« Être à soi » : notre corps, un guide spirituel

02 novembre 2022   •  
Écrit par Lou Tsatsas
« Être à soi » : notre corps, un guide spirituel

Sujets insolites ou tendances, faites un break avec notre curiosité. Jouant avec les techniques atypiques – tirages au thé et aux feuilles d’or – et avec le séquençage, Gaëlle Abravanel parvient avec Être à soi à se réapproprier son corps.

Styliste de mode, directrice artistique, galeriste, photographe plasticienne… Gaëlle Abravanel a vécu plusieurs vies en une. Passionnée par le 8e art depuis de lycée, elle y consacre exclusivement son temps depuis un an, voyant dans la discipline un moyen d’expression libre, permettant de nombreuses expérimentations. « Je n’ai jamais été quelqu’un qui vénérait la pureté de l’argentique. Je suis de celle qui apprécie le dialogue entre les médiums lorsqu’un sujet s’y prête », précise-t-elle.

C’est en redécouvrant une ancienne série réalisée il y a une dizaine d’années et consacrée à ses enfants que l’artiste débute Être à soi. « Sa particularité venait du support utilisé, du fait qu’il s’agissait de reprises de photos, de plans très serrés d’images déjà produites. Il s’en dégageait une sensation fantomatique, comme lorsqu’on interroge ses souvenirs », précise-t-elle. Corps en gros plans, silhouettes sculpturales, décomposées jusqu’à l’abstraction, monochrome pâle évoquant la chair et unifiant chaque détail dans un puzzle organique… Minimaliste et poétique, Être à soi est cette fois-ci dédiée à l’autoportrait. Une manière pour l’autrice de se dévoiler tout en plaçant l’esthétisme au cœur de l’introspection.

© Gaëlle Abravanel© Gaëlle Abravanel

La résilience se situe en son centre

« Il arrive dans la vie d’une femme d’être contrainte de faire une pause, de prendre du recul pour savoir comment vivre les prochaines années. Les enfants deviennent adultes, votre vie sentimentale ne vous satisfait pas, votre vie professionnelle n’est plus en accord avec vos aspirations… J’ai dû puiser mes dernières ressources pour sortir de cette impasse »,

confie Gaëlle Abravanel. Débute alors une collection d’images à l’intimité poignante. Des clichés montrant un instant d’extase, une osmose spirituelle, une exaltation intense – celle de renouer enfin avec soi-même. À ces représentations s’ajoute l’utilisation de feuilles dorées et de thé infusé, donnant aux tirages un caractère précieux et une nuance chaude. « Rien n’aurait été possible sans ce choix de procédé. La sensualité tactile que je donne à voir fait référence à la peau, mais aussi à quelque chose de plus psychologique que cette texture particulière évoque : la fragilité et la force », ajoute la photographe.

Influencée par le concept japonais du Wabi-Sabi – le fait d’accepter et d’être ému·e par l’ordinaire et l’imperfection – ainsi que par l’art du Kintsugi, qui consiste à réparer la porcelaine ou céramique cassée à l’aide d’une laque saupoudrée d’or, l’artiste fait d’Être à soi – dans le cadre de FotoMasterclass, un accompagnement photo de huit mois – une ode à la beauté atypique. À travers des cadrages serrés, elle donne à voir ses formes, sa nudité, avec une sincérité frappante et transforme les courbes des figures harmonieuses et universelles. Un ensemble apaisant répondant à sa volonté de souligner « la quête d’équilibre, l’endurance et l’authenticité », tout en explorant la notion de mémoire du corps. Celle qui s’ancre dans nos membres et fige des instants de douleurs, de peurs, de souffrances. Mais aussi celle qui fait fleurir les émotions les plus pures et marque au fer blanc la réappropriation d’un·e être se perdant dans un monde déroutant. « La société ne cesse de produire des binarismes. Être entière, pour moi, revient justement à casser les codes. Cette quête d’être au plus proche de soi passe par le fait de ne jamais oublier d’être à soi avant tout. La résilience se situe en son centre », conclut Gaëlle Abravanel.

© Gaëlle Abravanel

© Gaëlle Abravanel

© Gaëlle Abravanel

© Gaëlle Abravanel

© Gaëlle Abravanel

Explorez
Les coups de cœur #518 : Cecilia Pignocchi et Emma Corbineau
© Cecilia Pignocchi. Tempo Bello
Les coups de cœur #518 : Cecilia Pignocchi et Emma Corbineau
Cecilia Pignocchi et Emma Corbineau, nos coups de cœur de la semaine, dévoilent un cabinet de curiosités constitué de souvenirs et de...
11 novembre 2024   •  
Écrit par Marie Baranger
Approche 2024 ou l’art de mettre en scène
© Antoine De Winter Courtesy Hangar Gallery
Approche 2024 ou l’art de mettre en scène
Du 7 au 10 novembre 2024, le Salon Approche présente sa 8e édition. Au 40 rue de Richelieu, à Paris, quinze expositions personnelles...
07 novembre 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Paris Photo 2024 : Capitale en ébullition
© Claudia Andujar
Paris Photo 2024 : Capitale en ébullition
Rendez-vous incontournable de la scène photographique internationale, Paris Photo fait son retour au Grand Palais du 7 au 10 novembre....
07 novembre 2024   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Nothing Artificial : la Fisheye Gallery au-delà de ses murs
© Delphine Diallo
Nothing Artificial : la Fisheye Gallery au-delà de ses murs
À l’occasion de Paris Photo, la galerie parisienne de Fisheye amorce son nouveau positionnement en présentant, du 6 au 10...
05 novembre 2024   •  
Écrit par Milena III
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Regards du Grand Paris : six nouveaux noms s’ajoutent à la commande photographique
© Jade Joannès
Regards du Grand Paris : six nouveaux noms s’ajoutent à la commande photographique
Chaque année, six photographes rejoignent la commande nationale Regards du Grand Paris. Comme son nom le suggère, l’initiative entend...
Il y a 3 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Présidentielle américaine : polarisation maximale
Kamala Harris lors de la convention nationale démocrate américaine à Chicago, le 20 août 2024. © Natalie Keyssar pour le New Yorker.
Présidentielle américaine : polarisation maximale
Au cœur de la campagne électorale, les photojournalistes ont le pouvoir de capturer la puissance de l’Histoire, mais aussi de dévoiler...
Il y a 7 heures   •  
Écrit par Fisheye Magazine
La nature infestée de Claudia Fuggetti
Metamorphosis © Claudia Fuggetti
La nature infestée de Claudia Fuggetti
Dans Metamorphosis, Claudia Fuggetti compose les interférences artificielles qui existent entre le monde humain et la nature. Sa...
13 novembre 2024   •  
Écrit par Marie Baranger
Sabatina Leccia et Clara Chichin : au cœur de la ville, un jardin à préserver
© Clara Chichin et Sabatina Leccia / Lucie Pastureau
Sabatina Leccia et Clara Chichin : au cœur de la ville, un jardin à préserver
Jusqu’au 25 janvier 2025, les œuvres de Sabatina Leccia et Clara Chichin se dévoilent sur les cimaises de la Galerie XII. Intitulée Le...
13 novembre 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet