À travers deux séries, Noires sœurs et Modern Sins, Jules Ferrini plie la lumière et le temps pour faire vibrer l’obscurité d’un noir et blanc réinventé. Entre le ciel noir d’un New York dystopique et les sombres bures de pèlerins orientaux, découverte d’une quête esthétique, exposée dans le cadre de l’exposition arlésienne collective 10/10.
Un visage émerge des plis marmoréens d’une tunique. Il a la blancheur d’une dent de lait, la texture douloureuse d’un plâtre qui s’écaille. Autour de lui, le calme d’un fond noir et les volutes d’un drapé. Entre le monastère de Rila en Bulgarie et la mosquée bleue d’Istanbul, Jules Ferrini a ainsi capturé la foi comme un vêtement qui dissimule les corps et forme les plis mystérieux d’une armure, où ils s’enchâssent, s’enfouissent et disparaissent. Après un début marqué par le photojournalisme, le jeune auteur découvre la photographie d’art grâce à Diamantino Quintas, tireur-filtreur artisanal qui change sa manière de travailler. « Aujourd’hui, mon approche est plutôt une quête esthétique, mêlant expérimentations techniques et recherche de la beauté dans les formes et figures humaines. En postproduction, j’ai utilisé la solarisation pour enrichir l’imaginaire visuel au-delà de ce que l’œil humain perçoit normalement », explique-t-il. Si « cette série n’a aucune volonté d’apporter un jugement sur les pratiques photographiées, qu’il soit positif ou négatif », comme le précise le photographe, son appareil, lui, scanne, symétrise, ouvre la voie d’un imaginaire dystopique quelque part entre les contrastes d’un Sin City et les ordres religieux de Dune. Là où le noir révèle, comme toujours, la lumière.