Sujets insolites ou tendances, faites un break avec notre curiosité de la semaine. Dans ses images, l’artiste Adam Ekberg allie photographie, installation et performance. Une conjugaison toute contemporaine de situations presque improbables.
« J’ai installé mon appareil photo dans mon jardin et, à la grande surprise des voisins, j’ai commencé à lancer des ananas en l’air afin qu’ils génèrent une éclipse. » Ces mots d’Adam Ekberg, pour qui est habitué à nos curiosités, devraient constituer une entrée en matière savoureuse. Mais derrière ses installations loufoques, ces inventions dignes de Vil Coyote, se cache une vraie réflexion sur l’instant et une volonté assumée de la performance. L’artiste installé dans le New Jersey, aux États-Unis, fait preuve d’une exigence redoutable dans la conception de ses mises en scène.
Pour qu’un évènement se produise, Adam Ekberg travaille ses performances très en amont. De l’idée à l’esquisse, de la réalisation au résultat final. « Mes photographies commencent sous forme de croquis que j’épingle au mur de mon studio, explique-t-il. Puis je fais le nécessaire pour que la situation imaginée se déclenche.» Le photographe entrevoit son processus de création comme un jeu. Trois règles s’imposent : aucun trucage à la prise de vue (la caméra est un témoin), les situations doivent être générées par l’artiste seul, et la photo obtenue doit refléter le dessin originel.
L’éphémère de l’action et du geste
« Toutes mes images partagent une même recherche autour de l’absence et de la présence, analyse Adam Ekberg. Elles expriment également les contradictions entre l’éphémère de l’action et du geste, et la permanence statique du moment photographique. » Ses questionnements viennent de son expérience en tant qu’assistant-hospitalier auprès de personnes séropositives et atteintes du Sida. « Être assis près de quelqu’un au moment de sa mort reste l’expérience la plus puissante de ma vie. J’ai senti que ce moment n’était pas représentable, alors j’ai essayé de trouver un langage pouvant transcrire cette fragilité humaine. »
Il est vrai que les clichés d’Adam Ekberg questionnent la présence humaine et ses modalités d’action. Nous aimerions voir le hors-champ, découvrir le dispositif qui a conduit à l’instant précis recherché par l’artiste. Si certaines installations jouent avec l’équilibre des objets comme dans Bic Lighter, Banana and Cocktail Umbrellas, d’autres captent la fugacité du mouvement visible, par exemple, dans Lawn Chair Catapult. Ainsi se mettent en place des saynètes en forme de petits contes surréalistes et poétiques qui convoquent l’imaginaire du spectateur.
© Adam Ekberg