. Parmi eux ? « La présence de Larry Towell lorsqu’il photographie, la transmutation de mon enfant qui me surprend chaque jour, le mouvement implacable de James Nachtwey, le dessin au trait si maladroit d’Alberto Giacometti, la fragilité du théâtre, la liberté d’un Jack Black écrivain cambrioleur dans Personne ne gagne… », énumère-t-il.
© Raphaël Creton
Image d’ouverture : © Raphaël Creton