Dans les rues d’Athènes, Marina Nota s’immisce dans les foules en quête d’une réalité cachée. De cliché en cliché se déroule un drôle de fil qui rapproche les êtres en tissant d’étonnants récits. Ses pellicules abondent en anecdotes dont l’une d’elles a laissé en sa mémoire une trace profonde, pareille à une image rémanente. Un jour, alors qu’elle se promenait dans le centre-ville avec un ami, la lentille de son boîtier a croisé le regard d’une femme distinguée, installée à la terrasse d’un café. Les boucles blanches de sa chevelure s’entremêlaient à deux anneaux dorés et ont marqué son esprit. Le lendemain, désormais aux abords d’une gare éloignée, son compagnon lui a murmuré à l’oreille : « Retourne-toi ». Fruit du hasard ou d’un étonnant destin, derrière elle se tenait la muse inconnue. « J’appréhende la rue comme un seul et même organisme vivant. Les moments d’entre-deux créent les connexions qui forment son âme. Je crois que chacun·e de nous est connecté·e aux autres par un lien invisible et fragile dont nous n’avons même pas conscience », argumente-t-elle avec conviction. Comme touchée par les Trois Grâces – ces déesses mythiques du charme, de la beauté et de la créativité –, la photographe a imaginé Grace Unseen, une série aux teintes saturées, comme les métropoles qui l’inspirent. Unie par la paronomase, Grèce et grâce se délestent ainsi de la pesante obscurité pour célébrer, à l’inverse, toute la légèreté de l’être.
© Marina Nota